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éditorial du nº 1585

Le jeudi 4 mars 2010.

Au réveil, lundi (de la semaine dernière quand on lira ces lignes), une subtile sensation d’espoir et de fraîcheur. L’air vibre de la juste colère des salariés de Dunkerque. qui claquent la porte des négociations au nez des patrons et des politicards ; le lendemain, leur noble rage gagne les raffineries nationales, les transporteurs de la CGM, les aiguilleurs des aéroports. Allaiton virer les salops à coups de pompes ? Une grève étendue, une grève générale ? Plus d’essence, plus de départ pour la glisse, la presse unanime glapit de feinte inquiétude afin de ranimer s’il en était besoin la trouille indispensable en démocratie totalitaire néolibérale. Las, dès mercredi, s’envolent les espoirs ; les affaires sont reprises en main par le ministre qui fait les gros-yeux-pour-rire à un Margerie goguenard ; la glorieuse Centrale thibaldienne siffle, tel Seillère, la fin de la récréation. Vite redescendu, le soufflé : vagues
promesses de non-fermeture pendant cinq ans des raffineries alliées alors que rien n’était engagé en ce sens, et on laisse les copains de Dunkerque continuer leur grève tout seuls jusqu’à la réunion du 8 mars. La proie pour l’ombre.

Les titatas du prince et de sa cour sauvent la face avant les régionales, le patron fait ce qu’il veut — fermer Dunkerque — et la CGT, sans rire, parle de victoire. Sinistre retour — Urbi et orbi — à la réalité de marché. La Grèce et l’Espagne pompées à mort par les banques, livrées au diktat du FMI comme de vulgaires républiques bananières, sous le regard faux-cul des p’tits copains de la sainte alliance européenne qui ne lèvent pas le petit doigt : ils savent que bientôt ça sera leur tour ; Obama découvre la réaction crasse de ses concitoyens ; au Rwanda, Nagy Bocsa gomme les Tutsis, droit dans ses bottes ; l’OTAN massacre les civils afghans. Pour cause de vague délinquance passée, un Ali Soumaré, Noir et de basse extraction comme dirait le prince Poniatowski, est cloué au pilori par la classe politique UMP, celle-là même qui encense par ailleurs deux voleurs de Simca 1000, Madelin et Devedjian. Des agriculteurs exsangues survivent à coups de subventions : pas pour longtemps, c’est pas loin 2012 et la libre concurrence agricole totale. 20 000 chômeurs officiels de plus ce mois-ci. Et ça délocalise et ça ferme tous les jours : le rouleau compresseur du marché libre poursuit son triomphal écrabouillage humain. Pas étonnant que le feu des révoltes couve et se ranime ça et là. Et ce n’est ni l’avalanche fétide des neiges de l’île de Vancouver jadis volée aux Indiens, ni la prétendue chasse aux merdailles olympiques, ni tout cet obligatoire et juteux fromage médiatique — dont on se contrefout — qui éloigneront les anarchistes de leur incontournable projet : des luttes, des luttes, des luttes.