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À Colmar, le DAL monte d’un cran

Le jeudi 25 septembre 1997.

« S’il le faut, nous procéderons bientôt à une réquisition », lança Simone Roesch, la présidente du comité Droit au logement de Colmar lors d’une manifestation et d’un « coucher symbolique » devant l’Hôtel de ville, le 7 décembre 1996. Le samedi 13 septembre, les militants, épaulés par quelques 80 sympathisants, ont officiellement investi, en présence de plusieurs journalistes et d’une équipe de France 3-Alsace, une maison de six pièces sise 19, rue Neffzger, pour y installer Aïcha Boussaid et ses sept enfants, âgés de 3 à 22 ans. Une première dans la région et dans une ville moyenne française, qui compterait, selon la dernière statistique INSEE (de 1990 !), 1700 logis vides, un chiffre à réviser probablement à la hausse.

Expulsée en juillet 1996 d’un appartement géré par l’OPAC colmarienne du logement, cette famille criblée de dettes n’a cessé d’errer depuis, trouvant parfois très provisoirement refuge auprès d’une parente ou de personnes vivant elles-mêmes dans des conditions précaires. Depuis la création, en octobre 1996, du DAL Colmar, les animateurs du mouvement multiplièrent les interventions auprès de Cyrille Schott, le préfet du Haut-Rhin, et de Gilbert Meyer, député-maire (RPR) « en charge » de 65 000 administrés. Ayant appris mi-août que la situation des Boussaïd n’avait guère évolué favorablement, le DAL reprit immédiatement contact avec les services de la Préfecture, lesquels ont réglé à ce jour 16 des 27 dossiers soumis par celui-ci, rappelant les engagements du représentant de l’État, en date du 20 décembre 1996, de dégager une solution viable dans les deux mois. Le 3 septembre 1997, l’association écrivit une nouvelle lettre au premier magistrat, dans laquelle elle constatait la « faillite » de la municipalité à « sa mission sociale et à ses responsabilités », requérant le relogement immédiat des infortunés, également refoulés par le Centre d’hébergement d’urgence. Le bourgmestre ayant engagé une procédure d’expulsion en référé à l’encontre de la famille Boussaïd, Christian Riss, le juge de la première chambre civile près le Tribunal de grande instance, a reporté son verdict au 26 septembre. Pour le guider dans sa réflexion, peut-être lira-t-il l’ouvrage de doctrine rédigé en février 1956 par C. Laplatte, conseiller à la Cour de Colmar, Les Squatters et le droit, « un plaidoyer en faveur de la Justice et de l’humanisme juridique » (Daniel Rops dans sa préface). En attendant, les occupants du lieu demeurent sur place. « S’ils pouvaient s’y maintenir, ce serait une grande victoire », déclare Simone Roesch, satisfaite de « l’encourageante mobilisation ». La solidarité ne mollit pas ; des habitants et des adhérents du DAL leur prodiguent soutien matériel et moral.

Au-delà de ce « cas » particulier, le DAL déplore notamment que le préfet et le maire n’exercent point leur droit de réservation, respectivement de 25 et 20 %, sur le parc de logements sociaux. Par conséquent, il a décidé de se substituer aux autorités compétentes et d’appliquer la réglementation censée être en vigueur. Le 23 juillet 1997, ses membres avaient rencontré Louis Besson, secrétaire d’État chargé du Logement, revendiquant une amélioration notoire de la loi du 31 mai 1990 portant son nom, ainsi qu’un moratoire sur les expulsions.

Sur ces points comme sur tant d’autres, la frilosité (terme sans doute trop soft !) s’avère patente…

René Hamm