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Non, le mouvement ne faiblit pas ! oui, il doit s’amplifier pour gagner !

Le jeudi 5 juin 2003.

La journée du 27 mai était donc la 9e journée de mobilisation initiée par le secteur enseignant. Elle avait été élargie à un appel à la grève et à manifester à tous les secteurs interprofessionnels du public et du privé. Mais c’est bien le public qui a défilé nombreux, une fois de plus, même si des médias (pourtant en pleine désinformation) ont souligné la présence de plus en plus marquée (bien que timide) de travailleurs du privé. Le secteur enseignant qui ne décolère pas a, là aussi, fourni les plus forts contingents des manifestant(e)s. Au gré des régions, on trouvera les PTT, cheminots, communaux, impôts, santé, sociaux, équipement, ANPE, les postiers, etc., qui seront présents de façon plus ou moins importante. Les manifestant(e)s étaient plus de 10 000 à Nîmes, 12 000 à Lyon, 20 000 à Bordeaux et Avignon, 6 000 au Havre, entre 10 000 et 15 000 à Rennes, 12 000 à Lorient, 4 000 à Vannes, 30 000 pour Saint-Nazaire et Nantes, près de 10 000 à Nancy, entre 20 000 et 30 000 à Lille… Ces chiffres confirment donc l’ancrage du mouvement et son caractère massif.

Dans les cortèges, selon les informations qui nous sont transmises, on peut lire certains signes qui en disent long sur le bouillonnement permanent, syndical et politique. Ainsi, la CGT reste discrète sur le mot d’ordre de grève générale reconductible public-privé, mais fournit souvent de gros cortèges de manifestant(e)s ; Force ouvrière est moins nombreuse mais reste radicalement orientée vers ce mot d’ordre dont la CGT semble ne pas vouloir avant le 2 juin. La FSU reste très présente, mais ne semble pas avoir un rôle prépondérant. De nombreuses sections CFDT, voire des unions départementales de la confédération, rejettent la traîtrise de Chérèque, en participant aux manifestations, et parfois appellent à la grève générale interprofessionnelle au son de l’Internationale (Lille) ! Les cortèges Sud grossissent au fil du temps (Avignon, Bordeaux, Rennes, Le Havre, Nancy, etc.), indiquant une montée en puissance d’une forme de rejet des syndicats réformistes, de leur manque de positionnement dans la crise. Voilà longtemps que les Sud-solidaires (Rail, Éducation, etc.) réclament l’implication de tous et de toutes dans une grève générale reconductible public-privé, au même titre que la CNT qui a néanmoins plus de peine à assurer une visibilité dans les cortèges massifs. C’est d’ailleurs fréquemment que CNT et Sud défilent dans les mêmes portions des cortèges syndicaux.

Autres signes tangibles d’un décalage entre syndiqué(e)s en lutte et centrales syndicales, la difficile cohabitation entre coordination d’établissements en lutte, regroupant syndiqué(e)s et non-syndiqué(e)s et qui fonctionnent par assemblées générales souveraines. Il y a des villes (Lille) où les manifestations sont constituées de forts cortèges des établissements en lutte. Les mots d’ordre sont plus radicaux chez ces « indépendants » de la lutte sociale, syndiqués ou pas. Cette situation permet, à n’en pas douter, d’exiger des hiérarchies syndicales des positionnements moins poussifs. Des assemblées générales ont souvent eu lieu après les manifestations du 27 mai, en présence de divers métiers, et favorables (Lyon, Nîmes, etc.) à une grève générale étendue au secteur privé. Toutefois, les grandes villes semblent avoir plus de difficultés à pratiquer la convergence interprofessionnelle au cours d’assemblées générales (Lyon). Dans cette ville, le slogan « Grève générale jusqu’à satisfaction des revendications ! » est souvent repris dans la manifestation du jour.

Du coté des libertaires, ils défilent essentiellement dans les cortèges CNT, ou dans les cortèges de leurs syndicats respectifs. À Rennes, Vannes, Lyon, Lille ou Nancy par exemple, les militant(e)s de la Fédération anarchiste maintiennent une certaine visibilité avec tracts et banderole. Autre signe de durcissement des opinions : les autocollants « Grève générale » édités par le groupe d’Ivry de la FA sont portés par bien des sympathisant(e)s dans les manifestations. Et l’on pourrait multiplier les exemples qui montrent que l’exaspération et la radicalisation gagnent les gens en lutte, ballottés entre des positionnements confédéraux ambigus qui risquent d’épuiser les enseignants en lutte depuis des semaines, une base qui pousse à une généralisation du conflit, et un gouvernement qui ne cédera rien sur le fond.

Daniel, groupe Gard-Vaucluse