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Espagne

Le Partage de la richesse et la semaine de 35 heures

Le jeudi 12 février 1998.

On parle beaucoup ces jours-ci de la semaine de travail de 35 heures. Le gouvernement du Parti populaire s’est vite décidé à considérer ce moyen comme peu réalisable avec un résultat douteux. L’exemple français si proche et à la fois si lointain dans son application sera pris comme exemple par le patronat européen afin d’évaluer les bénéfices que cette mesure pourra lui apporter.

La loi française qui passe en ce moment à l’Assemblée nationale n’apportera pas de solutions importantes au fléau du chômage puisqu’elle ne s’attaque pas aux origines et aux conséquences du chômage.

Effectivement, le chômage est un facteur qui aide le capitalisme à flexibiliser et obtenir de plus grands bénéfices du travail des salariés. Plein emploi et grands bénéfices des entreprises ne doivent pas aller ensemble, au même titre que l’axiome sur lequel se sont créés les dernières réformes espagnoles du travail, à savoir « plus il y a de bénéfices pour l’entreprise, plus il y a création d’emplois fixes », et qui s’est effondré évidemment à la lumière des données sur les embauches ; les mesures à la française qui créent une diminution du temps de travail consentie entre patrons et syndicats n’amèneront pas grand chose.

Nouvelles réformes : nouvelles régressions

Dans une Espagne où les entreprises et les banques chaque jour gagnent plus, où se suivent au pied de la lettre les diktats du libéralisme économique quant à la flexibilité du marché, avec laquelle les travailleurs supportent toutes les contradictions du système capitaliste, il y a plein d’accords salariaux qui se font toujours au détriment des plus faibles. Le partage de la richesse est la seule solution possible pour remédier à l’injuste distribution des revenus que nous subissons, et dont le chômage n’est rien de plus qu’une des conséquences de cette inégalité. La CNT demandait en 1979 une réduction de la semaine de travail jusqu’à 35 heures. Aujourd’hui, cette mesure serait faible parce qu’elle ne nous aiderait pas à satisfaire la principale demande sociale de notre société. De nos jours, si réellement il existe un intérêt pour les gouvernements pour en finir avec les souffrances des chômeurs, cela nécessiterait une réduction de la semaine de travail à 30 heures, couplée avec un avancement de l’âge de la retraite et la fin totale des heures supplémentaires, des contrats précaires (intérim, CDD…). Tout le contraire donc de ce qui est imposé à travers la dernière réforme du travail, réforme pour laquelle aussi bien le FMI, que le vice-président et ministre de l’économie Rodrigo Rato et la CEOE ont été d’accord pour dire qu’il faut aller plus loin. « Le marché est celui qui gouverne et l’État est celui qui administre ce que lui dicte le marché ». Sous cette déclaration de principe de la pensée unique de fin de siècle, se trouve bel et bien une réalité que l’on cache aux travailleurs en tentant de leur faire croire que leurs efforts, leurs sacrifices, amèneront, encore une fois dans un futur toujours plus lointain, des résultats positifs pour l’économie de leur pays.

Des grands patrons de la banque d’Espagne à ceux de la banque mondiale, tous connaissent très bien les mesures qui mettraient fin à l’inégalité sociale.

Toute disposition comme celles adoptées lors de la rencontre sur l’emploi à Luxembourg, qui ne rendront pas une part des richesses à la classe sociale qui apporte sa force de travail et grâce à laquelle les nababs accumulent de grandes fortunes, est vouée à l’échec, sinon à la satisfaction de plus grands bénéfices pour ce sacro- saint marché que les économistes politiques situent au-dessus du bien et du mal, et qui ne doit rendre compte ni à dieu ni au diable.

Extrait de CNT (janvier 1998)