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Les « PACSistes » l’avaient pensé, ce que la gauche plurielle en a fait…

Le jeudi 24 septembre 1998.

Pour la PACS dans les ménages !

Le PACS ou la révolution des mœurs annoncée et ce qu’il en reste : un os à ronger, nos yeux pour pleurer et la rage pour gagner !

Issu des revendications des associations de femmes, d’homos et d’individus contre les institutions, la famille ou le mariage, le CUS, après diverses appellations a fini en PACS.

Lorsque la gauche plurielle se réapproprie le pouvoir en mai 1997, elle ne peut éviter de travailler sur un texte de loi qui va dans le sens du poil des « CUSsien(ne)s » qu’elle a beaucoup sollicité lors de sa propagande de charme préélectorale. Le projet reste un certain temps (presque un an) en gestation sur divers bureaux de présidents de commissions de l’Assemblée.

Au début de son règne, le nouveau gouvernement a bien d’autres chats à fouetter. À commencer par faire du pied au grand capital et oublier au plus vite les promesses faites aux associations de chômeurs qui ne sont pas pour rien dans le triomphe électoral « pluriel ». Une fois de plus, l’homme de la rue s’est fait biaiser par le politique…

Mais, revenons-en au PACS. En avril 1998, le dossier sort de sa longue sieste quand Matignon reçoit une pétition prétendument signée par 12 000 maires. Il ne faut pas longtemps pour découvrir que l’opération est un coup monté par l’association Provie (via ses relais « Alliance pour les droits de la vie ») de Christine Boutin, célèbre députée UDF proche de l’Opus Dei. De plus, les signataires ne sont pas tous maires, beaucoup de pétitions ne sont pas signées ou encore ne souscrivent que partiellement au texte original. À noter qu’un maire PS a signé (…) Du coup les associations pour le Contrat d’Union Sociale se mobilisent contre cette attaque, et réveillent les « pluriels ».

Le gouvernement prend note des remous soulevés dans l’opinion publique par le discours des associations intégristes, réactionnaires et fascistes autour du projet. Élisabeth Guigou pour « calmer le jeu » donne un premier coup de canif dans le contrat et pas des moindres : « ce projet ne sera ni un mariage, ni même un pas vers la reconnaissance du mariage homosexuel ». Le ton est donné !

Bien sûr, le gouvernement n’est pas sans savoir que parmi les électeurs de gauche, il y a aussi « des gens qui ont d’abord à cœur de se préoccuper de la famille ». Je suppose qu’il faut entendre par là, la vraie famille, mariée devant le Monsieur le Maire de ses deux mairies avec enfants légitimés et tout le tsoin-tsoin.

Puis, pour mieux rassurer cette population frileuse mais qui vote, les « pluriels » décident que le futur PACS ne se signera pas dans les Mairies, mais dans les Tribunaux de Grande Instance.

Comme ca, les couples bigarrés ne risqueront pas de croiser les couples effarouchés de juste-correctement-mariés, ni de mettre mal à l’aise leurs familles, avant la traditionnelle photo cruche, sur les marches de l’édifice communal public ! Puis, très rapidement, on fout discrètement dans la poubelle de l’histoire le chapitre sur l’adoption d’enfants par des couples homos, ou de procréation assistée pour les contractant(e)s du PACS.

Pour justifier leur acte radical, les faiseurs de lois déclarent : « les militants qui veulent ouvrir aux homosexuel(le)s la possibilité d’adopter un enfant sont très minoritaires ». Torché, c’est emballé. Au moins, ça évite de risquer de perdre un gros paquet d’électeurs potentiels pour les prochaines européennes ! Et puis ce qui chatouillait un peu l’électeur, c’était aussi le coté avantages fiscaux, héritages, accès aux mêmes droits juridiques et fiscaux que les gens normaux… Alors, Bercy qui avait d’abord carrément sucré du contrat ce coté « bassement matériel », sous pression de Mme Tascat, la seule membre de l’équipe gouvernementale chargée du dossier à être montée au créneau, est revenu sur ses positions. Au début, les PACSien(ne)s rempliraient leur déclaration commune d’impôts en 2000. Et puis après palabres, ce serait pour 2003, mais c’est que ça va coûter très cher à l’État, qui est tellement pauvre (pas manger, pas travail, s’il vous plaît, pitié, chers contribuables). Pourquoi pas plutôt 2147… C’est un chiffre rond ! Voilà pour les réticences de la gauche plurielle.

À droite, c’est plutôt du « ni oui, ni non »…

Passons rapidement sur les réticences de la droite face au projet. Cette droite, dont le seul souci après la claque électorale de mai 1997 et le scandale des alliances de présidents de régions avec le F. Haine aux régionales, est d’éviter de devenir les ringards réacs de droite face aux progressistes de gauche… Quel programme !

À part ça, vous pensez quoi du PACS, au RPR, à DL, à l’Alliance, à la moribonde UDF ?

Bof… Peut-être bien que oui, peut-être bien que non… Faut voir… Si ça rapporte en voix d’un côté… ou de l’autre… va savoir… Bon, laissons ces vieux et jeunes ringards de toutes les politiques à leur mollesse habituelle.

Mollesse me fait penser à l’un d’entre eux, trop absorbé à écrire son torchon sur la préférence nationale, pour s’intéresser à « ces gensfoutres de PAC… Comment déjà ? »…

Et qu’en pense le parti nazi-nostalgique du Front de la Haine ? Peu de déclarations officielles, à ce jour, signées du F.Haine ; il faut souligner qu’ils orchestrent le concert des associations paravents qui luttent contre le projet. Et puis, les fascistes et leurs amis intégristes ont tellement l’habitude de « bouffer de la féministe, du pédé et de la gouine » à longueur d’année dans les pages de National Hebdo, de Présent ou du Figaro-Magazine, qu’ils doivent nous en réserver de bien pires au sujet du PACS.

Parions que tout le parti de la Haine attend le coup d’envoi des attaques soit sifflé par Le Pen (centre convergent de tous les petits univers réactionnaires, révisionnistes et négationistes de « notre beau pays »). Rappelons, pour mémoire et non sans plaisir, que le Maigret de Cornard a encore loupé, cette année, son entrée en scène comme vedette dans le grand show du parti raciste. Donc, tout le monde attend les propos du chef qui sans nul doute, seront une fois de plus très surannés… Pourrait-il s’empêcher de sortir l’artillerie lourde ?

De toutes façons, les insultes du « Pen » sur le lobby gay égaleront probablement en mépris celles que la veuve Stirbois a adressées aux féministes lors de la clôture de l’Université d’été du F. Haine. En plus, elle a juré à la foule en extase que jamais elle ne deviendrait lesbienne, mais resterait toujours près, très près des hommes… Premièrement, personne ne lui avait demande de devenir lesbienne selon toute vraisemblance et deuxièmement, comme le répète le bon sens populaire, il ne faut jamais dire jamais ! Enfin, même si un jour elle devenait lesbienne, ça m’étonnerait en tous cas qu’elle PACS ouvertement, ou qu’elle nous fasse une « sortie du placard »…

Pour la bonne bouche : la position « sainte » par le goupillon

L’épiscopat de « la fille aînée de l’église » n’a pas eu trop de trois jours pour donner son avis (passionnant) sur le projet du PACS, c’est non : il ferait doublon avec le mariage… Résumé des arguments des parties présentes au débat. Avant le début des discussions, les membres les plus libéraux du conseil des Évêques ne promettaient déjà « pas de miracles » et « émettaient de profondes réserves sur ce projet de loi ». Ces « libéraux » avaient « peur que les liens de la famille traditionnelle, déjà fragiles, ne le deviennent encore plus, par cette confusion des genres ».

Allons, Monsieur le Vê-qué, il ne faut pas avoir peur pour les générations futures. À mon humble avis, les jeunes n’auront pas besoin d’aller au catéchisme pour éviter de faire un amalgame entre le mariage à grand tra-la-la et le contrat d’union !

Plus généralement, l’épiscopat trouve que « l’on a été trop vite pour sortir ce projet ».

Et bien, on voit que le cul béni qui a sorti cette énorme sacro-sottise ne milite pas comme moi depuis 1972 dans les mouvements gays et libertaires ! Je pense, au contraire, qu’on en a mis un temps pour accoucher de ce projet ! Plus d’un gouvernement n’aura fait que tourner autour du pot. Le « pluriel » n’aura qu’amorcé un petit pas de danse en avant le jour, deux pas en arrière la nuit, un pas sur le côté le matin et le soir, un pas de l’autre côté… Pour un autre Monseigneur de la clique, « on ne peut pas reconnaître un couple homosexuel, sinon c’est confondre les rôles, par exemple. entre un enfant et un adulte [NB : là, j’avoue que je suis total-largué, je ne vois pas du tout ce qu’il sous-entend…], ou entre un homme et une femme ».

Ah, entre un homme et une femme, là je comprends mieux le sous-entendu. Le bon vieil argument « cathodique » : ou tu es mâle, ou tu es femelle. Circulez, entre les deux, il n’y a rien à voir, sinon les anges…

Du côté de chez les huguenots, on s’avoue « pas enthousiaste ». C’est le moins qu’on puisse dire quand on lit la suite : « les églises protestantes sont pour la lutte contre l’ostracisme et la stigmatisation dont souffrent les homosexuels [tiens, je n’ai jamais eu de stigmates, moi !] mais avant tout pour le principe de la non-confusion et du respect de la différence des sexes qui constitue toute vie sociale ».

Tu peux répéter ton charabia, Monsieur Huguenot, s’il te plaît ? Alors, tu veux ou tu veux pas ?

Pour conclure, les curés, toutes tendances confondues (mis à part, bien sûr, les intégristes) sont nostalgiques du temps béni des « David et Jonathan » et autres camps pour homos déguisés en camps naturistes dans les années 60. Nostalgiques de leurs discours bêtifiants, moralisateurs et culpabilisateurs, quand ils régnaient sur la vie de ces « malheureux invertis, déviants et autres brebis égarées ». Ils auraient eu presque envie de nous aimer… en ces temps-là, où nous ne revendiquions que nos placards et nos cages aux folles ou à goudous… Décidément, ça n’a pas aéré le cerveau des curetons de leur enlever leurs soutanes, ils puent toujours autant le moisi et le renfermé.

« La vie est un éternel combat, mon fils… » C’est ça, Père Dugland, depuis le temps que je me bats contre la connerie, je m’en étais aperçu tout seul !

La liberté se prend, on ne « PACStise » pas avec l’État !

Patrick Schindler
groupe Claaaaaash (Paris)