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articles du ML1207

du 25 au 31 mai 2000
Le jeudi 25 mai 2000.

https://web.archive.org/web/20031025124508/http://www.federation-anarchiste.org/ml/numeros/1207/index.html

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Projet de loi sur le quinquennat

Les habits neufs de la démagogie électorale

Pour certain-e-s camarades, il n’y aurait aucun intérêt à s’interroger sur les raisons qui poussent le pouvoir à modifier la durée du mandat présidentiel puisque de toute façon nous serons toujours gouvernés. Et tout bon anarchiste qui se respecte est contre le principe même de gouvernement. Alors à quoi bon se casser la tête avec ses trucs là. Ce ne sont qu’affaires de politicien-e-s… Profitons de la vie et parlons d’autres choses. Nous avons pourtant choisi d’être triste et de parler du quinquennat.

Nous faisons partie de ces gens bien ordinaires, mais qui sont quelque peu conscients que ce qui se trame au-dessus d’eux pourrait bien leur retomber sur la gueule un de ces jours. Mieux vaut savoir pourquoi on veut mettre un peu d’OGM dans la soupe électorale. Histoire de ne pas tricoter idiot sur notre nuage. Il n’y a aucun hasard dans cette affaire, tout comme pour le colza malencontreusement semé un peu partout en Europe.

À bas les cadences électorales infernales

Ce qui nous interpelle dans cette affaire est le souci largement partagé par tous ces vaillants républicains d’en référer à la démocratisation de la vie politique. Tous font état de la nécessité de donner plus et plus souvent la parole au peuple souverain, même ceux qui sont pour le maintien à sept ans. Ceux-là parlent d’étendre l’usage du référendum.

Le gros souci de cette élite étatique est que plus elle rénove les institutions politiques, administratives, économiques, religieuses, sociales et culturelles, plus il y a un phénomène d’éloignement et de prise de distance des électeur-e-s citoyen-ne-s. Ce qui conduit non seulement à une abstention exponentielle d’élection en élection mais aussi et surtout à une autonomisation pratique et très concrète du vécu de tout un chacun qui se fabrique sa petite vie à lui et n’a strictement plus rien à foutre de tout le reste.

Cette réalité là est inquiétante parce que c’est sur ce terreau que se développe l’irrationalité propice aux comportements individualistes (qui n’a rien à voir avec l’affirmation de l’individualité), à la violence qui peut aussi être collective, au clanisme qui fait les beaux jours des sectes et autres regroupements identitaires.

Le problème est que les dirigeant-e-s pratiquent la révolution permanente, tout azimut, dans une sorte de fuite en avant légitimée par la mondialisation, sans que cela soit voulu et porté réellement par les populations. Incapables de penser autrement que dans et par les structures de l’État, les politiciens ne peuvent que proposer une accélération du processus électoral, une rotation plus rapide du personnel d’encadrement et la multiplication du nombre d’élu-e-s par la limitation du nombre de mandats. Cette surenchère dans le démocratisme n’est ni plus ni moins que le resserrement d’un maillage visant à être au plus près des électeurs citoyens comme si ce procédé pouvait être à même de faire remonter plus vite et mieux les attentes du bon peuple.

Une illusion toute électoraliste

Ce qui compte pour l’individu moyen ce sont les réalités économiques et sociales. La mondialisation coure plus vite que le carcan étatique. La conséquence en est que nos modes de vie sont transformés : précarisation des emplois assimilables à un vrai terrorisme économique, salaires à la baisse, stress et rythmes de vie infernaux qui font que personne ne perçoit les 35 heures comme une dilatation de son temps, bien au contraire. La massification des études universitaires ne se révèle pas être une garantie d’ascension sociale. Le système éducatif ne donne plus de sens ni de projet dans lequel parents, jeunes et enseignants puissent se reconnaître. Il n’y a que le fric qui compte et comme chacun sait, il n’a pas d’odeur. Dans ces conditions comment avoir goût à la vie fade qu’on nous propose.

Si nous ne nous mettons pas en capacité de proposer d’autres perspectives politiques que la voie électorale, même avec des référendums tous les trois mois à la proportionnelle, la démobilisation sociale s’accentuera et notre société aura tendance à aspirer, par peur du vide et de l’inhumanité galopante, à une caricature d’ordre et de sens sociétaire.

Aucune réforme électorale ne peut répondre à ce mal vivre

Si Le Pen ne fait plus l’affaire, le moule est encore chaud pour qu’un clone quelconque fasse l’affaire.
Il est remarquable que tous insistent sur le fait que nous serions entré dans le post-capitalisme avec la nouvelle économie (si chère à Lénine). Cela permet de décréter la fin de la lutte de classes et de tout projet d’émancipation sociale. Si cela devait réussir, nous ferions un retour sur le futur dans une sorte de néo-féodalisme. Les révoltes sociales ne seraient plus que des jacqueries et mâtées comme telles. Nous aurions alors tout loisir, dans un quelconque monastère reconverti en squat autogéré ou coopérative solidaire, de philosopher sur l’utopie d’un monde sans frontières et sans pouvoir.

Après tout, dans les profondeurs du Moyen Âge, quelques moines paillards l’ont bien fait. Mais est-ce vraiment ce que nous voulons ?

Bernard. — groupe Déjacque (Lyon)


La démocratie participative ou l’art d’absorber la contestation sociale

« Bougez-vous, commencez à changer l’environnement, ne restez pas les bras ballants au bas des immeubles, prenez-vous en charge, ayez des projets, […], devenez acteurs, devenez citoyens, et on vous aidera. »
Martine Aubry, 21 novembre 1995

Les anarchistes ne peuvent qu’être préoccupés par les enjeux qui émergent autour des élections locales et qui se dérouleront prochainement en France et en Belgique. Et ce d’autant que depuis une dizaine d’années, se développe, un peu partout dans le monde, des pratiques quasi autogestionnaires dans la conduite des affaires de la cité. Aussi, il paraît tentant d’apporter une contribution concrète au développement de telles pratiques. Ainsi, Le Monde diplomatique (voir en particulier le supplément du mois de mai 2000) ou des personnes se réclamant notamment des théories de Murray Bookchin, proposent d’œuvrer à l’auto-organisation des habitants. Le municipalisme libertaire que ces derniers prônent, vise à favoriser l’émergence de soi-disant contre-pouvoirs locaux afin de renverser par le bas les structures hiérarchiques et pyramidales. Dans cette perspective, les anarchistes se devraient de participer aux élections locales pour contribuer à développer une démocratie participative, proche de la démocratie directe qu’ils désirent.

Pourtant, adopter une telle analyse, c’est faire preuve d’aveuglement ou de naïveté. Cela revient à sous estimer gravement la capacité de la social-démocratie à intégrer les critiques que lui a assenées le mouvement social et qu’elle a parfaitement repris à son compte pour la pérennisation de l’ordre social existant. Il devient alors nécessaire de mettre à nu le subterfuge idéologique de la démocratie participative si l’on veut éviter de se fourvoyer dans une impasse.

Neutraliser la lutte de classe en l’urbanisant

Les luttes se déplaceraient donc de l’entreprise à la ville. La succession des plans de relance de la politique de la ville n’ont pour fonction que de nous faire croire qu’une grande partie des problèmes relèveraient de l’urbain. Dans cette perspective, nos aspirations doivent être investies dans la transformation du cadre de vie pour en faire un espace de convivialité et de qualité. L’accent est alors mis sur la notion de lien social qu’il s’agit de restaurer. La représentation du monde en terme de lutte de classe est ainsi évacuée : belle affaire pour le patronat. On comprend mieux pourquoi la ville n’en finit pas d’être couverte de vertus par les adeptes de la démocratie participative : elle serait porteuse des espérances de citoyenneté tout en sachant redonner ses lettres de noblesse à l’action politique.

Circonscrire la crise sociale à l’échelon local

La préoccupation grandissante du local dans les discours de la droite comme de la gauche n’est pas anodine non plus. Les critiques portées contre l’État centralisateur, les grands appareils bureaucratiques, qu’ils soient publics ou privés, jugés à juste titre d’ailleurs, inhumains et impersonnels ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. L’heure est à la revalorisation du local : small is beautiful.

Et ce serait se leurrer que de voir dans cette valorisation du local un progrès ou une avancée augurant une réelle démocratisation de la vie politique et une authentique décentralisation. Le traitement des conséquences sociales du capitalisme s’effectue maintenant à la base : l’État s’en remet de plus en plus aux collectivités locales qui à leur tour, font appel aux militants associatifs. L’autogestion de la misère permet à l’État d’être gagnant sur tous les plans : si échec il y a, ce sont les associations qui l’endossent et idéologiquement, le transfert de certaines compétences vers le bas prend une allure de démocratie directe, là où nous voyons en fait que renforcement du contrôle social par la population elle-même. Compléter le mouvement d’en haut par le mouvement d’en bas, tel semble être aussi effectivement le sens des contrats locaux de sécurité mis sur pied par Chevènement. C’est peu dire si le développement de pouvoirs locaux ne déstabilise pas l’État. Celui-ci ayant fixé les cadres de référence et d’actions dans lesquels les individus pouvaient prendre part aux affaires de la cité, il reste maintenant à convaincre l’ensemble de la population d’y participer. Il en va de la légitimité des élus et de la classe dominante en général.

Associer le citoyen aux décisions pour mieux étouffer la révolte

Pour associer la population à la gestion des affaires de la cité, la social-démocratie témoigne d’une créativité sans commune mesure. Innovations et expérimentations se succèdent au pas de course. Ainsi à Saint-Denis, les décideurs communaux, ayant compris qu’il ne peut y avoir d’actions publiques efficaces sans mobilisation des citoyens, mettent en place des démarches participatives de quartier, des commissions extramunicipales, des comités consultatifs. Il est vrai qu’avec 30 % de sa population vivant dans la précarité et un doublement en six ans des aides sociales légales, ça risque de péter à tout moment dans cette commune populaire.

La municipalité pense à associer le citoyen le plus en amont possible aux mécanismes décisionnels. La démocratie participative suppose d’impliquer les habitants dans l’élaboration de l’ordre du jour des réunions (il en est question aujourd’hui à Saint-Denis) et, si cela ne suffit pas, la possibilité pour les associations de quartiers d’accéder à une contre-expertise autonome, est envisagée.
Pour maintenir la cohésion sociale mise à mal par la précarité et le chômage, chefs de projets, agents de développement, chargés de missions, médiateurs d’horizontalité, militants de terrain, « citoyens responsables du bien commun » et autres entremetteurs s’activent ainsi sur le terrain pour sommer la population de participer à la démocratie. Telle est aussi la démarche du groupe de rap IAM à Marseille ou de Zebda à Toulouse, qui cherchent à convaincre les jeunes des cités de s’inscrire sur les listes électorales. Bel exemple de citoyenneté active que les élus aimeraient voir plus souvent.

Les chantres de la démocratie participative ont en effet bien conscience que la dépolitisation de la vie publique ne sera enrayée que si les processus d’actions collectives s’accompagnent de processus délibératifs et de gestion des controverses : il faut aller au-delà des simples enregistrements de la plainte de l’usager d’un service ou des opérations de type « Bonjour voisin » qui se déroule aussi à Saint-Denis. D’où l’engouement actuel pour la question du conflit. Le conflit est en effet perçu comme quelque chose d’innovateur car il fait bouger les choses nous disent par exemple les sociologues du changement social. La fréquence des « situations de crise » (doux euphémisme) place les élus locaux dans l’urgente obligation de mobiliser tous les acteurs concernés. Cette pression stimule, selon eux, les capacités d’innovations sociales des collectivités locales car elle permet par exemple l’élaboration de « contre-projets constructifs » à défaut bien entendu de proposer un autre projet global de société.

L’État : c’est toi !

On l’aura compris, la démocratie participative nous intime de prendre nos affaires en main c’est-à-dire en fin de compte celles de l’État. Au nom du pragmatisme et du travail de terrain, dans la cité de demain, il nous faudrait abandonner toute idée de transformation radicale de la société pour s’engager dans un projet (développer un réseau de vidéosurveillance en est un).
D’où un changement également dans les valeurs qui fondent les valeurs de la réussite sociale. Celle-ci met en avant aujourd’hui la capacité d’engager les autres. Ces remarquables qualités ne conféreraient plus un statut de chef mais permettraient de devenir un intégrateur, un facilitateur, un donneur de souffle, un fédérateur d’énergie, et autre impulseur de vie, de sens et d’autonomie.

Dans le cas d’une agglomération, ce rôle peut être dévolu au maire qui s’attachera à impliquer dans la gestion de la ville tous les acteurs sociaux, du simple habitant à la multinationale. Importée du monde anglo-saxon, cette vision managériale de la société, appelée gouvernance, serait pour ses partisans un vivier plus concret pour la démocratie alors qu’elle n’est que la figure de l’État-monde qui trouve dans l’action collective locale de nouvelles voies pour diffuser et imposer le capitalisme mondial. Et ce n’est pas par hasard que la gouvernance urbaine se met d’abord en place là ou il y a risque d’explosion sociale comme dans les ports britanniques ou les villes brésiliennes.

Pas d’autogestion sans égalité économique et sociale !

Par conséquent, nous ne saurons ainsi nous satisfaire du désir des classes dirigeantes de nous octroyer un nouveau mode de fonctionnement de la société se basant soi-disant sur l’autogestion, l’autonomie et la responsabilité individuelle pour continuer dans le même temps à semer la misère à tout vent. La participation de tous les habitants aux décisions de la vie communale, lorsqu’elle est pilotée par l’État, n’est qu’une instrumentalisation visant à pérenniser l’ordre établi. À force de vouloir agir, ici et maintenant, on finit par prendre le moyen pour une fin. Pour nous, les revendications immédiates doivent viser les points sensibles du système capitaliste. Nous exigeons, pour tous, la gratuité des transports et de l’ensemble des services communaux, la réquisition de tous les logements ou bureaux vides, la suppression de tous les dispositifs sécuritaires, et l’augmentation des salaires des agents communaux ainsi que la transformations des emplois précaires en emplois stables. Nous ne perdons pas de vue que l’autogestion se doit d’être couplée à l’égalité économique et sociale. Dans cette perspective, nous pouvons aussi agir dans des comités de quartier (à nous de voir selon la situation locale, le moment et les forces en présence) pour y faire passer nos idées et radicaliser les contestations. Cela ne nous empêche pas d’y dénoncer les dérives (institutionnalisation, nouvel espace de relais de la politique du maire, émergence et notabilisation de leaders, tournant sécuritaire et autres dévoiements) qui s’y produisent fréquemment afin de ne pas cautionner n’importe quoi.

Guillaume. — groupe Durruti (Lyon)


Michelin : l’indignation passe, les licenciements restent

Septembre 1999 : « le scandale Michelin » faisait la une de la plupart des médias. Tout en annonçant une augmentation des bénéfices trimestriels de 20 %, le géant du pneu rendait en effet public un plan de 7 500 suppressions d’emplois en Europe, étalé sur 3 ans. Clermont-Ferrand fut alors le théâtre, non d’une grève des ouvriers de Michelin, mais d’une manifestation de 3 000 personnes. Certes, des hôtes de marque battaient le pavé avec les « bibs’ » : Godard (maire PS de Clermont), O. Saugues (députée et madame Michelin du PS), Cambadélis (nº 2 du PS), Arlette Laguiller et Alain Krivine…

Huit mois plus tard, les licenciements à venir se matérialisent : 1 800 pour l’ensemble des sites français, dont 1 020 à Clermont. Jeudi 11 mai, une journée de grève est décidée spontanément par les ouvriers, suivie d’une manifestation le jour même et d’un rassemblement le lendemain, tous deux de deux mille personnes. Pour une boîte qui compte 4 % de syndiqués, où silence et résignation sont la règle, où le personnel est disséminé en ateliers, divisé en équipes, partagé entre travailleurs de bureau (8 000 sur 15 000) et ouvriers, précaires et titulaires d’un CDI, les salariés mobilisés réalisaient un coup d’éclat. Le silence assourdissant des médias aura étouffé la lutte dans l’œuf, réduisant les deux manifs à des « non-événements ». Quant aux politiques qui, en septembre, criaient au scandale et s’indignaient courageusement de la non régulation du marché, de l’horreur de la concurrence et des méfaits des fonds de pension, ils ont manifestement d’autres chats (électoraux) à fouetter. En fait, si à l’automne dernier, les licenciements Michelin étaient « affaire nationale », c’est qu’ils cristallisaient les enjeux de la rentrée politique de la gauche plurielle.

Le PC, en perte de vitesse après les européennes, souhaitait redorer son blason de parti ouvrier en donnant l’illusion de contribuer à infléchir la politique du gouvernement à gauche. Le dossier politique en jeu était alors la discussion des 35 heures. La représentation publique de dissensions au sein de la gauche plurielle avait pour but de nous faire croire que la loi Aubry constituerait une avancée sociale, permettant bien la création d’emplois et non l’introduction systématique de la flexibilité. Désormais, la donne a changé. Lors des grèves de l’éducation, le gouvernement s’est vu contesté dans son rôle de patron, notamment à propos de la précarité. Avec le remaniement ministériel, Jospin tente à la fois de continuer le démantèlement progressif des services publics tout en réorganisant le camp pluriel en vue des batailles électorales à venir. Ce n’est donc pas le moment pour les ténors de la gauche de faire les grandes gueules sur la nécessité d’instaurer une pénalité sur les entreprises bénéficiaires qui licencient (Pays-Bas en septembre), de s’indigner sur le fait que l’argent public serve à financer les plans de licenciements (Aubry ainsi que Jospin lors de son discours aux parlementaires socialistes le 27 septembre dernier) et de prétendre avoir la volonté de mettre le holà à la précarité.

Marché de dupes : licenciements en échange des 35 heures

La direction Michelin feint de se soucier des ouvriers qu’elle va licencier, se souciant surtout de les bâilloner. Donc, pas de licenciements secs. En effet, outre les départs anticipés à la retraite, les reclassements externes (primes pour aller se faire exploiter ailleurs), la suspension des contrats intérimaires et le non-renouvellement des CDD ne sont pas estampillés « licenciements ». Michelin, une fois de plus (1), mène le jeu, les ouvriers les plus âgés ayant ainsi l’opportunité de quitter l’usine avant l’heure (2) et les précaires pouvant difficilement lutter. Du fait des négociations sur les 35 heures, le rapport de force se complique. Lors des manifestations, les revendications faisaient état du refus des dispositions prévues par la direction (passage de 17 samedis travaillés à 25). La carotte pour faire passer cet accord réside dans les départs anticipés à la retraite. Rebaptisés par un décret Aubry « Contrat de cessation d’activité anticipée », ils ne peuvent être négociés que si un accord sur les 35 heures a été conclu. Les licenciements ont donc été annoncés au moment où les 35 heures se négociaient. Quant au gouvernement, loin de mettre fin au financement des licenciements par l’argent des contribuables (les CCAA sont financés par la collectivité à hauteur de 40 %), il a ainsi fourni un moyen de pression supplémentaire sur les salariés lors des négociations sur les 35 heures.

Les ouvriers Michelin vont donc perdre sur les deux tableaux, les conditions de travail comme les licenciements . Les syndicats auront joué leur rôle dans la farce des 35 heures en acceptant de négocier boîte par boîte plutôt que d’appeler à la grève générale. Si cette chère Odile Saugues appelait par voix de presse les ouvriers de Michelin à garder confiance en leurs syndicats, nous espérons pour notre part que dans les mois à venir, les comités de grève se généraliseront dans toutes les luttes et qu’au fil des discussions communes, la réduction du temps de travail comme une conquête à faire s’imposera comme une évidence.

groupe Spartacus (Clermont-Ferrand)

(1) En 15 ans, à Clermont, le nombre de salariés est passé de 30 000 à 15 000, ce qui représente 8 plans de licenciements, financés à hauteur de cinq milliards de francs par la collectivité (chiffre avancé par Aubry en septembre).
(2) L’organisation du travail en 3x8 sur 15 jours (samedi matin compris) entraîne une diminution de l’espérance de vie de dix ans (ML nº 1174).


Arrêtés anti-mendicité à Montpellier

Cachez ce pauvre que je ne saurais voir

En 1996, G. Frêche avait sorti son premier arrêté anti-mendicité s’alignant ainsi sur ses confrères politique de Sète, Millau, Perpignan… Bien que l’année d’avant, celui-ci se soit prononcé contre, cette année-là, les législatives arrivaient et les commerçant de Montpellier représentaient ­ un lectorat non négligeable. L’arrêté avait finalement été cassé en justice suite à une mobilisation conséquente durant tout l’été. Depuis, malgré notre tentative de mobiliser la population contre le projet d’installation de la vidéo-surveillance dans les rues de Montpellier durant l’année 1999, Frêche et la municipalité nous ont imposé la mise en place du contrat local de sécurité et tout ce qui en découle : vidéo-surveillance effectifs policiers supplémentaires, etc.

Printemps 2000, la répression a toujours le vent en poupe. Revoilà de nouveaux arrêtés anti-mendicité annoncés par Frêche en janvier 2000 sans débat au conseil municipal. La lutte contre l’insécurité a bon dos chez nos élus de gauche (comme de droite) pour mettre en place un contrôle de plus en plus accru sur la population, désigner une partie d’entre nous comme « la classe dangereuse » tout en continuant à ne pas toucher aux fondements du système capitaliste : d’un côté la classe dirigeante, la concentration des richesses et du pouvoir de décision, de l’autre les sans-travail, sans-logis, sans-papiers, travailleurs précaires, etc. L’écart se creuse mais ne fait pas fléchir le pouvoir qui gère la misère en bon économe. Partout en Europe, les villes sont de véritables lieux de spéculation pour les grandes entreprises et les gros propriétaires.

À Montpellier, en l’espace de quelques années, nous avons eu droit aux projets les plus faramineux comme le port Ariane, le tramway et l’Odysseum alors qu’à côté de ça, des milliers de logements sont vides et des centaines de gens n’ont pas de logement, le taux de chômage est l’un des plus forts de France, les enseignants ont manifesté dernièrement pour la création de postes n’ont obtenu que les assauts des CRS, les centres d’accueil d’urgence et les CHRS sont surchargés, etc.

À Rome, les SDF ont été chassés du centre-ville sous prétexte d’année sainte et de touristes nombreux. Ici, les arrêtés peuvent interdire de manifester.

Pour nous, il est important de ne pas seulement dénoncer ces arrêtés en appelant à une gestion plus humaine de la misère mais de dénoncer le « pourquoi des gens en arrivent à des situations de précarité qui les jettent dans la rue ? »

S’opposer aux arrêtés nécessite des revendications plus larges telles qu’un réel partage solidaire et égalitaire de la gestion et de la production sociétaire, le droit à la satisfaction des besoins physiologiques, sociaux et culturels pour tous. Plutôt que de décrier des dysfonctionnements, d’en appeler aux élus, nous pouvons développer des luttes d’émancipation économique et sociale, occuper la rue car la rue appartient à tous, fédérer nos luttes qu’on soit salarié, chômeur, enseignant ou immigré.

groupe « Un autre futur » (Montpellier)


Fait d’hiver

Une disparition mystérieuse

En cette période printanière, Jean-Marc Raynaud n’écrira plus ses faits d’hiver… seulement jusqu’en septembre. Il va nous revenir tout neuf. Un peu de plomberie, vidange, graissage, révision des 100 000 et va y Léon !

On lui fait confiance pour nous emmerder encore longtemps. Il a juste un peu trop broyé de noir, trop bu de rouge et pas assez dormi.

Jean-Marc, fais provision de sommeil, de hargne, de férocité et d’humour. Reviens-nous armé pour de nouvelles bagarres, la plume au vitriol, le verbe cinglant, comme tu sais le faire. On a encore et toujours besoin de toi. Toi le phare de Chassiron, le naufrageur du grand capital, le capitaine au long cours de nos utopies.

À ton contact, j’ai retrouvé le goût du combat et du rêve. Merci aussi pour tout cela. Ce soir, un grand coup de rouge à ta santé, je boirai ta part.

Benoist Rey


Allègre s’en est allé… Sa politique est restée !

Pendant plusieurs semaines, personnels de l’Éducation nationale, parents et élèves se sont mobilisés pour le retrait des chartes, réformes et décrets d’Allègre, contre les retraits de postes et d’heures d’enseignement ainsi que pour des moyens suffisants pour un vrai service public d’éducation. Cette mobilisation a contraint Jospin à lâcher son ami de trente ans, à muter Ségolène Royal à la famille, et à les remplacer par Lang et Mélenchon (à l’enseignement professionnel). On peut l’analyser comme un recul. Plus sûrement, on peut y voir surtout une question de forme, plutôt que de fond. La méthode Allègre ne passant pas, et ce dernier focalisant contre lui tous les rejets, il fallait essayer autre chose, mais pour poursuivre la même politique libérale. Car derrière leurs beaux discours, ces nouveaux (si on peut le dire en ce qui concerne Jack) ministres affirment leur volonté de continuer le travail de « rénovation » entrepris par Allègre. Pour faire passer la pilule, ils brandissent un milliard en saupoudrant quelques moyens de ci, de là et en nous refaisant le coup du collectif budgétaire.

La politique libérale continue

Dans le premier degré, la charte du XXIe siècle, massivement rejetée par les enseignant-e-s, est toujours en vigueur. Là encore, par le biais des CEL (Comité d’éducation local), l’école sera mise sous la coupe des élus. L’enseignant est transformé en petit chef d’équipe qui orchestrera le travail des aides-éducateurs et autres intervenants plus ou moins sous-payés, les directeurs devenant directeurs des ressources humaines… Ce n’est pas un hasard si dans les administrations rectorales on trouve désormais des directions des ressources humaines : il s’agit vraiment de singer le monde de l’entreprise jusqu’au bout (bientôt des stock-options en gommes et crayons ?). À la vieille revendication « plus de maîtres que de classes », est substituée « plus d’adultes que de classes ». Et qu’importe leur qualification, l’important est qu’ils soient précaires et non-titulaires. L’inégalité des moyens est renforcée, selon la richesse des communes, l’État se désengageant de plus en plus du financement. Avec la décentralisation et les nouveaux textes, tout est en place pour basculer vers un système anglo-saxon, où les enseignants sont recrutés par les chefs d’établissement, eux-mêmes sous la houlette des municipalités. Et quand on connaît les résultats catastrophiques du genre, on ne peut qu’être inquiet…

La « charte de l’enseignement professionnel intégré » est maintenue et comme nous l’avons déjà dénoncé, il s‘agit de soumettre la formation des élèves aux besoins des entreprises et de mettre en concurrence les lycées professionnels. Le nouveau texte du décret sur le statut des profs diminue certes leur service à 18 heures, mais trois heures supplémentaires peuvent leur être imposées à la prochaine rentrée, et aucune création de postes n’est envisagée pour compenser la diminution horaire. Quant à la flexibilité, elle n’est abandonnée d’un côté que pour mieux être réintroduite par un autre, notamment par le maintien de l’annualisation. Moralité, on accroît la charge de travail des profs sans créer d’emplois et on vide les contenus des enseignements pour les élèves.

Dans les lycées d’enseignement général, on lâche à la marge avec le maintien du latin ou du grec comme option, mais l’essentiel des projets Allègre reste avec la diminution des programmes, les travaux pratiques encadrés pris sur les heures des matières principales, alors que parallèlement on réduit les dédoublements de classe. Tout cela procède de la même logique, faire du neuf avec du vieux et surtout, encore et toujours, au mieux à moyens constants pour ne pas en donner de supplémentaires.

Des moyens insuffisants

Partout dans les lycées, les collèges, des heures, des postes sont supprimés, dans le premier degré des classes sont fermées. Les ministres ont lâché un peu de lest dans certains départements, notamment le Gard et l’Hérault, mais le compte n’y est toujours pas, vu les retards accumulés. Pire, il ne s’agit souvent que du provisoire, sous le terme fort poétique d’autorisations de paiement, pour un an. Ainsi, le fameux collectif budgétaire en prévoit 200. Il prévoit aussi 200 recrutements supplémentaires au concours des professeurs des écoles et 638 sur des listes complémentaires, ce qui est loin de correspondre au nombre de départs en retraite et de postes actuellement vacants… Quand on connaît l’ampleur des besoins revendiqués dans chaque département, et sachant que 30 postes sont pour le Val de Marne et 64 pour l’Académie de Montpellier, faites le compte ! En ce qui concerne la carte scolaire de la Seine-Maritime, on est passé de 180 à 270 fermetures de classes prévues à 73 actuellement. De 65 postes à rendre, il en reste encore 40 ! Sur les postes de remplaçants, 57 retirés en deux ans, plus 11 cette année, soit moins 67 ! Néanmoins, s’il y a eu recul de l’administration, c’est grâce à la force du mouvement social dans le département, et au fait qu’il est ancré (on l’a vu avec la participation massive des parents d’élèves) sur des revendications justes et fondées.

Continuer et élargir la lutte

Si la mobilisation a été massive, il faut reconnaître qu’elle s’est maintenant essoufflée, le départ d’Allègre n’y étant pas pour rien. Ainsi la dernière manifestation à Rouen, le samedi 13 mai, n’a réuni qu’une centaine de personnes ! Disons aussi que la FSU ne s‘est pas donné les moyens pour réussir celle-ci. L’approche des vacances (et du Bac pour les lycées) ne va pas arranger les choses. Quant au SNUIPP, la dernière action proposée consiste à demander aux enseignant-e-s d’écrire aux députés… Quelle radicalité ! Quelle perspective mobilisante ! Néanmoins, il existe toujours un collectif des établissements en lutte, qui appelle à reprendre l’offensive car, on l’a vu, toutes les revendications demeurent. Ce collectif rappelle aussi avec juste raison que la mobilisation doit conserver le caractère unitaire qui a fait sa force et qui rassemble enseignants, ATOS, parents et élèves.

On ne peut que souscrire lorsqu’il déclare : « Notre lutte pour un enseignement public de qualité concerne l’ensemble de la population ». Beaucoup de parents qui sont avec les enseignants dans le mouvement, et à son initiative dans certains endroits, se battent pour l’avenir de leurs enfants. Lutter contre la logique libérale qui privilégie la rentabilité, la logique de l’entreprise à la qualité du savoir, exiger des emplois dans l’éducation, des crédits suffisants pour son fonctionnement s’intègre au combat des salariés de la Fonction publique, des hôpitaux, de la Poste qui se battent eux aussi contre la casse des services publics. Cela rejoint la bataille nécessaire, dans le public comme dans le privé, contre le chômage et la précarité.

Du poil à gratter

Ces choses étant dites, et sans pour autant opposer le qualitatif au quantitatif, comme voudraient le faire les tenants des projets gouvernementaux, les deux étant nécessairement liés, il faudra bien aussi poser les questions sur l’éducation que nous voulons et mettre notre grain de sel anarchiste. Car si les écoles doivent être des lieux d’instruction, c’est quand même leur but premier. Encore faut-il qu’elles aient et les moyens de l’être et les « méthodes » pour réussir. Et visiblement, ce n’est pas le cas actuellement. Les échecs et les retards scolaires ne peuvent pas uniquement s’expliquer par les conséquences de la restructuration capitaliste et le malaise des banlieues. On sait que la massification de l’enseignement secondaire et supérieur est loin d’être synonyme de démocratisation.

Il faudrait peut-être aussi arrêter de mythifier un âge d’or de l’enseignement troisième République ou pré-Mai 68… Car si on est tous d’accord pour dire qu’il faut plus d’enseignants et se battre pour cela, si c’est pour continuer à faire la même chose depuis des lustres, est-ce bien satisfaisant ? Défiler avec des profs de prépa du lycée Louis le Grand (ce qui se fait de pire dans l’élitisme), ce n’est pas pour le moins gratifiant. Participer à un mouvement soutenu par le très réactionnaire SNALC, il y a de quoi être interpellé. C’est tout le système qu’il faut changer, y compris les mentalités. Mentalités aussi bien vis-à-vis des élèves que de tous les précaires de l’Éducation nationale que trop souvent les organisations syndicales laissent tomber. Alors, de la maternelle à l’université, c’est aussi tout un travail de remise en cause qu’il nous faut mener, des statuts trop multiples des personnels (facteur de divisions), aux hiérarchies diverses et (a)variées, en passant par les programmes et les fonctionnements pédagogiques.

En ce moment, ce sont les partisans de l’école à la sauce libérale qui tiennent le haut du pavé, et qui démagogiquement appuient là où ça fait mal (échecs scolaires, violences, lourdeurs bureaucratiques, mal-être des enseignants) pour mieux faire passer la pilule de l’austérité, en attendant la privatisation.

Pour nos ultra-libéraux, l’éducation est une marchandise comme une autre, et beaucoup à Bruxelles (Commission européenne) ou ailleurs (OMC), rongent leurs freins. Il faut avouer que c’est bien joué quand la bande à Allègre dit qu’il faut mettre l’élève au centre du système ! Ne leur laissons ni le terrain du discours pédagogique, ni les apparences (pour ces derniers, il faut plutôt parler d’appâts rances) du changement et du renouveau. À nous de faire passer le message qu’un autre futur éducatif est possible !

Éric Gava (groupe de Rouen)


Crise de foi

Œcuménisme médiatique

Samedi 13 mai, dans le cadre du jubilé, s’est tenu à Lyon une rencontre œcuménique des différentes chapelles chrétiennes dans l’enceinte de l’amphithéâtre où furent, jadis , torturés et tués les premiers « martyrs » chrétiens de Gaule. Cette initiative n’est pas dû au hasard puisque cela fait des années qu’à Lyon le rapprochement entre chrétiens est « travaillé » .

Cela a aussi été l’occasion, pour l’Église de France, d’inviter l’évêque Gaillot, chantre du catholicisme social, qui était au placard depuis 95 pour cause de « progressisme » .

Cela n’a plu ni à certains dans l’Église, ni aux autres chrétiens présents à la rencontre, tant il était évident que les cathos se faisait là une bonne pub.

Notons que contrairement au titre de La Croix « La fin de l’affaire Gaillot », celui-ci a seulement été invité comme faire-valoir médiatique (rôle qui lui a toujours été assigné par l’église pour compenser sa droitisation de moins en moins complexée).

Par ailleurs, dans le même numéro de La Croix, il est fait état, sur un ton complaisant, du pèlerinage des cathos intégristes en l’honneur des « martyrs » chouans de la grande révolution et de leur condamnation des repentances du pape…

Comme quoi, en bon chrétien, La Croix mange à tous les râteliers.

Régis Boussières. — groupe Kronstadt (Lyon)


Bordeaux : Journées européennes de mobilisation sur les retraites

Pour qui sonne le glas ?

Bordeaux : 17 mai 2000 : journées européennes de mobilisation sur les retraites ! Ce sont prés de 3 000 papis et mamies qui sont venus de toute l’Aquitaine et des Charentes, ce mercredi 17 mai 2000, à Bordeaux. Belle mobilisation pour une unité de façade au sein de la Confédération européenne des Syndicats (CES) !

Si la CGT défend le maintien des régimes par répartition, elle se réjouit de l’unité avec des syndicats qui tout en affirmant défendre le système actuel de répartition, mettent en avant des propositions qui inéluctablement vont vider les caisses de ces régimes.

En effet, une part de la performance des régimes par répartition est leur effet de masse portant sur l’ensemble des salariés et quasiment de toute a masse salariale. Si vous pouvez « placer » vos cotisations où vous voulez, vous ne les « placerez » plus en cotisation mais en épargne et par contre vous dépenserez des fonds issus de la répartition pour essayer de spéculer, ce qui est la logique de la Bourse.

La CFDT ne cesse d’encenser la transformation du salaire en part de capital ! C’est vrai que l’on avait vu depuis longtemps que la politique confédérale était une politique patronale. La solution pour la CFDT, la fin du salariat ce sera tous actionnaires ! L’épargne salariale chère à Nicole Notat, c’est je donne une part aux salariés et je la remet à la Banque. Bravo, l’activation des dépenses !

Pire pour la CFDT, l’équité, c’est de reculer à 40 annuités pour tous, public et privé, alors que le MEDEF annonce clairement qu’il n’attend que le passage de tous à 40 annuités pour exiger le passage à 42 annuités. La CFDT reconnaît elle-même ces intentions.

La CFTC et la CGC défendent becs et ongles qu’il ne faut pas dire « fonds de pension » pour la capitalisation des retraites mais « fonds de réserve », voire même « fonds de lissage » pour la CFE-CGC. Si pour FO, le slogan « La vie ou la Bourse ! » est des plus pertinent, le choix n’a pas été fait de construire le rapport de force avec tous ceux qui défendent la retraites par répartition, l’union syndicale G10 « Solidaires » en particulier (qui comprend des syndicats SUD et des syndicats non confédérés).

Dans ces mobilisations, ne sont présents que les syndicats membres de la CES, donc les seuls confédérés. Pourtant, il y a bien plus de résistance aux sirènes du libéralisme en dehors de la CES qu’à l’intérieur.

Ce mercredi soir, une conférence avait été organisée par « Solidaires » avec ATTAC33, Les amis du Monde Diplomatique, CGT Caisse des dépôts, CNT-AIT, Confédération paysanne, Espace Marx, Fédération CGT Finances, Ligue des Droits de l’Homme, MNCP, FSU, AC ! gironde, Espace citoyen de Mérignac.

Pierre Khalfa, membre de la Fondation Copernic et de SUD-PTT, était invité comme coordonnateur de l’ouvrage Les Retraites au péril du libéralisme ainsi que Jean-Marie Harribey économiste critique, membre d’ATTAC33 et de SUD-Éducation, père de la formule « il n’y a pas de réfrigérateur du capital  ».

Le débat porta sur l’argumentation fallacieuse et mensongère de la prédiction économique et démographique, 2040 est un horizon improbable pour des données sérieuses de prévisions économiques. Les rapports qu’ils soient pessimistes, tel Charpin, ou optimistes, tel le rapport Teulade, ne vise qu’au seul but éviter d’argumenter sur la nécessaire répartition des richesses produites !

Une deuxième partie porta sur les mécanismes de capitalisation et rappela là encore une idée simple sans être simpliste, il n’existe de richesse crée que celle du travail ! Après deux heures de questions, nous nous promirent de nous retrouver sur le terrain des luttes, chacun allant tenter de convaincre son voisin, que « tout financier vit au dépens de celui qui l’écoute ».

Philippe Arnaud. — groupe Emma Goldman (Bordeaux)


Dijon : grève des éboueurs

La lyonnaise des eaux boit la tasse

Après une grève déterminée, longue de 37 jours, les 140 éboueurs salariés de la société Franco-suisse (groupe Lyonnaise des eaux) ont décidé majoritairement le 4 mai dernier de reprendre le travail. Ils ont en effet estimé avoir obtenu ce qu’ils revendiquaient. Forts de leur détermination, de leur solidarité (100 % de grévistes jusqu’à la fin du conflit) mais aussi des différents soutiens extérieurs, ils ont obtenu 9 embauches, le remplacement de 15 départs en retraite jusqu’à fin 2003 ; la récupération des 7000 jours de congé programmée que cinq ans à raison de 10 jours par an par salarié ; une expertise sur la réalité de leurs conditions de travail, et ce, sous la conduite du Comité d’hygiène, sécurité et conditions de travail en vue des négociations relatives aux 35 heures.

En revanche, leur revendication des jours de grève payés est restée lettre morte. Ainsi, les grévistes devront s’accommoder de retenues sur salaire étalées sur six mois ! C’est bien évidemment là que le bât blesse.

C’est par leur acte d’opposition, de résistance (la grève) qu’ils se sont dressés collectivement contre la direction, contre la Lyonnaise des eaux et ses requins d’actionnaires, contre cette sacro-sainte logique du toujours plus de profits.

C’est ainsi, collectivement, qu’ils ont décidé dès la reprise du travail, de faire leur tournée à un rythme ralenti, plus humain, afin de ne plus cautionner cette logique du toujours plus vite, source de problème de santé, de souffrance au travail.

Si la grève est terminée, le conflit continue car les 35 heures vont être prochainement à l’ordre du jour. Les éboueurs et leur syndicat CGT restent donc vigilants, et il y a de quoi !

groupe libertaire de Dijon


Pour la reconnaissance de l’objection de conscience en Turquie

Pour la première fois en 1996, un jeune turc déclarait refuser d’accomplir son service militaire, Osamn Murat Ulke fut condamné pour désertion, puis une deuxième fois en 1997 pour propagande anti-militariste. Ayant purgé ses peines de prisons, il a été libéré avec obligation de rejoindre son régiment. Ce qu’il refuse obstinément…

Depuis, et en quelques années, différents groupes antimilitaristes se sont organisés en Turquie (Izmir, Ankara, Nasiyan, Istambul…), voici leur dernier communiqué qui projette la reconnaissance du statut d’objection de conscience.

No ! — groupe libertaire de Tours

« Chers amis,
Comme vous le savez tous depuis quelques mois, IAMI avait prévu une action antimilitariste que nous décrivions comme le « big bang ». Un des membres de IAMI projetait d’y déclarer lui-même son objection de conscience devant la presse le 14 mai.

Maintenant, nous avons fini cette action avec succès, résultat de dangereux et fatiguants mois de travail. Ceci est le premier message que nous envoyons au réseau antimilitariste international après notre action. Ce dimanche 14 mai, ce n’est pas une mais trois personnes de IAMI qui ont déclaré leur objection à la conscription lors d’un festival antimilitariste qui a rassemblé plus de 800 personnes. Nous espérons que ceci sera un message utile aux forces publiques turques pour qu’elles réfléchissent sur l’objection de conscience et aussi de voir une grande réaction dans les médias turcs.

La première partie du projet de l’IAMI est achevé, et dans les jours suivants, nous serons dans l’attente des procédures légales que les nouveaux objecteurs auront à affronter. Nous prévoyons de transformer les accusations juridiques, les jugements en cour militaire, les emprisonnements en une campagne de lutte d’opposition au service militaire obligatoire.

Nous pensons que la journée internationale de l’objection de conscience est nécessaire jusqu’à ce que le dernier bastion militariste est été capturé par les pacifistes. Les antimilitaristes turcs ont besoin et attendent votre solidarité pour capturer l’un de ces plus importants bastions.

IAMI (Istambul Anti-Militarist Initiative).
iami@savaskarsitlari.org


Création de la fédération santé CNT

Travailleurs de la santé, du social, notre quotidien est la confrontation avec les difficultés, la misère, l’exclusion que génère la société capitaliste. L’actualité et l’avenir que les gouvernements nous proposent dans ces domaines ne sont faits que d’inégalités supplémentaires dans la santé, la couverture sociale, l’éducation, de restrictions budgétaires et de privatisations progressives au bénéfice des plus riches. Partout c’est l’instauration d’un système à 2 vitesses : un système minimal à moyens réduits pour les plus démunis et un système privatisé accessible seulement aux plus riches.

Pour celles et ceux que nous soignons, aidons et accompagnons dans notre travail, parce que nous sommes nous aussi victimes de cette logique, nous avons décidé de relever le défi de construire un autre futur, de placer comme préoccupation principale de notre société : l’humain.

Pour cela nous avons comme outil le syndicat, pour défendre nos droits de travailleur et notre vision du service public égalitaire, solidaire, accessible à tous. Et c’est au sein a Confédération nationale du travail que nous entendons lutter sur la base d’un syndicalisme de démocratie directe et révolutionnaire car il s’agit de combattre les causes de la misère mais aussi de construire les fondations d’une société nouvelle. C’est pourquoi les militants de la CNT du secteur santé et social vous invitent à les rejoindre au sein de la Fédération des travailleurs de la santé et du social de la CNT, constituée à Paris le 30 avril 2000.

Pour la Fédération, Xavier Gambelou


chronique anarcha-féministe

Vive la vie !

En tant qu’anarchiste, finalement, ma revendication centrale, c’est le droit au bonheur. Le droit de mener une existence épanouissante, choisie, conduite dans le respect de chacun. Nous nous opposons aux croisé-e-s auto-proclamé-e-s de la vie. Elles et eux militent pour une présence humaine asservie à des préceptes absurdes et mortifères. D’un côté, la planète Terre croule sous le poids de la misère. De l’autre, les intégristes de tous poils mènent une guerre nataliste. De nombreux exemples historiques montrent que ce genre de guerre débouche systématiquement sur l’exacerbation des nationalismes et sur des guerres pour un « espace vital » !

Lorsque nous militons pour le droit à la maîtrise de la conception, nous militons en même temps pour l’augmentation de la qualité de vie de chacun-e. Il y a bien entendu des enfants non désiré-e-s qui sont aimé-e-s et épanoui-e-s. Il y a des enfants qui endurent des sévices et qui les reproduisent après (ou non). Comment jeter la pierre aux parents : méprisé-e-s en tant qu’enfant, maintenu-e-s dans l’ignorance, avec le sentiment d’être piégé-e-s à l’annonce de la grossesse jusqu’à la mort de la personne et parfois après.

Nous, anarchistes, revendiquons une éducation, une formation qui permette à chaque personne de vivre une existence digne de ce nom dans le respect de chacun et de l’environnement.

Gabrielle


Conférence de l’OCDE à Bologne du 12 au 15 juin 2000

La riposte s’organise !

Du lundi 12 au jeudi 15 juin l’OCDE (Organisation pour la coopération et le développement économique) tiendra sa conférence internationale à Bologne. Celle-ci aura pour thème : stratégie et politique à mettre en place pour renforcer la compétitivité des PME au sein de l’économie mondiale.

Elle sera organisée en collaboration avec le Ministère italien de l’Industrie. Les participants seront constitués des délégations gouvernementales de 32 pays membres auxquels s’ajouteront jusqu’à 50 nations « invitées ». Seront aussi présentes toutes les organisations supra-étatiques des Nations Unies, de l’Union Européenne, les autres organisations internationales pour la « coopération économique », le FMI (Fond Monétaire International), la Banque Mondiale, l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), la Banque Centrale Européenne, pour n’en citer que quelques unes parmi les 28 au total.

L’OCDE est le forum des pays industrialisés. Toutes les nations ne faisant pas partie de l’OCDE sont considérées comme « émergeantes ». L’année dernière des États comme l’Argentine, le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Indonésie, la Fédération russe, la République slovaque et l’Afrique du Sud ont entamé des procédures afin de demander leur adhésion.

Sont aussi invités à participer à cette conférence des pays tels que : la Bulgarie, le Maroc, l’Égypte, Israël, le Kasakstan, la Roumanie, la Slovénie, la Tunisie et le Vietnam.

Un forum mondial du capitalisme

On s’attend à ce que la Conférence de Bologne soit un « Forum mondial du capitalisme mondial » et le choix qui a été fait de mettre à l’ordre du jour les PME introduit le thème des accords politiques que le tableau du MAI n’a pu établir. Un des objectifs du MAI étant la définition d’un protocole d’accord international permettant « des contrats de régions » avec des pénalités à payer aux entreprises par les gouvernements nationaux au cas où ces contrats ne seraient pas respectés par les travailleurs.

Les objectifs annoncés et qui seront traités par la conférence seront les suivants : flexibilité, rassemblement et quartiers ouvriers, système de regroupement des entreprises par le biais de la participation croisée syndicats, infrastructures publiques pour faciliter la vie de l’entreprise (télécommunication, transport, énergie, commerce électronique, sécurité (contrôle policier et militaire du territoire).

En tant qu’identité collective et individuelle luttant contre le capitalisme, l’autoritarisme et leur action en faveur de la mondialisation, nous avons l’intention de prouver toute notre hostilité face à cette conférence internationale de l’OCDE. Le vent qui a soufflé à Seattle est aussi ressenti à Bologne.

Tout comme hier à Washington et quelques mois auparavant à Davos, demain à Bologne il faudra prouver que, où que nous vivions, il n’y aura aucun lieu pacifique pour les puissants de ce monde. Ces messieurs seront obligés de se lever à 5 heures du matin (tout comme des millions de travailleurs chaque jour) s’ils veulent participer à leur forum. Nous ne leur permettrons pas de se balader dans les rues et parcs de notre ville en toute tranquillité à l’instar des touristes aisés. Nous ne permettrons pas aux gros patrons mesquins du coin d’exercer leur don d’éloquence et de voyoucratie caractéristique de la grande finance internationale.

Sans justice pas de paix

De par la nature et le contexte de la Conférence, il va sans dire que toutes les organisations de travailleurs (collectifs, syndicats) se doivent de participer à la manifestation anti-OCDE. À Bologne, entre le 12 et le 15 juin, il y aura environ mille représentants du monde capitaliste. Secrétaires et ministres de l’industrie de 50 pays, responsables de haut niveau des organisations supra-étatiques. Nous pouvons stopper cet étalage de puissance du capitalisme mondial. Il ne peut y avoir ni dialogue, ni négociation avec ce système mondial de domination et d’exploitation. Toute identité sociale et politique s’opposant au système mondial d’exploitation et d’oppression se doit d’entraver et de saboter la Conférence. Aucun pays, aucune ville pacifiste ne peut accueillir les Seigneurs du monde. Sans justice, pas de paix !

Nous sommes en train de préparer une grande manifestation, une réunion internationale de grande ampleur afin de bloquer les accès à la conférence. Des dizaines de milliers de personnes peuvent entraver la bonne marche du sommet tout simplement en se rendant à Bologne. Nous œuvrons afin de provoquer une grève générale. C’est aux organisations de travailleurs qu’il appartient désormais de permettre ou non une telle réunion : celle des Seigneurs du monde.

Les PME constituent l’assise moyenne du système capitaliste mondial. La mondialisation et les organisations supra-étatiques n’ont pas été créées dans le but de satisfaire les besoins de l’humanité. D’un point de vue économique, le système a pour particularité une réduction constante du nombre d’entreprises constituées en trusts qui façonnent le marché et dirigent le système économique mondial afin d’en tirer le maximum de profits. Pour ce faire, ces entreprises comptent sur la capacité du contrôle religieux, policier, militaire et social de l’État ainsi que celle des masses média. La mondialisation est la poursuite à l’échelle mondiale de siècles de concentration de capitaux inhérente à tout système concurrentiel. L’exploitation et la domination qui sont ni plus ni moins des valeurs intrinsèques de capitalisme sont présentes au sein de la plus petite entreprise comme de la plus grande « holding ». Le système actuel qui régit l’économie est un système d’exploitation reposant sur une hiérarchie de codes sociaux (normes, lois, coutumes) et de revenus.

Préparons-nous à relever le défi

Pour les travailleurs européens et nord-américains, une mondialisation croissante est synonyme de régression par rapport aux acquis politiques, économiques et sociaux.

Pour les populations d’Amérique latine, d’Afrique, de l’Europe de l’Est et d’Asie, ce développement implique une domination sournoise du système capitaliste et la prolétarisation qui en résulte.

Pour tous les prolétaires de la planète, la mondialisation rime avec réduction de salaire, négation des libertés sociales et individuelles, précarité. Autrement dit, paupérisation et soumission.

Face à de tels maux, nous nous préparons à relever le défi. Nous appelons tous ceux et celles qui ont déjà réagi à Seattle, Davos et Washington à participer aux rassemblements anti-OCDE à Bologne en juin prochain. Une riposte s’impose et plus nous serons nombreux, plus nous pourrons montrer notre refus des politiques prônant la mondialisation et le néo-libéralisme.

Comité antiraciste citadin
Cercle anarchiste Berneri

E- mail : cca-bologna@tin-it
Le programme est le suivant :
• samedi 13 mai à 15 h 00 et dimanche 14 à 10 h 00 : AG préparative et organisationnelle, Via del Pratello-Sala Benjamin (Circolo Pavese)
• samedi 10 juin à 15 h 00 : manifestation. Point de rassemblement Piazza de l’Unità (derrière la gare centrale)
• dimanche 11 juin à 10 h 00 : réunion contre la mondialisation. Sala dei Notai, Piazza Maggiore (centre ville)
• tous et toutes dans les rues du 12 au 15 juin. Il y aura des possibilités d’hébergement pour les personnes de l’extérieur (camping en ville comprenant une cuisine et des lieux de rencontre et de débats).


Congrés de la Fédération anarchiste italienne

Motion de résistance à la mondialisation

Le processus de globalisation signe notre époque. Il coïncide avec l’hégémonie du capital transnational, l’accumulation croissante de la richesse, l’oligopole des multinationales de la communication médiatique, le renforcement des hiérarchies sociales et politiques, la réduction des libertés individuelles et collectives.

Un énorme filet est en train de capturer des millions d’individus, chaque jour plus esclaves et appauvris par les lois anonymes et impersonnelles du marché et de l’idéologie politique de la globalisation. Celle-ci, sous le discours fallacieux de la défense des droits humains universels, cache la volonté des superpuissances d’uniformiser et de soumettre à leur contrôle des portions de plus en plus vastes de la planète. Les conséquences sont directes et immédiates : misère croissante d’énormes masses de populations, pauvreté et dénutrition, dégradation sociale, phénomènes migratoires de masse, désastre écologique toujours plus étendu, recours croissant à la guerre comme moyen de règlement des conflits sociaux, masqués sous la façade des tensions ethniques, religieuses, raciales, etc.

Les manifestations contre les guerres en Irak et au Kosovo, les mobilisations contre les patrons du monde (OMC, G7, FMI), avec les exemples spectaculaires de Seattle et Washington, témoignent du fait que des secteurs entiers du corps social ne sont pas disposés à accepter de manière passive cette situation.

La lutte dans les villes du pouvoir se lie à la lutte dans les périphéries opprimées et colonisées.
Du Chiapas à L’Équateur, à la Bolivie, à l’Indonésie, à la Corée, à la situation de l’Afrique australe, les occasions de conflits et les possibilités d’émancipation augmentent. Parallèlement, on observe l’augmentation de l’implication de l’État italien et des autres États de l’Union européenne aussi bien dans l’appropriation des ressources du globe que dans le protectionnisme économique et la limitation de la libre circulation des personnes provenant des pays les plus touchés par ces politiques, ainsi que dans les interventions militaires directes visant à garantir la domination de fait des logiques capitalistes.

Dès lors, la présence d’une entreprise italienne dans la privatisation d’un bien naturel collectif comme l’eau en Bolivie, et la présence de troupes italiennes, sous divers drapeaux, de l’Angola au Timor, du Kosovo au Liban… sont tout à fait exemplaires. Cependant qu’au niveau européen l’on étudie les possibilités d’intervention militaire au Zimbabwe.

Dans ce contexte, l’action de la FAI doit se concrétiser en termes de solidarité aux populations et aux prolétaires en lutte contre toute forme d’intervention militaire.
En particulier :
 Solidarité aux activistes persécutés pour leur participation à la mobilisation contre la mondialisation.
 Contre-information concernant l’impérialisme économique italien et implication des travailleurs intéressés dans des formes de solidarité et de lutte.
 Promotion et participation directe des groupes et des militants de la Fédération aux mobilisations en acte contre la mondialisation (en particulier celles d’Ancône, Bologne et Gênes).
 Récolte d’informations sur les situations de crises, et surtout quand une intervention militaire italienne directe est prévisible, comme, par exemple, au Zimbabwe.
Sur le plan des rapports avec le mouvement anarchiste international, la FAI s’engage à :
 Maintenir et renforcer les rapports avec l’Internationale des fédérations anarchistes (IFA), en élargissant les engagements pris.
 Promouvoir une rencontre sur le thème de la mondialisation.
 Proposer des mobilisations conjointes concernant des échéances à caractère continental (comme par exemple, la prochaine échéance de Prague à l’automne).
 Promouvoir une rencontre avec les différentes réalités anarchistes agissant sur le territoire de l’Union européenne.
Afin de pouvoir poursuivre ces objectifs, le congrès de la FAI propose la constitution d’une commission de relations internationales.

Fédération anarchiste italienne


53e festival international de Cannes,
39e semaine internationale de la critique,
32e quinzaine des réalisateurs

Désirs et troubles…

Nagisa Oshima est un cinéaste qui nous manquait. Qu’il soit là avec un film, Gohatto (Tabou), est un bonheur. Quand Takeshi Kitano déclare que c’était une évidence que Oshima devait réaliser un film pour guérir d’une terrible attaque cérébrale, il ajoute que plusieurs scénarios étaient prévus : que sa chaise roulante descende le grand escalier (remake de Potemkine) ou qu’ils le portent sur leur dos (remake de La balade de Narayama) de toutes façons, ils allaient tout faire pour qu’il arrive avec son film à Cannes… Le désir et les dérèglements qu’il provoque sont au centre de tous les films d’Oshima. Gohatto rappelle qu’il peut ruiner les institutions les plus solides. Car une des jeunes recrues de la milice du Shinsengumi (en 1865) crée le trouble et le désir parmi tous les guerriers, vieux ou jeunes. Quand Kitano, qui incarne une sorte d’alter ego du réalisateur, coupe à la fin du film un cerisier en fleurs d’un seul coup de sabre, nous comprenons que le sort du trublion est jeté. Que vaut un guerrier, devenu le jouet de ses passions ? Il faudra donc éliminer la source du désordre.

Une très jeune femme cinéaste pose, elle aussi cette même question à travers une page de l’histoire de France. Saint-Cyr de Patricia Mazuy raconte l’histoire de Madame de Maintenon qui arrache à Louis XIV la promesse d’une école pour jeunes filles. Patricia Mazuy les a recruté parmi des centaines de dossiers de la DASS.

Tout marche comme sur des roulettes jusqu’à ce que la liberté de cette éducation provoque des désirs et des problèmes non prévus au programme. Le théâtre et la prose de Racine vont créer des sensations hélas incontrôlables. L’école va s’aligner sur l’ordre le plus militaire et la discipline la plus dure. La subversion du désir et de la liberté de pensée seront réprimées. Alors que la Maintenon voulait faire œuvre émancipatoire, elle crée un nouvel intégrisme religieux. Leçon d’histoire à méditer.

Le petit garçon de Yi Yi ne pose que des questions. Ses désirs : comment atteindre la vérité quand nous ne voyons que la moitié des choses. Photographier la nuque de la personne qui nous fait face, lui montrer ce qu’elle ne peut voir. Et puis expérimenter. Plonger dans le lavabo pour pouvoir garder la tête sous l’eau. Parler seulement quand on a quelque chose à dire. Edward Yang a réussi un film magique à partir de questions existentielles, une saga familiale qui réfléchit sur le quotidien, l’écoulement du temps, les amours passés, la place de chacun dans ce puzzle social et réaliste. Il dit les réminiscences de l’enfance, réveille les envies enfouies. Travaille cette partie du refoulé qui nous relie aux pulsions que notre psyché essoufflée n’arrive pas à affronter. « Qu’est-ce que je cherche » est une question qui revient comme une ritournelle. Les adultes prennent des leçons involontaires auprès de leurs enfants.

Leçons douloureuses, qui se révèlent prometteuses d’espoir et de changement. Yi Yi administre une dose de tendresse puissante, montre que les krachs de toutes sortes reposent sur des faits et sur nos insuffisances. Un cinéma qui transporte, donne des émois d’âme. De l’univers de Yi Yi de Edward Yang à Taipeh il n’y a qu’un pas pour rejoindre le monde de Aoyama Shinji qui se trouve à Kyushu, au Japon. À première vue : calme et volupté. Un chauffeur de bus ramasse deux enfants, la mère fait des signes de la main au loin. Changement brutal de plan : un assassin en plein jour prend le bus en otage, ce criminel a une sorte d’humour, pour prendre l’air il s’attache au chauffeur et met sa casquette sur sa tête. Puis il descend quelques passagers toujours en s’esclaffant. Survivent : le chauffeur et les deux enfants. Comment vivre après ? C’est long de reprendre pied dans la vie quand tout a basculé en quelques secondes. Le film se donne le temps de travailler cette question : il dure 3 heures 37. Pas une seconde de trop ou de moins. C’est un ovni cinématographique qui s’inscrit dans la généalogie du jeune cinéma japonais établie par des films comme Cure, Charisma ou After life. L’acteur préféré de K. Kurosawa, Koji Yakusho, joue le chauffeur de bus. Dans le calme d’un paysage ordinaire, ni grandes montagnes, ni mornes plaines se déroule cette tragédie moderne : comment vivre après, comment faire le deuil de ce qui est arrivé. Comment se révolter, comment sortir la violence qui est en nous « qui va lui rendre tout ce qu’il a perdu ? » alors qu’il s’est trouvé là, par hasard ! ? questionne le chauffeur de bus en proie au désespoir devant cette existence gâchée…

Un film fait des sensations qui nous dominent quand le réel a frappé trop fort, n’a épargné personne. Un film où le silence devient un personnage du film car les deux enfants ne parlent plus depuis cet événement et ne reprennent pied que grâce à leur compagnon d’infortune. Un film en noir et blanc où la couleur vient sur la pellicule quand la parole émerge à nouveau. Eureka.

Lars Von Trier parle de tous ces écueils dans un seul et unique film. Il en parle avec roublardise, il en parle en nous tenant au bout de sa baguette mais il en parle avec du cœur et il crée l’émotion : Björk joue et nous bouleverse. Björk a donné sa musique et joue sur toutes nos cordes sensibles : Dancer in the Dark est un fleuve rapide qui emporte tout sur son passage, même nos réserves quant aux moyens employés.

Lars Von Trier travaille deux sujets à la fois. Raconter une histoire mélodramatique : une femme devient aveugle et sait que son fils le deviendra s’il n’est pas opéré à temps. Faire un film contre cette Amérique qu’on n’aime pas : anticommuniste, xénophobe, Selma est d’origine tchèque, l’Amérique de la peine de mort etc. Ces deux créneaux co-existent, se combattent, se complètent et s’anéantissent parfois. Mais de tout ce fatras, interrompu par des magnifiques scènes de comédie musicale (imaginez que l’usine des ouvriers dans le film de Schrader, Blue Collar se mettent à chanter et à danser) sort, tel un phénix, un film chaleureux, impressionniste, hyperréaliste et tendre. Il est porté par différentes générosités : celle de Björk d’abord, celle de Catherine Deneuve ensuite, (ça fait des lunes qu’elle n’a pas été aussi bien et aussi émouvante) ! Elle joue une ouvrière solidaire de Selma (Björk) qui essaie de la protéger et qui y arrive presque quand Selma ne lui résiste pas trop. D’autres personnages ont une présence forte, mais il ne s’agit pas de raconter le film. La musique peut transformer la vie. Elle peut aussi abolir des frontières de classe et de race. La musique peut beaucoup quand on sait la capter. Arriver à déchiffrer notre « Mélodie du bonheur » ! Ça fait kitsch. Mais c’est une des grandes qualités du film. Grandiose. Point.

Certes, il y avait la touchante Anna Thomson dans (encore un film de Amos Kollek) Fast Food Fast Women, certes il y avait les vertus des patates glanées dans Les Glaneurs et la glaneuse de Agnès Varda, il y eût un opéra sublime et drôle de Pansori, Chunhyang de Im Kwon Taek, il y avait des candidats au film de « patrimoine » les Destinées sentimentales de Assayas avec d’excellents acteurs, mais il n’y a eu qu’une divine gamine, Björk, tordant sa bouche comme Janis Joplin et chantant parfois presque aussi bien. Alors, une année faste ? « fast women » en tous cas, Petite chérie de Anne Villacèque en tête… et une « Verticale » à ne pas manquer, celle que Tran Anh Hung déploie avec grâce et beauté, À la verticale de l’été (sortie à point, le 24 mai).

Heike Hurst (« Fondu au Noir »-Radio libertaire)


Le Sourire de Némésis , Cathy Ytak

Némésis est une jeune femme, disons de mauvaise humeur, à la parole verte et plutôt étonnante au regard de sa famille. Némésis est disons de bonne famille… mais elle est révoltée par le monde qui l’entoure.

Némésis est la fille de Nyx, déesse de la nuit. Elle a pour frères Hypnos et Thanatos. Et voila qu’aujourd’hui elle fait la une des quotidiens, probable actrice d’un fait divers. Cathy Ytak n’est pas cette Némésis que la révolte a mené sous les verrous. Sa révolte, on peut donc la lire dans le Sourire de Némésis, elle est violente et solide à la fois, parfois drôle aussi. Cathy Ytak est libertaire… et son écriture a la caractéristique de laisser une belle grande place à l’imaginaire du lecteur. Le Sourire de Némésis est un plaisant petit livre joliment illustré et soigneusement édité.

Le Furet

Le Sourire de Némésis est à commander chez l’éditeur : éditions Sansonnet, 73 rue de Rivoli. 59800 Lille. Prix 15 FF (frais de port compris). On le trouve aussi à la librairie du Monde libertaire.


Procès de Matmatah à Nantes

L’article L. 630 contre la liberté d’expression

Le 15 mai, autour du Palais de Justice, le dispositif policier était impressionnant. C’était l’occasion de voir quasiment l’ensemble des corps de la profession : des CRS aimant toujours jouer de leur virilité en posant la tête haute, le torse en avant de longues heures sous le soleil, des Renseignements généraux qui usèrent toute une après midi durant de leurs appareils photos et caméras, de la Brigade des Stups qui ne put s’empêcher de contrôler quelques personnes à l’entrée du tribunal sans oublier quelques personnes des Brigades anti-criminalité (qui quelques jours auparavant avaient arrêté de dangereux criminels qui collaient des affiches de la FA et du CIRC)…

Cet arsenal policier, qui a même impressionné la presse, n’était pas là pour protéger un quelconque ministre mais pour maintenir l’ordre autour d’un procès. Et quel procès ? Non, ce n’était pas un procès sulfureux d’un quelconque groupe terroriste ou des responsables d’un gros trafic de stupéfiants. C’était simplement le procès du groupe musical Matmatah, en particulier pour leur chanson Apologie (« Ce serait pourtant si simple de le légaliser, 2 petits joints par jour c’est anti-dépresseur »). Matmatah est pourtant un groupe commercial très classique et comme le soulignait le manager pendant le procès « le public de Matmatah boit principalement du coca light ». La situation a de quoi être cocasse : une mobilisation policière importante pour un groupe très classique ayant déjà vendu plus de 600 000 albums !

Au-delà du cas nantais et de ses policiers quelque peu zélés, la situation française est toute aussi cocasse. Les rapports officiels se succèdent avec des analyses similaires. Le dernier rapport Roques (commandé par le Ministère de la Santé), en pleine Coupe du Monde, remettait complètement en cause le classement entre produits licites et illicites. A cette époque, après les accidents entre supporters et gendarmes, Plantu à la Une du Monde s’amusait à faire dire à un hooligan : « Au début je prenais du cannabis, puis je suis passé aux drogues dures : l’alcool et le foot… ». Le dernier rapport (avril 2000) de la MILDT (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie) va dans le même sens. Avec de nombreuses contradictions (le contraire aurait été étonnant), la MILDT affirme malgré tout plusieurs points importants :
 « Une société sans drogue n’existe pas.... La recherche de plaisir, l’atténuation de la souffrance… font partie des motivations humaines… »
 Un des chapitres du rapport est intitulé « Savoir plus, risquer moins » en privilégiant l’information sur la moralisation.

Cette loi a pour but le contrôle social

Situation cocasse car ces écrits pourraient, au même titre que Matmatah, être poursuivis au nom de l’article L. 630 (article interdisant tout débat sur les drogues). Situation cocasse car, malgré tous les rapports officiels, la situation ne peut globalement changer.

Elle ne peut pas changer car même si l’usage de produits illicites concerne plusieurs millions de personnes, aucun gouvernement de sa propre initiative ne prendra le risque de braquer une frange importante de la France réactionnaire. Et au-delà de ces considérations électorales, la loi sur les stupéfiants répond à un souci de contrôle social.

Le contrôle social est fondamental car il permet de maintenir les logiques de la société libérale et d’enterrer toute remise en cause globale. Toute société a besoin de règles communes et pour être viable elle a besoin d’une adhésion minimale de l’ensemble de ses membres, même s’ils/elles sont exploité-e-s, précaires… Le contrôle social prend donc une grande importance dans à une société comportant tant d’injustices et de contradictions. Ce n’est pas un hasard si la loi des stupéfiants (1970) fait partie de toute une série de lois liberticides qui ont été votées au lendemain de 68. Le contrôle social a de multiples facettes :
 idéologique (à travers les médias, la publicité, l’école…), elle nous intègre dans des rôles et comportements normalisés,
 de l’urbanisme (avec des logiques séparatistes, de ghettos) à la logique de subsistance : nous maintenir avec une aide sociale minimum (RMI…) afin de nous contrôler, de nous rendre dépendant des institutions,
 du contrôle policier (grâce à des lois d’exception) aux fichages informatiques

Dans ce contexte la loi sur les stupéfiants remplit totalement sa fonction. Elle permet de contrôler toute une population (la classe dangereuse !) avec ses indics, ses contrôles, la tolérance (contre quelles concessions ?) d’une économie parallèle…

Mais ne soyons pas naïfs ! Johnny Halliday peut affirmer consommer de la cocaïne, tout comme une partie de la jeune bourgeoisie tout en fréquentant les boîtes branchées… Le commerce est à son comble : selon le Monde Diplomatique (avril 2000) les bénéfices de la criminalité financière représentent plus de 3 fois le montant des réserves de toutes les banques centrales, plus de 10 fois la capitalisation de la bourse de Paris.... Que l’on ne vienne pas nous dire que l’on ne sait où se trouve cet argent !

Cette réalité nous montre que l’interdit n’a rien à voir avec un quelconque enjeu de santé et que l’article L. 630 a toute sa signification. C’est dans ce contexte qu’une petite centaine de personnes se sont rassemblées (à l’extérieur et à l’intérieur du tribunal) pour dénoncer cette situation. Cette mobilisation (un lundi après midi, malgré une forte présence policière, la garde à vue de colleurs d’affiches…) n’est pas négligeable, même si elle ne peut, à elle seule, renverser le cours des choses.

Théo Simon. — groupe FA Nantes


Week-end anticapitaliste à Metz

Le Collectif libertaire de Metz (CNT, FA, Scalp) a organisé les 15 et 16 avril dernier un week-end de lutte et fête contre le capitalisme et pour un autre futur. Ce week-end comprenait trois moments importants. Tout d’abord, la manifestation anticapitaliste du samedi du samedi 15 où nous nous sommes retrouvés une bonne soixantaine de personnes devant la gare de Metz. Puis ce cortège s’est déplacé pour arrivé au centre-ville dans les rues piétonnes, où les gens ont été plutôt réceptifs. Sur la banderole en avant du cortège, on pouvait lire : « Contre le capital, grève générale, révolution sociale », là nous avons diffusé nos tracts qui affirmaient que d’autre alternatives au capitalisme existent.

Puis le dimanche 16 avril, trois forums organisés aux Triniraires, dont les sujets étaient « l’écologie », « l’anarcho-syndicalisme » et « le syndicalisme et la précarité ». Environ une quarantaine de personnes sont venues assister aux forums. Le concert du dimanche soir, avec Dakhan, Néophyte, Les Dérangés, Cross me, Ersatz, Bizar a réuni 300 personnes.

Pour nous, ce week-end est une réussite et il montre bien que nos idées suscitent un intérêt de plus en plus grand chez les gens. Nous tenons à remercier les camarades de Strasbourg, de Nancy et de Belgique qui nous ont apporté leur soutien lors de ce week-end. Une partie des bénéfices du concert ira au Centre culturel libertaire autogéré de Metz (Le C2LAMeur), une autre partie ira au FTP de Marseille.

Maxime


Souscription pour Marie-Athée

Marie Athée, une camarade de la Fédération anarchiste, a été condamnée à une amende de 31 000 francs pour avoir participé à une manifestation contre Carlson Wagon Lit Travel, qui participe aux expulsions des sans papiers menées par l’état français.
Vous pouvez la soutenir en envoyant vos chèques à l’ordre du Claaaaaash (six " a " !), adressés au Claaaaaash, c/o Publico, 145, rue Amelot, 75011 Paris.
Merci à tous et à toutes !

Souscripteurs
Groupe Nada, 83 (Marie France et Jacques) : 500 F ; Nicolas C., 75 : 500 F ; François L., 75 : 250 F ; Annette A., 92 : 300 F ; Raymond C., 83 : 100 F ; Brigitte M., 93 : 200 F ; Jean L., 75 : 50 F ; Jean Pierre H., 94 : 200 F ; Bruno M., 93 : 200 F ; Anonyme : 200 F ; M. B. : 250 F ; Jean Michel C., 77 : 500 F ; Jocelyn M., 95 : 50 F ; Franck T., 78 : 200 F ; Stéphane H., 75 : 100 F ; Gilbert E., 94 : 500 F ; Jean-Marc D., 94 : 200 F ; Groupe La Commune, 35 : 200 F ; Guy C., 93 : 1000 F ; Bernard H., 93 : 300 F ; Jean-Pierre G., 95 : 500 F ; Pierre-Eric G., 75 : 100 F ; Les Amis de Pierre Besnard, 75 : 200 F ; Bruno B., 60 : 200 F ; Astrid J., 09 : 100 F ; Jean-Pierre P., 75 : 100 F ; Noelle B., 91 : 150 F ; Anonyme : 200 F ; Daniele A., 75 : 100.
Total : 7450 F.