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Éducation

Coordination des personnels

Le jeudi 1er décembre 1988.

Octobre 1988, des enseignants lillois lancent un appel pour la création d’une coordination. Très vite, des divergences apparaissent quant à l’intitulé même de la structure à mettre en place. Les uns refusent de poser le problème de leur représentativité (d’où phénomène d’auto-proclamation et création de la Coordination des personnels de l’Éducation) ; les autres rejettent l’avant-gardisme et prônent une démarche autogestionnaire : organisation d’assemblées générales par établissement ou par ville, élection de délégués mandatés précisément et donc réellement représentatifs, etc., bref, construction d’une coordination à partir de la base !

Les mêmes clivages voient le jour en ce qui concerne la plate-forme. Les uns sont partisans des « 2 000 F pour tous » à l’exclusion de toute autre revendication ; les autres adoptent sur ce point une position pluraliste (révision des grilles de salaire, augmentation mensuelle de 1 500 à 2 000 F, titularisation des salariés à statut précaire, embauche de personnels, création d’un corps unique, limitation des effectifs par classe, lutte contre l’échec scolaire, etc.). Pour ces derniers, en effet, il ne s’agit pas de plaquer des revendications de façon artificielle et de les imposer, mais de proposer et d’apparaître comme un véritable lieu de débat et d’information.

Enfin, on retrouve les mêmes sensibilités aussi bien dans le rapport aux syndicats que dans les formes d’action. Les uns crachent sans discernement sur l’organisation syndicale et lancent l’idée d’une grève générale de l’Éducation ; les autres appellent à l’unité syndiqués/non-syndiqués et se font un peu moins d’illusions quant aux formes d’action envisageables dans l’immédiat.

Divergences et clivages

Autant de divergences, de clivages et de sensibilités qui ne sont pas sans laisser planer un certain malaise ; malaise d’autant plus insupportable que le dirigisme et/ou la manipulation deviennent rapidement monnaie courante en assemblée générale : les débats s’éternisent, l’ordre du jour n’est pas respecté, et c’est devant une salle au trois quarts vide qu’on nous invite à élire un bureau capable de « diriger efficacement le mouvement »… invitation que nous refusons bien sûr catégoriquement. En effet, peut-on élire un bureau alors que le quorum n’est plus atteint, que le rôle du bureau lui-même n’a pas été défini et que la coordination ne s’est pas encore fait suffisamment connaître ?

Arrive l’assemblée générale suivante… Afin de lever toute ambiguïté, demande est faite (par les militants de la Fédération anarchiste) que tous les candidats au secrétariat précisent leur identité politique. Résultat : six membres de Lutte ouvrière, quatre de la FA, un du PS, un communiste rénovateur et quatre inorganisés. Devant l’absence de mandatement précis, les membres de la FA s’engagent à faire respecter la démocratie directe en s’opposant à toute prise de pouvoir au sein du secrétariat. Quant aux revendications, nous appelons à la mise en place d’une commission de travail ouverte à tous et chargée de faire la synthèse de toutes les opinions exprimées en assemblée générale ; proposition refusée bien entendu par Lutte ouvrière mais adoptée néanmoins à la majorité !

« Les anars veulent noyauter la coordination » !

Ceci dit, les problèmes ne font que commencer. Les militants de Lutte ouvrière ayant perdu tout espoir de contrôler la coordination, les voilà qui se mettent à la saboter ! Pour cela, ils troquent leur optimisme béat du départ avec un pessimisme on ne peut plus démobilisateur : « La coordination n’est pas représentative, nous ne sommes pas un vrai mouvement  » (des arguments qu’ils récusaient il y a encore quelques semaines). Et cela au moment où des liens sont en train de se tisser progressivement aux quatre coins des départements du Nord et du Pas-de-Calais, au moment où des réunions d’établissement mobilisent, ici et là, plus de 60 % du personnel ! D’autre part, fini le temps des sourires mielleux : les libertaires ne sont pas les doux rêveurs que Lutte ouvrière imaginait tout juste bons à servir de caution démocratique ou d’aide technique. Voilà maintenant que « les anars veulent noyauter la coordination… et la transformer en syndicat » (sic) ! Bruits de chiotte, calomnies, diffamations…

Samedi 19 novembre, les camarades de Lutte ouvrière tentent une fois pour toute de dissoudre la coordination. Toutefois, s’ils parviennent à écœurer la moitié de la salle, leur objectif n’est pas atteint : la coordination continue ! Un nouveau secrétariat est élu sans eux ; une date d’assemblée générale est retenue (samedi 17 décembre à 15 h à la Maison de la nature et de l’environnement). Enfin, un bulletin d’information ouvert à tous (instituteurs, professeurs, personnels de service…) est en cours de rédaction. Toute contribution y est la bienvenue…

Éric Dussart (Gr. Benoît-Broutchoux de Lille)

Pour tout contact : Coordination des personnels de l’Éducation, c/o MNE, 23, rue Gosselet, 59000 Lille ; tél. : 20.04.66.06 (Lille), 20.53.92.26 (Armentières), 20.40.11.55 (Seclin), 27.67.90.95 (Maubeuge) et 21.31.31.01 (Boulogne).


Mandatement présenté pour le secrétariat de la coordination

Ce texte a été présenté à l’assemblée générale par des militants du groupe Benoît-Broutchoux et soutenu par la quasi-totalité des personnes inorganisées politiquement… et refusé par Lutte ouvrière sous prétexte de « bureaucratie » et de « formalisme ». Il a été adopté par le secrétariat et sera représenté en assemblée générale.

De façon à assurer la transparence et l’autogestion de la coordination, le secrétariat a pour fonction :

  • 1. De coordonner et diffuser les informations relatives à l’argumentation des revendications de la coordination, et les actions des membres coordonnés.
  • 2. D’assurer la trésorerie de la coordination.
  • 3. D’organiser la diffusion des contacts entre membres de la coordination (avec accord des contacts présentés).
  • 4. D’organiser, sur les revendications adoptées par la coordination, leur diffusion médiatique (télévisions, radios, journaux) et leur diffusion vers les élèves, les parents, les syndicats et associations diverses.
  • 5. De proposer en cas d’opportunité aux membres de la coordination des actions ponctuelles, appelant à une mobilisation rapide, entre les assemblées générales et n’engageant que modérément les fonds de la coordination.
  • 6. De proposer, en tenant compte des prescriptions éventuelles de l’assemblée générale, un ordre du jour si possible minuté pour la prochaine assemblée générale.
  • 7. La définition des axes d’actions sur le long terme, tout comme la définition des revendications de la coordination et l’argumentation précise de celles-ci, sont du ressort de la commission de synthèse qui les pro-pose au vote de l’assemblée générale.
  • 8. Le compte-rendu des décisions de trésorerie du secrétariat, de ses décisions d’actions ou de ses décisions administratives est publié dans le bulletin de liaison de la coordination, ou isolément, de façon à ce que chaque assemblée générale puisse juger du travail du secrétariat. Sur des décisions centrales, les clivages éventuels au sein du secrétariat sont aussi rendus publics.
  • 9. L’assemblée générale demeure souveraine. Elle définit elle-même sa périodicité. Elle mandate, si possible strictement, le secrétariat qui peut tenter d’impulser des actions ponctuelles. En cas d’urgence, le secrétariat peut appeler à sa convocation. Le secrétariat est révocable à chaque assemblée générale. Tous les 6 mois, il remet son mandat en jeu (reconduction possible).
  • 10. La liste des fonctions du secrétariat peut être modifiée après vote en assemblée générale.