A loccasion de la participation de Moussa Diop, délégué dActions Utiles Pour lEnfance et la Jeunesse de Tivaouane au 44e congrès de lI.C.E.M. une tournée de conférences fut organisée par Bonaventure pour présenter cette alternative sociale autogérée du Sénégal (1). Des groupes de la Fédération anarchiste, le mouvement libertaire italien, des syndicats alternatifs ou anarcho-syndicalistes, des associations sociales se sont mobilisées pour organiser des rencontres, des conférences.
Sur Oléron un " tie-bou-diène-conférence " a réuni 80 personnes, une séance de cinéma avec débat 70 spectateurs démontrant ainsi lintérêt que pouvait susciter cette expérience sociale.
À Lyon, Bordeaux, Paris, Angoulême, Nantes ou Poitiers lintérêt des militants syndicaux, sociaux ou libertaires débouchera vers une solidarité Nord-Sud financière, matérielle et politique.
Pour inscrire durablement les initiatives dA.U.P.E.J. : formation professionnelle, école maternelle, activités culturelles et sociales, lycée autogéré, caisse d'épargne des femmes etc. un local et deux postes danimateurs sont des préalables à la poursuite de cette aventure. Lobjectif financier de solidarité entre les précaires, les travailleurs du Nord et du Sud ont été atteints.
Cela démontre que des liens internationaux politiques et sociaux créent des espaces de liberté. La mondialisation du libéralisme économique forcené nest pas une fatalité pour les peuples du Nord ou du Sud. Bien que symbolique cette mobilisation crée une brèche dans linéluctabilité de la pauvreté. Donner les moyens financiers et politiques à la population dun quartier de créer son propre espace social, d'être à linitiative de caisse d'épargne et de crédit, de formation sociale pour dautres quartiers ou villages voisins concrétise un slogan que nous avons tous au fond du cur : la ville gérée par et pour ses habitants.
Trop souvent le mouvement libertaire international abandonne aux O.N.G. liées aux politiques gouvernementales et aux subventions caritatives ou institutionnelles laide logistique pour permettre aux populations des pays " pauvres " de gérer " correctement " leur pauvreté. Dès lors quun contact direct, des échanges politiques sinstallent entre des espaces alternatifs (tels A.U.P.E.J. et Bonaventure) une solidarité financière donne sens non plus à une gestion de la pauvreté mais à un mouvement dauto-organisation des populations concernées. Même symbolique ce mouvement empreint d'échanges, de construction de pratiques alternatives combat de fait lidéologie dominante de laide humanitaire.
Créer deux emplois solidaires à Tivaouane cest donner au salariat non plus un seul sens économique (petits boulots inintéressants et difficiles : petites bonnes, manuvres etc.) mais un sens social émancipateur pour les personnes et le quartier.
Bonaventure en interpellant à la fois le mouvement libertaire, des groupes de sans-papiers, des mouvements pédagogiques et le syndicalisme radical à créer des passerelles ponctuelles mais réelles pour un projet commun entre des acteurs institutionnels qui trop souvent signorent.
Le mouvement social occidental se fragmente à limage même de la société quil combat. La mise en place de ce réseau solidaire bien que ciblé symbolise l'énergie sociale émancipatrice dont un mouvement social radical est porteur au-delà des divergences, des corporatismes, des intérêts institutionnels.
Bonaventure et A.U.P.E.J. en ouvrant, depuis un an, un chantier international (élaboration dun regroupement dassociations d'éducation populaire autogérée) ont découvert que ces liens transversaux rompaient lisolement dans lequel vivotent les alternatives éducatives. Cette tournée est donc un préalable parmi dautres à la construction dun mouvement social solidaire, international et émancipateur : cest un pari que nous avons relevé : en serez-vous ?
(1) cf. Monde libertaire n°1130, 1131, 1132.