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Les zones d’éducation prioritaires

Le jeudi 23 décembre 1982.

Celà fait longtemps que l’esprit ZEP était dans l’air il s’agissait d’accorder des moyens privilégiés aux établissements touchés par l’échec scolaire. Le but des ZEP était de permettre aux enfants des quartiers défavorisés d’acquérir une véritable formation. Les budgets pédagogiques allaient être augmentés [1], la sous qualification des jeunes supprimée, l’analphabétisation croissante enrayée. À la sortie de l’école, les gosses de prolos n’auraient plus à choisir entre les boulots merdiques, le chômage ou la délinquance. Enfin, par l’interpénétration de tous les secteurs sociaux, culturels et éducatifs, le projet devait prendre une dimension globale et résoudre ainsi tous les problèmes dus à une trop grande parcellisation des actions mises en place.

Or, il semble aujourd’hui que le projet ZEP a accouché d’une souris. Dans toutes les écoles, dans tous les lycées, c’est l’écœurement. Les dossiers ont été déposés ; les sous sont bien là ; mais, comble de l’ironie, au lieu d’être attribués aux écoles qui en ont vraiment besoin, l’argent va aux établissements de haut niveau. C’est ce qui se passe en ce moment à Roubaix. La municipalité socialiste préfère filer le fric à l’Alma-Gare [2] et aux établissements de bonne réputation, plutôt qu’à toutes ces écoles de Roubaix-Nord où pourrit une jeunesse immigrée. C’est un choix délibéré qui peut surprendre ! Mais dans le cadre étroit de sa politique réformiste et sous la pression du patronat, le gouvernement ne peut faire autrement. Lutter contre l’échec scolaire, c’est bien beau, mais l’économie capitaliste a besoin d’une main-d’œuvre sous-qualifiée ! Il n’y a qu’à voir les déclarations du CNPF… Celui-ci ne cache pas son jeu ! Les bougnoules et les fils de prolos à la turbine ! Et gouvernement et syndicats, en bons gestionnaires du capitalisme, sont bien obligés de suivre. Bref, on peut relire L’École aux enchères de Charlot, on s’apercevra qu’il n’y a vraiment rien de changé dans le système éducatif, bien au contraire ! À nous de tirer profit des rancœurs qui ne vont pas tarder de s’accumuler.

Éric (groupe de Lille)


[1Somme allouée actuellement par la Caisse des écoles de Roubaix pour l’achat de fournitures : 43 F par enfant. Prix du moindre manuel scolaire : 45 F.

[2L’Alma-Gare est un quartier populaire de Roubaix. Constitué essentiellement de courées, frappé d’insalubrité, ce quartier a été reconstruit d’une façon particulièrement originale et avec la participation des habitants. Grâce à son Premier Prix européen d’architecture, l’Alma-Gare apparaît aujourd’hui comme le quartier de prestige de la municipalité de Roubaix qui se sert de lui pour masquer la misère environnante.