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Qui lance un œuf…

un sympathisant anarchiste condamné pour « rébellion » et « incitation à l’émeute »
Le jeudi 3 avril 2003.

Toulon, samedi 22 mars, 3 000 à 4 000 personnes manifestent contre la guerre en Irak. Le cortège passe devant un MacDo. Des œufs frais frappent chirurgicalement les vitrines du fast food. Yann, un de nos sympathisants, partie prenante de la salve ovipare, se fait attraper par des membres de la BAC, notoirement connus à Toulon pour leurs relents quasi fascistes. Notre camarade est embarqué. Une partie des manifestants encercle la voiture où il se trouve. La tension monte. Au bout d’une demi-heure, la police cède et libère notre compagnon.

Deux jours plus tard, il passe en « comparution immédiate ». Une avocate de la LDH assure sa défense. Accusé de « rébellion et incitation à l’émeute », Yann reconnaît avoir donné des coups de pied alors qu’il se trouvait dans une situation inconfortable, mais il réfute l’accusation de coups volontaires sur des policiers et celle d’avoir incité les manifestants à le libérer. Il est certain que des personnes, outrées, ont fustigé les pratiques de la police républicaine, dignes de soudards, dont elles n’imaginaient pas l’existence dans « notre douce France ». Eh oui, les « bons citoyens » peuvent aussi finir embarqués, gardés à vue, et se retrouver face à un tribunal en moins de 48 heures. Il serait temps de s’en rendre compte et de saisir que les lois sécuritaires menacent la liberté de tous.

Les policiers se sont portés partie civile. Leur avocat dénonce le fait que « force n’est pas restée à la loi », ceux-ci ayant dû libérer un interpellé sous la pression d’une « bande de sauvages » (sic). Ils demandent un euro de dommages et intérêts. L’avocat général explique que « l’État a été mis en danger » dans une « démocratie qui ne peut pas exister sans ordre ». Il réclame un an d’emprisonnement dont quatre mois fermes. L’avocate de Yann demande la relaxe.

Mais le tribunal le reconnaît coupable et lui propose 240 heures de travaux d’intérêts généraux à effectuer dans les 18 mois, étant donné qu’il « a du temps libre, puisqu’il fait des longues randonnées le samedi » et qu’« une activité non rémunérée pendant ses loisirs [lui] évitera de déraper ». Le président précise que les TIG peuvent être refusé, car « les travaux forcés n’existent pas en France », mais au risque de s’exposer à une peine plus contraignante. Yann accepte donc, et se voit condamné à « un an d’emprisonnement sursis à 240 heures de travaux d’intérêt général à effectuer dans les 18 mois, un euro de dommages et intérêts pour la partie civile, et 300 euros pour les frais d’avocat de cette dernière ».

Si un œuf peut ainsi faire perdre leur sang froid aux flics et avoir de telles conséquences, il faudra s’attendre à des interpellations et comparutions immédiates devant un juge quasiment de manière continue. La « démocratie » a une sale gueule, et sa « justice » a mauvaise haleine.

Oliv, groupe Nada


Outre les 300 euros que Yann doit payer, les frais d’avocats s’élèvent à 638 euros. Toute solidarité sera la bienvenue (contact : groupe Nada, c/o ACL, BP 5137, 83093 Toulon cedex. Courriel : fatoulon@lautre.net. Chèque à l’ordre de ACL)