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Eugène Varlin, un ouvrier-relieur de l’AIT à la Commune de Paris

mai 2019.

« Tant qu’un homme pourra mourir de faim à la porte d’un palais où tout regorge, il n’y aura rien de stable dans les institutions humaines. » Eugène Varlin, ouvrier-relieur, est une figure phare du mouvement ouvrier du XIXe siècle en France. Issu d’une famille modeste, il suit des cours du soir pour mieux comprendre et agir sur un monde dont il mesure les injustices. Il rencontre ceux qui vont devenir les fondateurs de l’Association internationale des travailleurs (AIT), Tolain, Fribourg notamment. Ce trio qu’il constitue avec eux signera les premiers appels à l’union des travailleurs pour défendre leurs droits inscrivant la formule « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » dans l’histoire du monde ouvrier.

Le droit au travail des femmes

Michèle Audin, enseignante, passionnée par la Commune de Paris, auteure de plusieurs ouvrages sur ce thème rassemble dans cet ouvrage, Eugène Varlin ouvrier relieur 1839-1871, tous les écrits retrouvés à ce jour (articles, proclamations, lettres) d’Eugène Varlin. Elle allie donc biographie et recueil de textes. Le lecteur retrouvera la vie quotidienne des ouvriers boulangers, des mineurs, des ovalistes, la solidarité par les caisses de secours en cas de grève dure. Varlin, ouvrier lui-même, sait qu’une grève est difficile à mener et que les privations justifient le soutien concret des coopératives comme la Marmite. Un des premiers, il défend le droit au travail des femmes : « La femme doit travailler et doit être rétribuée pour son travail. […] ceux qui veulent lui refuser le droit au travail veulent la mettre pour toujours sous la dépendance de l’homme. »

La succession des textes constitue un journal des luttes sociales, de la mise en place de l’AIT en France, malgré les arrestations, les procès, les emprisonnements.

L’indispensable solidarité

Bien qu’emprisonné sous l’Empire, il étoffe sa réflexion intellectuelle et politique le conduisant vers le communisme non autoritaire, la méfiance à l’égard des élections, de la bourgeoisie dominatrice. « Pour que nous puissions envisager sans crainte l’avenir gros d’orages, il faut que tous les travailleurs se sentent solidaires. » C’est le sens permanent de son action militante. Au fil des pages, le lecteur est surpris par la modernité des propos et des réflexions.

Les textes abondent et c’est heureux que Michèle Audin redonne ainsi la parole à un responsable un peu trop oublié, contribuant à nourrir la réflexion sur l’actualité de la Commune de Paris dans les luttes sociales. Bien sûr, lors de ces 72 jours, Varlin est au premier plan, il écrit peu, il agit, il est sur les barricades et évidemment une des dernières, rue de la Fontaine au Roi. Arrêté, il est fusillé par les versaillais à Montmartre après avoir subi des actes barbares à son égard.

Eugène Varlin ouvrier relieur 1839-1871, Michèle Audin Éd. Libertalia, 2019 disponible à Publico


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