A Nantes, des personnes sans papiers occupent depuis le lundi 27 avril l'église Sainte-Thérèse afin dobtenir la régularisation de toutes et tous les sans-papiers. Ils sont environ 50 adultes et 40 enfants, pour la plupart originaires dAfrique de lOuest, principalement de Guinée. Ces personnes sont soutenues par un collectif dassociations et de syndicats (Gasprom, L.D.H., C.G.T., Pastorale des migrants, etc.). Cest par le biais des associations catholiques quils ont pu occuper cette église ; les catholiques préfèrent parler daccueil plutôt que doccupation, histoire de montrer quils maîtrisent la situation. Ce faisant, certains dentre eux ont tendance à être directifs et à passer outre les décisions collectives des sans-papiers. Ainsi la participation des sans-papiers à la manifestation du 1er Mai a failli être compromise parce que certains paroissiens les avaient persuadé de ne pas y participer. Pour rester diplomates, nous mettrons cela sur la méconnaissance des phénomènes de rapport de forces : ce nest a priori pas quand les sans-papiers sont mobilisés que la police va venir les arrêter, mais quand ils seront isolés les uns des autres et des associations qui les soutiennent.
Cette occupation a pour but dobtenir un large soutien des populations de lagglomération nantaise et de faire pression sur la préfecture de Loire-Atlantique. Environ 600 personnes ont déposé un dossier avant le 1er novembre 1997. Au 26 mars, selon la préfecture, 275 dossiers avaient été traités, dont 195 auraient obtenu une réponse positive, chiffre contesté par les associations. Toujours est-il quil reste une moitié de personnes qui nont pas obtenu de réponse. Depuis des mois, voire des années, ces personnes sont en proie à la mauvaise foi et aux tracasseries administratives de la préfecture, qui leur demande sans cesse de nouvelles pièces justificatives. Une fois les pièces rassemblées, la préfecture remet en cause parfois leur authenticité.
Cela est particulièrement vrai pour les demandeurs guinéens, qui forment aujourd'hui la grande majorité des occupants de l'église Sainte-Thérèse. Les Guinéennes et les Guinéens se sont retrouvés assez nombreux à Nantes ces dernières années, notre ville ayant acquis la réputation d'être une ville accueillante, tout du moins davoir un tissu associatif dynamique : car la qualité de laccueil à la préfecture est souvent dénoncée comme " détestable " (1), ainsi que le comportement de certains policiers, notamment de la D.I.C.I.L.E.C. (2). Les Guinéens sont venus en France pour fuir la misère et la répression qui existent dans leur État, un des plus pauvres du monde. La plupart de leurs demandes dasile politique étaient rejetées par lO.F.P.R.A. Cependant, pendant le traitement des dossiers de demande dasile, ces personnes ont vécu en France. Des Guinéennes y ont donné naissance à des enfants qui, pour certains, sont devenus français du fait du destin croisé de la France et de la Guinée. Explications : la Guinée est une ancienne colonie française. Les personnes nées en Guinée avant lindépendance de 1958 avaient la nationalité française, même si elles lont perdue au moment de lindépendance. Daprès la règle dite du " double sol " (Toute personne née en France dun parent lui-même né en France est française dès sa naissance), ces enfants naissent Français si un de leurs parents était lui-mê997, la nouvelle majorité de gauche na pas jugé utile dabroger ces dispositions de la loi Méhaignerie-Pasqua. me né avant 1958. Cela était vrai jusquau 1er janvier 1994, date à laquelle prenait effet la loi Méhaignerie-Pasqua de 1993 réformant le code de la nationalité et notamment la règle du " double sol " au nom dun cynique " toilettage " : depuis le 1er janvier 1994, le " double sol " ne sapplique plus aux enfants nés en France de parents nés avant lindépendance dans les anciennes colonies. Lors du vote de la loi Guigou en 1
Néanmoins, quelques personnes de nationalité guinéenne sont parents denfants français et, à ce titre, auraient dû obtenir une carte de résident en France. Une précédente circulaire, faite par Mitterrand, Balladur et Pasqua entre les deux tours des élections présidentielles de 1995, permettaient cette régularisation des parents étrangers denfants français. À Nantes, des dizaines de personnes devaient bénéficier de cette mesure. En fait, seule une petite partie dentre elles ont obtenu des papiers car ladministration a systématiquement remis en cause les états civils des Guinéens nés avant lindépendance, les actes de naissance versés aux dossiers étant selon ladministration des faux ou des " documents de complaisance " fabriqués avec lintention de mentir sur la date de naissance des intéressés et de bénéficier ainsi frauduleusement dune carte de résident.
Ce sont aujourd'hui une partie de ces personnes qui se retrouvent dans loccupation de Sainte-Thérèse. On comprend quelles en ont gros sur la patate, ballottées despoir, trahies par les politiciens et victimes de la " politique de guichet " des administrations. Il convient de dénoncer les impostures des socialistes, et particulièrement du député-maire Jean-Marc Ayrault. Dun côté, il finance de belles cérémonies pour commémorer les 400 ans de l'Édit de Nantes et les 150 ans de labolition de lesclavage ; de lautre, en tant que président du groupe socialiste à lAssemblée, il a empêché dans les rangs socialistes tout dépôt damendement et toute critique du projet Chevènement. La meilleure manière de le désavouer est de réussir la mobilisation en faveur des sans-papiers.
(1) Lire le rapport 96-97 de lObservatoire nantais des libertés. Il est disponible (30 F port compris) : O.N.L., 10, bis bd Stalingrad, 44 000 Nantes
(2) Direction centrale du contrôle de limmigration et de lutte contre lemploi des clandestins