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éditorial du nº 1474

Le jeudi 19 avril 2007.

Quand vous aurez votre hebdomadaire préféré entre les mains, le premier tour de l’élection du roi des grenouilles sera à peu d’encablures.

Jusqu’au dernier moment les coassements des prétendants au trône provoqueront un vacarme assourdissant autant que cacophonique (mais cacaphonique serait plus juste) soyez-en assurés.

Le ridicule ne tue plus depuis longtemps — et c’est bien dommage —, sinon moult batrac(hi)ens seraient passés ad patres pour le plus grand confort de nos oreilles. L’un se vautre dans la fange du sinistre Gobineau tout en expectorant des tirades de Jaurès. Une autre prend des accents de Déroulède et confesse simultanément qu’elle voue une tendresse particulière à Louise Michel.

Des créatures amphibies émergent de la mareaux relents fétides, la bave aux coins de la gueule et, dans un spasme de jobardise absolue, décrètent qu’elles sont les Gracques et Spartacus qui balaieront les iniquités du temps présent par la seule magie de leur verbe.

Oh ! il peut bien saliver de contentement l’homme-tinette juché sur son visqueux promontoire de Montretout ! Son art à déverser des sanies dans la mare publique est tel qu’il a bien contribué à faire de cette dernière un quasicloaque.

Bien puissant est l’anophèle des élections. À preuve, même les têtards les plus modestes sont frappés par la fièvre de la pêche aux voix. Ainsi celui qui, pour séduire l’hélicologiste de TF1, tourne vers lui un regard de crapaud mort d’amour.

Décidément, entre le miasme et la jonquille le printemps aura fait son choix… ou plutôt nous l’aurons laissé se perdre dans le marais.

Ainsi va la démocratie dite représentative, et celle-ci de faire les délices de doctes personnages qui pérorent et s’esbaudissent jusqu’à la soûlerie devant ce qu’ils considèrent comme la forme la plus aboutie (emboutie ?) du « pouvoir citoyen ».

Le roi des grenouilles n’est pourtant que le grand chambellan d’une inamovible Régence qui tire les ficelles depuis les conseils d’administration du CAC 40. Mais cette marionnette affublée d’un costume de laquais en grande livrée possède néanmoins un pouvoir de nuisance considérable…

C’est que le premier serviteur des possédants commande lui-même aux autres zélés domestiques de l’appareil d’État, flics et juges en particulier !

Pourtant imaginons qu’un éclair de lucidité éclaire soudainement trop de consciences assoupies et obscurcies par ce médiocre sortilège.

Que verraient-elles alors ? D’un côté un rite grotesque qui consiste à choisir la couleur et l’épaisseur de notre laisse et de l’autre de libres printemps au goût de rouges cerises.