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éditorial du nº 1136

Le jeudi 15 octobre 1998.

Il y a de cela quelques jours, l’hôpital Édouard-Herriot de Lyon a fait parler de lui dans tous les médias, suite à l’accident survenu dans la nuit du vendredi 25 au samedi 26 septembre. Dans cet établissement, qui doit être le second en importance au niveau national, une panne électrique de deux heures est à l’origine de la mort d’au moins deux patients.

Il faut dire au moins, car les causes précises restent, à la date d’aujourd’hui, officiellement inconnues et les conséquences de l’accident demeurent tout aussi indéfinies.

Comme il se doit dans ce genre d’affaire, les autorités « mettent tout en œuvre pour » ! Et une enquête est ouverte, portant maintenant sur les décès de dix personnes survenus cette nuit-là.

Du côté de la presse locale lyonnaise, les responsabilités sont déjà toutes identifiées : c’est l’hôpital public, avec son incompétence chronique, ce sont ces salauds de salariés-fonctionnaires-qui-n’en-foutent-pas-une qui sont coupables !

Des torchons régionaux n’hésitent pas à surenchérir au travers de titres plus crapuleux les uns que les autres : de « l’hôpital responsable mais pas encore coupable » à « Édouard Herriot doit être fermé ».

Ces journaux à la solde des notables lyonnais redoublent de zèle pour apporter leur dévoué concours au plan de restructuration qui doit s’appliquer aux Hospices civils de Lyon.

Ce plan est lui-même la suite logique de la politique de restriction budgétaire, entamée depuis le début des années 80, avec, entre autres, la mise en place du système des « enveloppes ».

La cause réelle du drame survenu à Édouard Herriot, la voici : c’est la politique de démantèlement du service public !

Comme par hasard, le service de la maintenance électrique à Édouard Herriot était « externalisé » c’est-à-dire confié à une entreprise privée extérieure (dans ce cas, il s’agissait de la société Esys-Montenay, une filiale de Vivendi). Et c’est cette société privée qui a mis une heure avant d’intervenir pour réparer la panne. Des délégués syndicaux de l’hôpital affirment que : « c’est un ingénieur EDF qui est arrivé [le premier], près d’une heure après l’interruption du courant électrique, et encore quinze minutes avant les personnes qualifiées de l’entreprise de maintenance [extérieure] ».

Pour nous, c’est tout l’enjeu de la défense du service public, du droit à la santé, du droit à être sauvé, qui est en jeu. C’est le gouvernement actuel, c’est la clique de notables et les technocrates de l’Agence régionale d’hospitalisation qui portent aujourd’hui l’entière responsabilité morale et politique des morts. Face à eux, aucune concession n’est possible car c’est notre peau qui est en jeu !