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Une Petite sélection de disques et de livres pour l’été

Le lundi 7 juillet 1997.

« Il me faut regarder au-delà de cet épais brouillard, et apprendre à lutter sans posséder d’outil… ». Lluís Llach a décidé de fêter ses trente ans de chanson en reprenant d’anciens titres, sans nostalgie aucune, mais en les dépouillant, pour la première fois sur scène, de toute orchestration. Ainsi mises à nues, ces chansons de résistances et de luttes prennent un ton nouveau, une nouvelle force. Il faut bien constater — et c’est parfois un constat amer — que ces mots inventés « à force de nuit » sous le franquisme, peuvent être repris aujourd’hui sans avoir rien perdu de leur actualité.

Lors de la dizaine de concert que Lluis Llach a donné récemment dans la capitale, les Parisiens ont pu découvrir un chanteur catalan plus revendicatif que jamais, et qui se bat toujours pour le droit à la différence. Après avoir rappelé que tout pouvoir « corrompt et pourrit », Lluís Llach a présenté la chanson « À force de nuit » ainsi : « J’ai écrit cette chanson en pleine dictature. Mais, aujourd’hui, dans mon pays, certains ministres disent qu’il y a trop d’homosexuels dans les rues. Enfin, ils disent homosexuels, mais ils pensent pédés… Alors, si un jour on vient me chercher, je veux qu’ils me trouvent droit, debout, et avec cette chanson-là… : "À force de nuit, j’apprends, le prix d’un effort, le spasme des pleurs, l’alphabet du cri. À force de nuit, j’ai envie d’un jour nouveau, malgré les bourreaux, massacreurs de raison et de vie : n’oubliez aucun nom, il faudra s’en souvenir pour ne pas répéter le cours de l’histoire." »

Une voix, un piano, des émotions plurielles conjuguées à la beauté d’une langue-musique… Pour ceux qui n’ont pas eu la chance de voir Lluís Llach cette année, un disque enregistré en public au cours de plusieurs concerts donnés en Espagne permet de retrouver toute la magie de cette voix rebelle. Un disque appelé tout simplement : nu.

« Nu », Lluís Llach, XXX anys. Un CD édité par Picap, nº 90 0102-03.


On l’a parfois comparé à Lluís Llach, peut-être parce qu’il vient lui aussi d’un petit pays, ou bien parce que sa voix est porteuse d’émotion profonde, mais Peio Serbielle ne peut être comparé à personne. Venant d’« Une terre fragile, sur laquelle il faut marcher sur la pointe des pieds », comme il le disait récemment sur les ondes de Radio libertaire, Peio Serbielle a donc choisi de mettre son talent au service d’une langue — l’euskara — et du Pays basque, l’Euskadi. Dans son dernier album, il reprend des chansons traditionnelles, en leur donnant ce qu’il faut de modernité, tant dans l’élaboration orchestrale que dans les voix, la sienne et celles — toute aussi belles et sensuelles — de quelques chanteuses amies. Chanson d’amour ou chanson de lutte, la première qui ouvre son album est ainsi dédiée à : « Gaizka, basque et homme libre, condamné à deux ans, quatre mois et un jour de prison, pour insoumission au service militaire ». Un disque beau à entendre, et à voir aussi, tant le livret et la pochette ont fait l’objet d’un véritable travail artistique. Beauté minérale et végétale, ce qui reste et ce qui passe… En espérant que Peio Serbielle continuera longtemps à nous offrir d’aussi beau cadeau.

« Euskadi Kanta Lur », Peio Serbielle. CD édité par Déclic Communication.


Après le plaisir des oreilles (et des cœurs), quelques petits mots de littérature. Pour cet été, plongez-vous donc dans le livre qui vient de sortir sur Boby Lapointe. Une biographie écrite par Jacques Perciot, pour redécouvrir celui « qui voulait jouer de l’hélicon ».

Un curieux bonhomme qui, outre l’hélicon, la guitare sommaire et le violon tzigane, savait fort bien jouer avec les mots… Ce qui nous ferait presque oublier qu’il fut également l’auteur d’un nouveau système mathématique, et l’inventeur d’ingénieuses trouvailles tel que l’embrayage automatique. Un personnage hors du commun que cette biographie, simple mais chaleureuse, met bien en lumière.

Boby Lapointe, Jacques Perciot. Éditions Denoël.


Et pour finir, voici un livre « coup de cœur » destiné aux enfants des lecteurs du Monde libertaire. En effet, Gudule vient de sortir un nouveau roman dans la série « Les frousses de Zoé ». Après Le fantôme du panier à linge, et Les ogres du centre commercial, voici donc En colo avec des démons. Un roman délicieux, plein de suspense et d’humour, que les adultes aussi peuvent apprécier en cette période estivale. On est loin de la lecture « politiquement correcte ». Eh oui ! Même en bibliothèque rose, le souffle libertaire de Gudule n’est jamais très loin… Et vous ne regarderez plus jamais des nains de jardins de la même manière après avoir lu ce livre… Mais je n’en dis pas plus !

En colo avec des démons, Gudule, collection : « Les frousses de Zoé », Bibliothèque rose.


Tous ces disques et livres peuvent être commandés à la librairie du Monde libertaire, 145 rue Amelot, 75011 Paris.

Cathy Ytak