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Prison

Avertissement

Le jeudi 5 février 1998.

Brimades, vexations, exploitation, tel est le lot quotidien des détenus. Quand ce ne sont pas les coups, comme à la prison de Grasse, où les matons ont fêté la Saint-Sylvestre à leur façon (Le Monde du 24 janvier 1998). Mais, dans le sordide, il y a pire. La mort rode en permanence dans nos geôles démocratiques. Suicides ou morts liées à des maladies non soignées sont fréquents. Aussi, à Fleury Mérogis, pour défendre un des leurs, souffrant de pathologies lourdes et en état dépressif grave, un certain nombre de détenus font circuler une pétition et lancent un avertissement à l’administration ainsi qu’à la justice.

La rédaction

Ce communiqué ne doit pas être lu comme différenciant les « bons » des « méchants », mais pour dire que les détenus dont la culpabilité est réciproquement reconnue et qui de ce fait arrivent tant bien que mal à supporter l’insupportable des conditions carcérales ne peuvent plus, devant la recrudescence des suicides et des décès suite à des maladies que l’incarcération aggrave, se lever le matin avec un mort dans leur cellule.

Que ce soit une mort dite naturelle, un suicide ou ce phénomène de survivance que le désespoir n’arrive pas à éteindre.

La dignité des mourants interdit qu’un homme soit le témoin involontaire de leur fin. Nous, détenus coupables de pauvreté dans notre majorité, ne sommes pas condamnés à voir mourir autrui. Ce n’est pas inclus dans notre peine et nous ne sommes pas les « surveillants » de nos codétenus en danger de mort.

Pas plus que nous ne voulons devenir les « fossoyeurs moraux » en enterrant en nous le souvenir des codétenus décédés. D’être tous mortels fait que la véritable peine de mort est de mourir en prison.

A. H. Benotman