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éditorial du nº 1441

Le jeudi 1er juin 2006.

Personne n’est dupe : « Super Vilain », le héros de Matignon, s’il vient au secours des salariés de l’usine Sogerma de Mérignac, c’est simplement pour essayer de gagner des points dans les sondages. Un peu plus et on croirait que les différents gouvernements successifs de gauche comme de droite, dont celui de monsieur de Villepin, n’ont jamais laissé la population s’appauvrir. Mais avons-nous la mémoire aussi courte que cela ? Avons-nous déjà oublié les différentes délocalisations, les licenciements boursiers ; le CNE et le CPE ?

Non évidemment… Le Premier ministre est au plus bas depuis le Mouvement anti-CPE et l’affaire Clearstream, et le sera probablement encore, même avec son soutien aux employés de Sogerma et son « plan Solidarité grand âge pour 2007-2012 ». Heureusement pour lui, le ridicule ne tue pas.

Mais au-delà de la manoeuvre politicienne de notre super héros, l’affaire Mérignac émeut, même si le scénario a encore un air de déjà vu : des licenciements annoncés, une grève, des négociations, la moitié des effectifs sont préservés… Et il y a toujours cette incompréhension : une multinationale qui fait des bénéfices colossaux et qui, parallèlement, ferme des sites. Stupéfaction pour certains, scandale pour d’autres. Les actionnaires et patrons s’en contreficheraient-ils ? N’auraient-ils donc pas de coeur ? La question n’est pas là. Qu’ils aient un coeur ou non, c’est ainsi que fonctionne le capitalisme moderne. Les concurrents sont eux aussi très puissants, et il y a de l’argent à gagner à licencier et faire bosser une main d’œuvre moins cher, ou à remplacer des êtres humains par des machines.

On ne peut prendre le risque de ne pas faire de bénéfices, sinon, c’est la spirale infernale, car il faut toujours investir, inventer du nouveau, du neuf, du moins cher, du plus rentable pour rester sur le marché. Voilà où nous mène la logique de profit, voilà où nous mène ce système.

À Matignon on voudrait nous faire croire que l’État a son mot à dire. Oui il a son mot à dire, celui de l’allié, et celui du bras droit. Car l’État c’est le GIGN envoyé contre les salariés de la SNCM en grève ; car l’État c’est le tribunal qui punit les syndicats de la Régie des transports de Marseille à payer 10 000 euros par jour si ils continuent leur grève ; car l’État c’est l’instrument législatif par lequel on légalise les contrats précaires comme le CNE.

En l’occurrence, c’est le bras droit, en déficit d’image, qui demande un coup de main à son allié en préservant la Sogerma. Et ce dernier, lui chuchote qu’un contrat sur certains avions militaires serait bienvenu…