Non à l’individualisation des demandes d’asile
Libre circulation, libre installation
La Convention de Genève du 28 juillet 1951 stipule que « le terme de réfugié s’applique à toute personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, ne peut ou ne veut se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité ». Le statut était au départ limité aux victimes d’événements survenus en Europe avant le 1er janvier 1951. Il fallut attendre le protocole de Bellagio de janvier 1967 pour que soient levées les restrictions de lieu et de temps. La France accepta difficilement l’universalisation de la Convention de Genève : elle craignait le « saut dans l’inconnu » que représente la prise en charge des réfugiés d’Afrique et d’Asie, considérés comme appartenant à des « groupes instables » (1).
Un droit d’asile peu utilisé en période de plein emploi
Tant que l’activité économique nécessitait la venue de main-d’œuvre étrangère (avant la prétendue crise), de nombreuses personnes venues en Europe pour fuir la répression autant que la misère ne ressentaient pas le besoin de demander le droit d’asile politique, puisqu’elles trouvaient facilement un emploi. C’est à partir de 1974 qu’apparurent les mesures de restriction du séjour des étrangers. Ainsi, petit à petit, les individus fuyant leur pays se mirent à demander le statut de réfugié que leurs prédécesseurs n’avaient pas eu besoin de demander. C’est aussi pour cela que les statistiques du droit d’asile ont explosé vers les années 1980, servant de justification à la réorganisation de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par le gouvernement Rocard et aux accords de Schengen, puis de Dublin.
L’érection de la forteresse Europe
Alors que des années 1960 à la moitié des années 1980, une grande majorité de réfugié-e-s (près de 90 %) obtenait l’asile, les pourcentages allaient tomber dans une fourchette de 10 à 20 % dans les années 1990, créant le phénomène des déboutés du droit d’asile. Demander l’asile est devenu un véritable parcours du combattant, parce qu’en amont de la demande d’asile, il faut parvenir en Europe et pour y rentrer régulièrement, un visa est nécessaire. Or, l’obtention d’un visa est pratiquement impossible, si l’on n’a que de faibles ressources et si l’on vient de pays réputés à « problème » (et pour l’Europe, ils sont nombreux). Ainsi, la plupart des personnes venant demander l’asile rentrent actuellement en Europe par leurs propres moyens, souvent au risque d’y perdre la vie.
Depuis l’échouage de l’East Sea à Saint-Raphaël, la plupart des médias français (dont les ineffables journaux télévisés de TF1 et France 2) ont présenté ses passagers comme des « clandestins ». C’est un abus de langage, une véritable faute de la part de journalistes, qui montre bien à quel point il sont inféodés au système : il ne peut en aucun cas être opposé l’absence de document d’identité ou l’entrée irrégulière sur le territoire pour refuser de prendre en compte la demande d’asile. C’était bien le cas de ces Kurdes irakiens. Il n’y avait donc pas lieu, d’une part de parquer ces personnes dans un camp, d’autre part d’attendre 6 jours pour leur permettre de sortir pour demander l’asile.
Individualisation à outrance
Ce qui semble gêner le pouvoir, c’est le caractère collectif de cette demande d’asile : ce sont 908 personnes dont plus de 300 enfants qui sonnent à la porte d’un État, qui depuis plus de 200 ans aime à se présenter comme « patrie des droits de l’homme ». Or, depuis les premières années de la Convention de Genève, les États cherchent à nier ce fait collectif des oppressions. Pour l’OFPRA, c’est à la personne qui demande l’asile d’apporter les preuves qu’elle est personnellement victime de persécutions de la part de son État d’origine ou craint avec raison de l’être.
Avec cette doctrine, la plupart des demandes échouent, soit par manque de preuves matérielles, soit que la personne invoque essentiellement la situation politique de son pays, soit que les craintes ne visent pas son État, mais des groupes terroristes comme le GIA en Algérie. Et si, comme pour beaucoup de femmes, les persécutions sont d’ordre familial ou domestique, c’est l’échec assuré. Et c’est bien sûr le but recherché par l’individualisation du traitement des dossiers.
Un véritable négationnisme
L’individualisation a aussi pour but de nier les responsabilités des États les plus puissants dans la plupart des conflits et des oppressions. Et c’est particulièrement vrai dans le cas de ces Kurdes irakiens. C’est vouloir nous faire oublier que les pays occidentaux, en particulier la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis, ont soutenu Saddam Hussein pendant des décennies, lui livrant des armes pour combattre l’Iran de la révolution islamique, fermant les yeux quand il s’attaquait à coups de gaz de combat aux populations kurdes du nord de l’Irak. C’est encore ces États qui ont plongé le peuple irakien dans la misère en détruisant toute son économie lors de la guerre du Golfe et en tuant des centaines de milliers de personnes. Enfin, ce sont ces États, particulièrement les États-Unis, qui ont fait le choix de laisser malgré tout Saddam Hussein à la tête de l’Irak, car il sert de prétexte au stationnement de troupes américaines dans cette région du Golfe persique, si riche en pétrole.
C’est clair : il n’y a pas que le pouvoir irakien qui opprime les populations d’Irak. En leur refusant aujourd’hui par l’embargo le droit à la reconstruction de leur économie et le droit de vivre dignement, les États occidentaux ont une responsabilité politique dans l’état de ces populations.
De fait, il nous est impossible de dissocier politique et économie et donc de séparer celles et ceux qui émigrent pour des raisons économiques et/ou pour des raisons politiques. Au-delà d’une dénonciation de la manière lamentable dont est appliquée aujourd’hui la Convention de Genève, nous militons avec force pour la libre circulation des personnes et aussi pour leur libre installation, sans esquiver toutes les questions passionnantes que cela pose.
Hervé. — groupe FA de Nantes
(1) La Tyrannie du national, Gérard Noiriel, Calmann-Lévy, 1991
« L’autre société » : laboratoire de recherche et d’initiatives sociales
La présence anarchiste et libertaire, avec ses trente ans d’activité, dans le district de Pollino-Sibarite en Calabre, comme centre d’activité la ville de Spezzano Albanese, se devait de faire un saut qualitatif. Nous avions la nécessité de consacrer une partie de notre temps pour investir un secteur où, jusqu’à aujourd’hui, il nous a été impossible d’être constamment présents : la culture.
Jusque là, les militants les plus actifs n’ont pas eu le temps de s’investir dans ce domaine, car toute leur énergie a été prise par leurs activités sur le territoire et l’activité anarchiste spécifique. Toutefois, l’exigence était encore là. Aujourd’hui, où l’organisation sur le territoire s’est développée, qu’il y a plus de personnes qui s’investissent et que la FMB est devenue une expression du district, cette exigence se concrétise. Nous avons donc créé une association culturelle, « l’autre société », laboratoire communaliste de recherche et d’initiatives sociales. Le choix du nom explique l’intention culturelle que l’association se donne. Elle veut valoriser la diversité des expériences et des parcours anarchistes et libertaires, sur la base du fond commun qui les lie : la réalisation d’une société différente (une société non hiérarchique et non autoritaire), société qui commence à fonctionner au niveau municipal. Aujourd’hui, la commune est le reflet de la société hiérarchique, car soumise à l’organisation pyramidale des États. Toutefois, elle pourrait être demain la structure de base de notre société, si elle arrive à s’autogouverner et à créer un réseau solidaire, fédéraliste libertaire.
Que voulons-nous faire ?
L’association, comme on peut le lire dans ses statuts, veut agir sur le territoire pour élaborer et diffuser la pensée et les pratiques du fédéralisme libertaire d’hier et d’aujourd’hui. Elle veut promouvoir tout ce qui a comme but l’émancipation individuelle et sociale. Elle veut être un centre de rencontre ouvert à toutes les collectivités. Celle-ci, cohérente avec ses valeurs de liberté, d’égalité et de solidarité, est consciente que la diversité des expériences et des parcours représente une richesse collective que nous devons valoriser. Ce qui implique :
– pratiquer la fraternité et la solidarité avec toute initiative qui tend à l’émancipation sociale ;
– agir pour promouvoir des échanges d’idées et de pratiques qui tendent vers le développement d’une culture antiautoritaire, communaliste, autogestionnaire, fédéraliste et internationaliste ;
– créer des bibliothèques, éditer et distribuer livres, brochures, journaux ;
– produire, même en collaboration avec d’autres, disques, cassettes audio et vidéo, films ;
– organiser des spectacles (théâtre, concerts, projections cinématographiques et vidéo), des fêtes, des expositions, des débats, etc ;
– acquérir du matériel informatique.
Tout cela doit permettre à l’association de financer ses activités culturelles et sociales.
L’adhésion à l’association est ouverte à tous ceux qui sont en accord avec les statuts. Nous espérons pouvoir ouvrir des locaux associatifs dans différents lieux, en Italie ou ailleurs, et collaborer avec d’autres lieux associatifs.
Nos initiatives sont donc variées. La volonté ne nous manque pas.
Tout sera plus facile si nous trouvons solidarité et adhésions.
Avec tous ceux qui partagent nos vues, on pourra faire vivre des idées, des réalités.
On peut nous aider en envoyant du matériel : livres, brochures, journaux et tout ce qui peut être utile pour les activités que l’association envisage.
Le projet du portail Internet
De notre côté, nous faisons tout notre possible pour réaliser tout de suite une partie de nos projets. Nous avons déjà deux adresses Internet : anarchista.org et comunalista.org. Notre but est d’arriver au plus vite à doter l’association de deux portails Internet spécifiques avec les adresses mentionnées.
Avec anarchista.org, nous voulons permettre aux organisations, groupes spécifiques, journaux de se connecter avec des adresses déjà existantes ou que nous enregistrerons.
Avec comunalista.org, nous voulons créer un portail pour les organisations anarcho-syndicalistes, syndicalistes et territoriales de base.
L’autre idée est celle d’ouvrir, à l’intérieur de chacune de ces adresses spécifiques, deux listes de discussion : l’une avec un seul thème réservée aux participants au débat, l’autre avec plusieurs thèmes ouverte à tous ceux qui le veulent pour offrir la possibilité d’un réel débat en direct.
Tous ceux qui sont intéressés par nos projets peuvent avoir plus d’informations en écrivant à « la società altra » CP 7 87019 Spezzano Albanese (CS) Italie.
La società altra
Gérons la ville nous-même !
Quelles alternatives à une citoyenneté passive ? Qu’est ce que le communalisme libertaire ?
Des pratiques alternatives autogestionnaires se mettent en place dans la commune en matière de transport, de culture, d’éducation, de participation à la gestion municipale. C’est de cela et de bien d’autres choses encore que nous vous invitons à partager, à discuter, à réfléchir, à élaborer dans les villes suivantes :
Nice : 1er mars à 20 h « Aux diables bleus » ex-caserne Saint-Jean d’Angely, Bd des Diables Bleus.
Toulon : 2 mars à 18 h au Café-lecture 17 rue d’Antrechaus
La Rochelle : 2 mars à 20 h 30, salle Émile-Combes, 40 rue Pépinière.
Quimper : 2 mars, 20 h 30, intervenant : J-P Tertrais.
Lille : 3 mars, 15 h au CCL, 4 rue de Colmar avec D. Lestrat.
Lannion : 3 mars, 15 h, Centre Jean-Savidan avec J-P Tertrais et Thyde Rosell.
Marseille : 3 mars à 19 h à L’huilerie occupée 95 rue du commandant Mages (1er).
Rouen : 8 mars, 20 h30 à la Halle aux Toiles (salle 3) avec D Lestrat.
Nantes : 9 mars, 20 h 30, 17, rue Paul-Bellamy (avec la participation de personnes du SCALP sur les luttes pour les transports gratuits et d’un animateur d’une expérience de jardin autogéré à Couëron). Intervenants : J-P Tertrais et D Lestrat.
Rennes : 10 mars, entre 15 h et 19 h, Maison de quartier de Villejean. avec J-P Tertrais, D. Lestrat et W Rosell.
Strasbourg : mercredi 21 mars à 20 h à la Maison des Associations (rue des orphelins) avec D. Lestrat.
Metz : jeudi 22 mars 20 h à la salle Robert-Ochs à Metz avec D. Lestrat.
Le communalisme libertaire en acte !
Des pratiques communalistes autogestionnaires existent en Italie : nous avons invité Dominico pour qu’il nous présente les travaux de la fédération municipale de base à Spezzano albanese ainsi que les foires à l’autogestion qui regroupent régulièrement un ensemble d’espaces autogestionnaires. Quelle est l’implication des anarchistes dans ces initiatives ? Quels intérêts ont-elles pour les anarchistes ?
Lyon : samedi 3 mars à 14 h 30 salle Latreille, 23, rue de Bourgogne, 9e.
Avignon : dimanche 4 mars à 16 heures sur la péniche Dolphin blues (le Piot).
Clermont-Ferrand : lundi 5 mars à 20 heures à l’ancien lycée Blaise-Pascal.
Grenoble : mardi 6 mars à 20 h 30 au 102 rue D’Alembert.
Chambéry : mercredi 7 mars à 20 h à la Maison des associations, 67 rue Saint François de Sales.
Chalon-sur-Saône : jeudi 8 mars à 20 heures Maison des syndicats.
Besançon : vendredi 9 mars à 20 heures à la librairie L’Autodidacte, 5 rue Marulaz.
Dijon : samedi 10 mars à 18 heures aux Tanneries, 15 bd de Chicago.
Paris : dimanche 11 mars, de 14 h à 18 h à l’AGECA (177, rue de Charonne, 11e).
Toulouse : 100 % magouilles
Presque partout, les élections municipales déchaînent les ambitions si ce n’est, les passions. Les sondages se succèdent, la ville rose n’y échappe pas, d’autant plus qu’ici les électeurs ont la particularité de voter à droite aux municipales et à gauche aux autres scrutins. Ce qui a d’ailleurs découragé les volontés de parachutage d’une « pointure » du PS style Ségolène Royal. Du coup, le PS a choisi un local pour cette épreuve, François Simon, de la tendance minoritaire Gauche socialiste, un des deux socialistes présents aux manifs des sans-papiers. De là à supposer que les présidents socialistes du Conseil régional et du Conseil général préfèrent un maire de Toulouse de droite plutôt que d’envisager de partager leurs pouvoirs avec un autre élu PS. Avant de s’installer à la présidence du Conseil supérieur de l’audiovisuel, l’ancien maire et journaliste télé, Dominique Baudis, a adoubé son successeur Douste-Blazy, actuel maire de Lourdes, qui affronte donc une liste gauche plurielle (PS, PC, MDC, Radicaux de gauche). Les Verts ont décidé de se compter le 11 mars et ont désigné une tête de liste, par ailleurs favorable à l’unité dès le premier tour.
L’extrême droite se présente sous les deux couleurs du FN et du MNR, cette compétition interne doit jouer sur le caractère agressif de leurs affiliés : accrochages avec les militants d’extrême gauche et anars, bombages de locaux, menaces de mort etc. Comme dans tous les grosses villes, Lutte ouvrière se présente, mais là sans grand enthousiasme. Ce serait somme toute banal sans le phénomène Zebda.
La mayonnaise Zebda
Avec le soutien du groupe musical Zebda, une liste alternative s’est créée : la liste Motivé-es (tête de liste Salah Amokrane). Elle atteindrait 12 à 14 % des voix selon les derniers sondages. La bande dite Zebda issue des quartiers Nord de Toulouse, après avoir milité dans le secteur associatif (Vitécri), s’est lancée dans le politique en créant en 1997, le collectif TackiKollectif. Pour se financer avec l’aide de la LCR (qui a avancé 100 000 FF ou 50 000 FF suivant les sources), ils ont sorti le disque « Motivés ».
Dès le milieu de l’année 2000, des tractations se sont déroulées entre TackiKollectif, la LCR et certains privilégiés de la scène contestataire toulousaine pour présenter une liste alternative 100 % motivé-es, 100 % comme « 100 % à gauche » (cache-sexe national de la LCR, ça fait moins radical !) et le « Motivés » du disque. Mais cette alchimie s’est effondrée en septembre . Bien formé dans leur jeunesse par la LCR, TackiKollectif a abandonné le 100 % et a lancé la liste Motivé-es présentée comme « à gauche de la gauche mais pas à l’extrême gauche ». Dans Rouge, la LCR fâchée qualifiera la liste Zebda de « démarche citoyenne aux contours politiques flous ».
Et ces sondages ?
Ils se succèdent, parfois contradictoires, avec un échantillonnage restreint de 500 à 600 personnes. Pour le second tour, la droite et la gauche sont dans un mouchoir de poche, de l’ordre de 53 % contre 47 %. Tout se jouera avec le report des voix de l’extrême droite (MNR-FN autour de 7 %) et de « la gauche de la gauche ». On peut sourire sur la réalité de ces sondages ou sur la « conscience politique » des sondés puisque dans un de ces sondages : 25 % des partisans de Motivés envisagent de voter à droite le 18 mars et 35 % des votants de 100 % à gauche-LCR (4 % de vote au premier tour) adoptent ce même choix ! Mais peut-être s’agit-il d’anciens PC adeptes du vote révolutionnaire en faveur de la droite, une spécialité toulousaine (voir le livre et le documentaire « Mémoires d’Ex »). Sur la foi de ces sondages et sans peur du ridicule, la LCR se félicite que l’extrême gauche fasse 15 à 16 % des voix à Toulouse en additionnant LO, LCR, Motivé-es.
La chasse aux candidats
Le plus difficile pour toutes ces listes a été de trouver des « futurs élus ». Chaque liste doit présenter 69 candidats avec une parité homme-femme assurée par groupe de six. La chasse aux acteurs de la vie civile, des secteurs associatifs, culturels et syndicaux a donc été ouverte. La droite a réussi à récupérer dans ce berceau du ballon ovale un puis deux rugbyman.
Pour le PS un gérant de salle de spectacle où les listes Motivé-es et LCR font leurs meetings et leurs fêtes. La LCR a trouvé une tête de liste « présentable » avec Aline Pailler, ancienne animatrice télé et ancienne député européenne apparentée PC.
Le comité de quartier Arnaud Bernard a vu son président débauché par Motivé-es à la stupeur de Claude Sicre des Fabulous trobadors.
Pour remplir cette liste, proclamée sans affiliation politique, le petit monde libertoïde a été sollicité, certains ont répondu présents. Comme quoi le cœur et la raison ne font pas bon ménage. Que vont-ils faire dans cette galère électoraliste ? Mystère, recherche de reconnaissance sociale sous prétexte d’efficacité ? Ce dans l’attente d’un hypothétique troisième tour. Un troisième tour emblématique, car pour la liste motivé-es, second tour sont mots tabous : entre ceux qui veulent des places (à négocier ou pas), ceux qui veulent voter utile au second tour, règne un flou, disons artistique.
Tout cela serait drôle si cette pêche aux candidats ne fragilisait, ne fragmentait pas ce même secteur associatif culturel et syndical, l’instrumentalisant et le privant de jouer un vrai rôle de « contre-pouvoir ».
La tarte à la crème de la démocratie participative !
Si l’adjectif durable fait partie de la panoplie des Verts, si le terme citoyen fait partie du kit ATTAC, la démocratie participative est inscrite dans les programmes de la gauche à l’extrême gauche sauf LO bien sûr, pour qui rien ne vaut le bon vieux centralisme démocratique, qui a fait ses preuves.
Cette démocratie participative pour tous ces politiciens peux se résumer par cette phrase de Salah Amokrane (Motivé-es) : « Ceux qui ont les vraies compétences doivent être associés aux décisions ». Si ce n’est pas là « technocratie du social et de la culture », c’est bien imité !
Derrière l’étendard des listes dites alternatives, il ne s’agit nullement d’un vote de protestation style Coluche, ou d’en finir avec les politiciens et avec la délégation de pouvoir mais bien de faire émarger d’autres visages de politiciens, de rajeunir la politique.
Sous Napoléon III, il y a plus de cent quarante ans, les candidatures ouvrières aux élections devaient aussi révolutionner la société, la critique effectuée à l’époque par Proudhon dans De la capacité politique des classes ouvrières reste toujours d’actualité.
Pour résumer tout ceci comme le soulignait l’hebdo Tout Toulouse évoquant notre dernière conférence-débat « Il n’y a guère que les anarchistes pour se moquer de tout çà, “Ni dieu ni Maire” proclament-ils… et “il faut agir au lieu d’Élire” ! »
Jimma. — groupe Albert-Camus (Toulouse)
Communiqué du Collectif d’information et réflexion cannabiques
Dimanche 18 février, lors de l’inauguration du salon de l’agriculture, la police est intervenue à 19 h 30, après la fermeture du salon, sur le stand de mamaeditions.com. Elle s’est emparée de la totalité des plans de chanvre légal qui devaient y être vendus, et d’un millier d’exemplaires du livre « Pourquoi et comment cultiver du chanvre » de Michka, jean-Claude David, Bernard Rappaz et Jorge Cervantes.
Michka s’est fait interpeller sur le stand et embarquer au 36 Quai des Orfèvres, à la brigade des stupéfiants de Paris. Elle n’a été relâchée qu’à une heure du matin.
La police est intervenue au motif que la feuille de chanvre représentée sur la couverture des livres saisis tomberait sous le coup de l’article L.630 du Code de la santé publique et constituerait une incitation à l’usage de stupéfiants.
Sur le même stand Bernard Rappaz, chanvrier suisse, s’est vu bloquer sa marchandise à la frontière franco-suisse, jeudi 15. Il s’agit de produits de chanvre légal obtenus à partir de semences légalement acquises et produites en France.
Pourtant, fin 2000, la Commission européenne se prononçait sur cette question en priant la Grèce « d’abolir les restrictions aux importations d’un certain nombre de marchandises […] qui portent un logo représentant une feuille de cannabis ou qui contiennent du chanvre. »
Samedi 17, au salon Primevère, à Lyon, le même article L.630 du Code de la santé publique a été invoqué par la gendarmerie pour saisir des affiches sur un stand du CIRC.
Ainsi, le L.630, déjà utilisé pour museler les tenants d’une libéralisation des lois réprimant le cannabis, sert maintenant à entraver le commerce des produits légaux à base de chanvre (non psychotropes).
À cette occasion, nous, soussignés mamaeditions.com, Association française pour la réduction des risques, Éditions du Lézard, les Verts, Réseau Voltaire, la Fédération des CIRC, éditions Trouble fête, la Chanvrette, LS Distribution, Val Chanvre, Cannabou, Chanvre et Cie, rappelons notre position, demandant l’abrogation de l’article L.630 du Code de la Santé publique qui porte atteinte à la liberté d’expression.
Fédération des CIRC
Fait d’hiver
Quand on connaît la fin… On comprend mieux le début !
Joschka Fisher, le très honorable et très réaliste ministre verdâtre d’outre Rhin, a-t-il été, quand il était jeune, dans les années soixante dix, un affreux gauchiste terroriste tueur de flics ? Bien sûr que non !
Joschka Fisher était juste jeune. Rebelle. Branleur. Et quand il tchatchait révolution, c’était juste parce que c’était l’air du temps et comme tous les généraux il n’est jamais allé au-delà du « armons-nous et partez ».
Daniel Cohn-Bendit, le très honorable et très réaliste député européen verdâtre, a-t-il été, quand il était jeune, dans les années soixante dix, un affreux pédophile amateur de touche pipi avec les enfants ? Bien sûr que non !
Daniel Cohn-Bendit était juste jeune. Rebelle. Branleur. Et quand il tchatchait révolution sexuelle, c’était juste parce que c’était l’air du temps et comme tous les généraux il n’est jamais allé au-delà du « armons-nous et partez ».
Serge July, le gros gomineux adipeux qui sévit aujourd’hui à la direction de Libé, après se l’être joué petit timonier du prolétariat et avoir écrit Vers la guerre civile (rien que ca !) ; la bande à ultra-gauche qui cantine aujourd’hui dans le polar après avoir fleurté avec le révisionnisme et la pédophilie ; Cécile N., qui se présente aujourd’hui sur une liste de droite après avoir réclamé la mort de l’école Bonaventure au motif qu’elle n’était pas assez libertaire…, sont de cette même cohorte d’ex-jeunes rebelles branleurs.
Pour avoir eut vingt ans en 1968 et continuer à croire en une révolution sociale qui ne soit ni de guerre civile ni d’assassinats de flics à la petite semaine, en une révolution sexuelle qui refuse la pédophilie, en une bonne aventure posant le courage des actes…, on voudra bien me pardonner, moi, qui, pour cela, m’en suis pris plein la tronche par ces gens là au motif que je n’étais assez radical, d’intervenir comme simple témoin d’immoralité dans l’injuste procès en révolution qui leur est intenté, aujourd’hui, par leurs frères et sœurs d’armes en… lamentable !
Hier, aujourd’hui, l’histoire ne sera jamais assez cruelle pour ces petits bourgeois de merde !
Jean-Marc Raynaud
Boat-people : un exode à paramètres internationaux
Si l’on avait des choses à retenir du naufrage de l’East-sea, témoignage du trafic humain, cela peut être la solidarité qui, trop rarement, peut se mettre en branle devant certaines situations. Ce serait, malgré l’habitude, l’hypocrisie des politiques. Jacques Chirac, choqué, qui dénonce « la plus totale absence de scrupule de ceux qui font commerce de la misère d’autrui ». Et la délocalisation des entreprises dans les pays à main-d’œuvre bon marché ? Et les politiques de création de contrats précaires subventionnés par l’État, véritables cadeaux au patronat ? C’est pas faire son commerce sur la misère… M. le président !
L’hypocrisie tient de l’insulte. Bernard Kouchner : « nous devons […] continuer à faire la différence entre les réfugiés politiques et les migrants qui ne risquent, en rentrant chez eux, que de reprendre leur vie misérable. J’ai bien sûr honte de dire cela… », mais nous aussi. Un migrant économique n’est il pas une victime des politiques économiques mondiales que vous, entre autres, mettez en place et dont vous profitez ?
Un gouvernement qui n’attribue un sauf-conduit (pour éviter les multiples procédures judiciaires) qu’aux « kurdes-irakiens », les deux Palestiniens du bateau n’ayant pas d’autorisation d’entrée car c’est bien connu, un Palestinien n’est pas persécuté… On s’émeut du sort de ceux-là, alors qu’à Montpellier, 18 sans-papiers kurdes sont obligés de faire une grève de la faim pour l’obtention du statut de réfugié. Aujourd’hui, c’est la gauche qui refuse des papiers, et c’est la droite qui réclame l’accueil. La magie du pouvoir et de ses valses !
Enfin, et surtout, c’est ce trafic humain, conséquence funeste, comme tant d’autres, d’un système capitaliste.
Qui est derrière ce trafic ?
Le « boat-people » est parti du port turc Iskenderu. Les mafias turques sont montrées du doigt, et c’est effectivement elles qui supervisent ce trafic humain. La Turquie est la porte d’entrée de l’Europe tant pour les immigrés (d’Asie mais aussi d’Afrique) que pour les drogues dures, et dans le sens inverse, voie pour le trafic d’armes à destination des minorités ou groupes en lutte armées dans le Caucase et ailleurs. Mais la mafia turque a des liens étroits avec le système « officiel » : police et politique. elle soutient financièrement ces milices fascistes qui éliminent les opposants politiques et terrorisent des régions kurdes, avec une couverture politique. En novembre 1996, à Susurluk (Anatolie), on découvrait dans une voiture accidentée un député du parti dirigeant le gouvernement de l’époque, un responsable de la police locale et un mafieux notoire, recherché par Interpol et accessoirement membre d’une milice fasciste. Peut-on raisonnablement imaginer qu’un millier d’immigrés montent à bord d’un bateau sans la complicité des autorités locales ? Un trafic drainant plusieurs dizaines de milliers de personnes par an peut-il vraiment exister sans des complicités haut placées ?
Alors, qu’aurait à gagner l’État turc, mais également l’État irakien, dans ce trafic ? De l’argent, c’est indéniable ; l’État turc, en particulier, est notoirement corrompu, quand à l’État irakien, il trouve là un des seuls moyens pour lui de faire rentrer des devises étrangères. De plus, pour réduire au silence une population vindicative, les Kurdes, il y a deux moyens : la répression, et les deux États ont déjà fait preuve de leur performance en la matière ; ou la déportation massive, ce à quoi s’emploient les différents États de la région (Syrie et Iran compris).
L’exode kurde : conséquence de la misère économique
La fuite forcée des Kurdes vers l’Ouest est ancienne, les déplacements de population sont une pratique étatique ancienne (un million d’Arméniens déportés en 1915 par le gouvernement ottoman). À la fin des années 80, le gouvernement turc met en place la politique de « l’infall », pratique de la terre brûlée en zone kurde où sévissait le PKK (parti des travailleurs du Kurdistan), pour briser sa logistique civile : près de 3 000 villages sont détruits, 3 millions de Kurdes sont déplacés, dont une partie vient grossir les banlieues des villes de l’Ouest, à la porte de l’Europe. En mars 1991, les armées de Saddam Hussein interviennent au Kurdistan irakien pour mater la rébellion qui, suite à la guerre du Golfe, croit son heure arrivée.
Deux millions de Kurdes fuient, une partie d’entre eux passe en Turquie. Déjà, en 1988, alors que l’aviation irakienne bombardait à l’arme chimique les villages kurdes, 60 000 d’entre eux avaient suivi ce chemin. Cette migration Est-Ouest s’organise différemment à la fin des années 90 avec les filières clandestines sous contrôle des mafias, et des États, dont la Turquie. En 1998, alors que l’Italie, à la colère d’Ankara, accueille le leader du PKK, Abdullah Ocalan, des nombreux boat-people kurdes sont lâchés sur les côtes italiennes. Les réfugiés deviennent un moyen de pression politique. Aujourd’hui, ce boat-people serait-il un « cadeau » de la part de l’État turc, vexé suite à la reconnaissance par l’Assemblée nationale, début février, du génocide arménien ?
Mais les responsabilités de cet exode ne sont pas à chercher que des seuls côtés turc et irakien. Cet exode est aussi une des conséquences de la misère économique qui frappe la population irakienne depuis la mise en place de l’embargo, cet embargo qui fabrique ces « migrants économiques ». Si les occidentaux « protègent » encore militairement la région autonome du Kurdistan irakien, ce n’est que pour affaiblir l’Irak. L’idée de créer un État kurde a déjà été écartée, car ayant entraîner une levée de bouclier et une union paradoxale des Syrie, Turquie et Iran, car facteur de déstabilisation d’un équilibre imposé par les puissances européennes au lendemain de la première guerre mondiale.
Et demain ?
Les réfugiés débarqués en France vont se confronter à la dure législation, et l’émotion médiatique, les oubliera jusqu’au prochain « boat-people », car pourquoi cela s’arrêterait-il ? Il faut supprimer l’embargo, et arrêter toute ingérence (militaire, politique…) des puissances occidentales dans la vie politique du Moyen-Orient ; la libération économique et politique des peuples et la reconnaissance des droits de minorités doit venir de la lutte de ces peuples eux-mêmes. L’interventionnisme occidental n’est là que pour continuer à imposer notre domination, notre logique sociale et capitaliste, sans tenir compte de leur culture, de leur logique propre. Nous pouvons apporter notre solidarité contre la répression étatique dans ces pays, comme à celle de la lutte pour la reconnaissance de l’objection de conscience en Turquie (ML nº 1207) et à la diffusion des analyses d’anarchistes kurdes qui démontrent les travers des luttes de libération nationale ; en manifestant cette solidarité à ces exilés (comme l’occupation par les sans-papiers de la permanence de Delanoe le 22 février), en revendiquant l’abolition des frontières et la libre circulation totale.
Dernièrement, ont été découvertes en Asie centrale, de riches ressources souterraines, les puissances capitalistes s’y affairent déjà. Cette zone, turcophone, verra s’affronter intérêts chinois, russes, occidentaux, et donc turcs, c’est ainsi que, pour affaiblir la Turquie, certains trouveront peut-être un soudain attachement au sort des populations kurdes et autres minorités. Les logiques capitalistes et d’État se gardent bien d’une quelconque cohérence !
No ! (Groupe libertaire de Tours)
(1) Par des associations (CIMADE, GISTI…) pour « zones d’attentes » illégales, non-reconnaissance de leur entrée sur le territoire français…
(2) Alors que même la Ligue des Droits de l’Homme connaît le fonctionnement précis de certaines filières. Libération (19 février) donnait le chiffre de 500 000 clandestins pénétrant en Europe chaque année.
(3) In La Question kurde, E. Picard, Ed. Complexes, 1991.
(4) Voir analyse en première page, in Droit d’asile : une approche collective est nécessaire.
Putain cinq ans…
La 7e chambre du Tribunal Correctionnel de Marseille a condamné jeudi dernier les militants antifascistes qui avaient, sous le nom de FTP, revendiqué 11 attentats matériels contre des locaux du Front national et du MNR. Les juges ont suivi à la lettre le réquisitoire et Yves Peyrat écope de cinq ans fermes et William Ferrari de dix huit mois dont 14 avec sursis, peine couverte par la préventive et ce dernier est ressorti libre de l’audience. Ce jugement extrêmement sévère intervient le lendemain de l’anniversaire de la mort d’Ibrahim Ali, assassiné à 17 ans par des colleurs d’affiche du Front national. Cette peine de cinq ans laisse néanmoins augurer, un statut de conditionnable pour Yves et une sortie possible pour l’été. Mais d’ici là… Par ailleurs les amendes et les dommages et intérêts tournent autour de 700 000 francs dont 85 000 pour la simple mairie de Vitrolles. Les initiatives de solidarité ne vont tarder à se mettre en place et un compte va être prochainement ouvert. Ce jugement est exemplaire à quelques semaines des élections municipales. Malgré la raclée électorale que nous espérons tous, même si cela ne change pas grand chose quant à l’implantation des idées, il demeure la nécessité de la vigilance et de l’action directe. Les militants FTP — un ancien résistant a d’ailleurs déclaré lors du procès que cette appellation était de nos jours parfaitement justifiée — les militants FTP donc, et Yves Peyrat en particulier, ne doivent pas resté isolés. Cette gangrène d’extrême droite doit être combattue sans relâche.
Jipé
Dans la Toile
Anarlivres (http://anarlivres.free.fr), site bibliographique de l’anarchisme, a récemment vu le jour sur Internet. Ses auteurs souhaitent en faire un site de référence des ouvrages anarchistes ou sur l’anarchisme en français. Aujourd’hui une base existe, sans doute incomplète, perfectible, mais qui apporte d’ores et déjà de nombreuses informations. Corriger, enrichir celle-ci profitera à tous. N’hésitez pas à leur écrire pour leur transmettre une information, leur suggérer un lien ou leur indiquer une parution récente ou prochaine.
Le dictionnaire Maitron (http://www.maitron.org/), animé par une équipe du CNRS, se propose de suivre l’actualité de la recherche en histoire sociale et le débat culturel autour des questions sociales en mettant l’accent sur les femmes et les hommes qui font l’histoire. Il reprend ainsi l’esprit du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français créé par Jean Maitron et publié aux éditions de l’Atelier, en accordant une attention particulière à l’action des acteurs connus ou méconnus, aux leaders comme aux « obscurs et sans-grade », aux syndicalistes comme aux intellectuels, à leur place dans l’histoire.
Androzine (http://www.geocities.com/androzine/) est un fanzine anarcho-gay. Tout le monde peut y participer, il suffit d’envoyer une contribution (textes, dessins, infos, critiques musicales…) qui paraîtra dans le prochain numéro.
Vient d’être mise sur la Toile une liste de 300 thèses et mémoires (http://melior.univ-montp3.fr/ra_forum/plus.html) en anglais et en italien relatives à l’anarchisme (les travaux en français sont en cours de recension). Ces travaux appartiennent à une grande variété de domaines, du cinéma à l’histoire, de la littérature à la religion, elles traitent de rhétorique, de philosophie, de sciences politiques et, bien entendu, du mouvement social. Il s’y adjoint souvent un court résumé, généralement extrait de Dissertation Abstracts ou de Dissertation Abstracts International.
Les camarades de l’OSL (Organisation socialiste libertaire) ont maintenant une présence sur le ouaibe (http://www.rebellion.ch/). On peut trouver sur le site de cette organisation suisse méconnue une sélection de textes généraux de leur défunte revue Confrontation, leurs deux manifestes, des textes de leur feuille d’agitation Rébellion et une liste de contact.
À bientôt dans la toile.
Blue Eyed Keyboard
alain@minitelorama. com
Urgence juridique pour Mumia
La gravité de la situation juridique de Mumia : le juge Yohn a le droit de mettre fin au processus d’appels et d’ériger sa décision en jugement définitif. L’un des avocats de la défense de Mumia Abu-Jamal nous apprenait le 29 janvier que la loi pour une peine de mort effective signée par Clinton en 1996 suspend le droit d’appel, pour tout condamné à mort, au-delà de la Cour fédérale de district où se trouve en ce moment le dossier de Mumia.
Autrement dit, si le juge fédéral Yohn devait arriver à une décision négative (refus d’entendre les témoins prêts à dénoncer leur subornation, refus d’une révision de procès, maintien de la peine de mort ou commutation en perpétuité, etc.), Mumia serait obligé de faire une demande d’« un certificat de capacité d’appelé » lequel est loin d’être automatique pour avoir le droit de demander à la Haute cour fédérale (dite « Third Circuit Court ») de casser le jugement de Yohn.
On pourra mesurer la gravité de cet état de choses aux faits suivants :
• Le juge Yohn a été nommé par Bush père ;
• Yohn doit à Mumia une comparution en audience depuis fin juin 2000, mais a fait traîner les choses de sorte que l’audience aura maintenant forcément lieu sous Bush.
Procès truqué
Entre temps, dès juillet, Yohn a rejeté en bloc quatre pétitions dites « amici curiae », prouvant, entre autre, que l’avocat commis d’office, le procureur et le juge Sabo, eurent à l’époque du procès originel il y a 19 ans, au moins une réunion à huis clos pour mettre au point une stratégie juridique au détriment de Mumia. Un tel rejet par un juge fédéral a été considéré comme un geste juridiquement presque sans précédent et, en tous cas, très agressif.
La Haute cour fédérale, plus conservatrice encore, arrêta début août 2000 que la demande de Mumia à savoir que les révélations des amici curiae fussent versées au dossier serait déboutée, donnant ainsi raison au juge Yohn.
Le 1er août 2000, lors de la Convention républicaine à Philadelphie, de nombreuses sources confirment que Bush a invité à la tribune ce jour là, la veuve du policier Faulkner dont on a fait porter à Mumia la responsabilité de la mort. Le 10 janvier 2001, quelques jours avant de passer les rênes à l’administration de Bush, Janet Reno a fait savoir à une délégation de syndicalistes et de personnalités internationales qu’elle refusait définitivement d’ouvrir une enquête autour des violations des droits constitutionnels de Mumia. Geste que l’on peut comparer au refus par Clinton d’accorder une clémence fédérale à Leonard Peltier avant de quitter la Maison Blanche.
Quelques jours avant son intronisation, Bush a tenu à réunir dans son ranch 18 de ses gouverneurs favoris au premier rang desquels se trouvait le gouverneur Ridge de Pennsylvanie, zélé de la peine de mort, responsable des deux premiers mandats d’exécution de Mumia. Bush a tenu à les rassurer : les droits des États, déjà renforcés de par la loi pour une peine de mort effective, retrouveraient faveur à ses yeux au détriment du pouvoir fédéral. Or, selon la clause de la loi pour une peine de mort effective dont on vient de nous faire part : tout peut s’arrêter juridiquement pour Mumia avec le juge Yohn, qui peut demander à la Haute cour fédérale d’opposer une fin de non-recevoir à Mumia qu’il ait un « certificat de capacité » ou pas.
Quant à la Cour suprême des États-Unis, on a vu au cours des élections américaines de quoi elle était faite.
Organiser la mobilisation
En tant que militants, nous devons réagir au quart de tour au cul-de-sac juridique où risque de se trouver Mumia dans un avenir très proche. Le Collectif national américain a donc décidé de travailler à une mobilisation en lame de fond devant se focaliser sur Philadelphie au cours de l’audience dont le juge, justement pour décourager la mobilisation, n’a pas encore donné la date. Légalement, Yohn qui n’est pas tenu de donner à la défense un temps de préparation pour l’audience, peut en annoncer la date à n’importe quel moment avec un préavis de trois jours ou trois semaines ou même plus, sans crier gare.
Il est clair que nous devons être fin prêts pour faire de cette date juridique à Philadelphie un rendez-vous militant d’une ampleur sans précédent, porteur d’un message cristallisant deux décennies d’opposition à l’exécution de Mumia et exigeant sa libération.
La salle du tribunal sera petite : 50 places dont 25 seront occupées par la famille du policier et l’Ordre Fraternel de la Police (OFP), syndicat policier de droite avec des relais à l’extrême droite.
Nous commençons dès maintenant à dresser une liste de personnalités, d’élus et de représentants d’associations et d’ONG qui seront prêts à s’engager et à faire le voyage à Philadelphie (même avec trois jours de préavis) afin de former une délégation d’observateurs internationaux à l’intérieur du tribunal.
Si des militants s’engagent à faire le voyage, qu’ils prennent contact avec le COSIMAPP, soit par e-mail, par fax ou par téléphone (Tel/fax : 01 45 79 88 44) , soit lors du rassemblement hebdomadaire à la Concorde. L’objectif est d’encercler le tribunal le jour J et peut-être le jour suivant. Ceux qui ne voyagent pas peuvent aussi soutenir par des dons cette initiative (aller-retour Paris/NewYork à 1 450 FF).
Agir partout contre la peine de mort
Une campagne de saturation des médias devra commencer dès maintenant, des deux côtés de l’Atlantique, pour créer un climat d’expectative autour du jour J et pour expliquer que si Mumia est arrivé en bout de course juridique, tout est encore possible du point de vue du rapport de forces, surtout en amont d’une décision du juge Yohn. Le message de cette mobilisation : le monde regarde, reste vigilant et empêchera coûte que coûte l’exécution de Mumia. L’un des thèmes de la campagne de presse peut tourner autour des pressions que l’OFP exercerait d’ores et déjà sur Yohn, de même que le FBI a fait un lobby auprès de Clinton contre Peltier.
Un troisième pan de cette mobilisation s’orientera vers des initiatives de désobéissance civile autour de personnalités ayant préalablement accepté le risque d’arrestation (ce fut le cas d’Angela Davis, l’ex-maire de New York, David Dinkins et Dennis Brutus, l’ex-codétenu de Mandela en 1999).
Ceux qui, aux États-Unis et dans le monde, ne pourront être à Philadelphie le jour J mais qui souhaitent d’ores et déjà préparer des initiatives solidaires, mais sur place, dans leurs propres villes, peuvent envisager des manifestations de 24 heures (8 h à 20 h ou 12 h à 0 h) pour les collectifs, devant les consulats, ambassades ou autres sites symboliques du pouvoir américain.
On pourra envisager des débrayages (ce fut fait en France pour Angela Davis) ; des grèves tournantes ; des journées « mortes » dans les facs et les lycées ; des marathons sur la peine de mort et Mumia sur les radios et plateaux télés, etc. ; des collages d’affiches lançant le message de l’urgence, etc.
Comité de soutien international à Mumia Abu Jamal et aux prisonniers politiques aux États-Unis (COSIMAPP)
Vite fait… Bien fait
* Champion d’Europe. La France est le pays qui réalise le plus grand nombre d’expériences de culture transgénique en Europe. Sur un total de 1 504 expériences autorisées par l’UE, 458 le sont dans l’hexagone. Deuxième, loin derrière, l’Italie, avec 250 cultures en plein champ.
* Démocratie locale = usurpation totale. Selon Roselyne Bachelot (députée RPR), les conseils municipaux seraient autant de monarchies municipales ne laissant aucune place ou presque au débat citoyen et à la démocratie. Si c’est elle qui le dit…
* Constatant le refus persistant du ministre de la Fonction publique de rouvrir des négociations salariales, les syndicats de fonctionnaires appellent les personnels de la fonction publique à une nouvelle journée nationale de grève et de manifestation le jeudi 22 mars. On soutient et on y va.
* Épidémie de vache folle. L’agence de sécurité alimentaire préconise d’étendre le principe de précaution aux abats d’ovin et de caprin. Ce qui évitera au moins ce qui s’est passé avec le sida, à savoir de continuer à contaminer des personnes avec du sang infecté tant qu’on était pas bien sûr que le VIH pouvait se transmettre par transfusion… et même après parce qu’il fallait bien écouler les stocks.
* Pour Chirac, cet avis de l’agence de sécurité alimentaire est un acte irresponsable. Et question irresponsable, il est vrai qu’il en connaît un rayon…
* Selon une confidence d’une personne attachée au cabinet de Jack Lang, le gouvernement travaillerait sur un projet de
privatisation de France 2. Ben moi qui croyait, vu les programmes, qu’elle était déjà privatisée.
* Le groupe L’Oréal a réalisé un bénéfice net de 1,03 milliards d’euros en 2000, soit + 24,2 % par rapport à l’année précédente. Ce qui devrait mettre un peu de beurre dans les épinards à la propriétaire de ce groupe, Liliane Bettencourt, dont la fortune est estimée à 13,9 milliards de dollars.
* Désenchantement. Selon Pascal Lamy (commission européenne) qui s’exprimait dans un débat à l’Université libre de Berlin, pour beaucoup aujourd’hui, l’Union européenne n’est pas là pour réguler le système économique et défendre une certaine justice sociale. Pour beaucoup, elle n’est qu’un instrument fait pour faire progresser toujours et encore la mondialisation du capitalisme.
* L’évêque de Bayeux, supérieur de l’abbé Bissey qui a été condamné en octobre dernier à 18 ans de prison pour pédophilie, vient d’être inculpé de non dénonciation. Et là faut bien le dire, c’est…
Envoyez vos brèves à monsieur.pol@wanadoo.fr
Guyane : le monde de l’éducation de nouveau en effervescence !
De nouveau en Guyane le drapeau noir flotte sur la marmite entre les enseignants du SNUIPP, de la SE UNSA Éducation et le recteur depuis maintenant plus d’un mois. Quasiment 80 % des écoles primaires de Guyane sont fermées et les enfants en profitent pour goûter une liberté bien méritée quand on sait les pratiques pédagogiques ancestrales (sévices corporels…) exercées par certains maîtres d’école malheureusement soutenues par les parents d’élèves si ce n’est exigées par ceux-ci. Bref, la grève a démarré d’abord sur St-Laurent-du-Maroni sous-préfecture de Guyane et sur les communes du fleuve Maroni extrêmement touchées par des conditions de travail pour les enseignants inacceptables (locaux insalubres, aucun matériel scolaire, écoles isolées de tous moyens de communication mettant en danger la vie des enfants), des transports scolaires archaïques et la non scolarisation de plus de 8 000 enfants due à un manque de près de 600 postes exigés par les grévistes. L’intéressant dans cette grève pour nous militants libertaires aura été la démarche par ces syndicats d’une plainte contre l’État, qu’ils ont qualifié de « hors la loi » pour non respect de l’obligation scolaire, mettant l’État français (signataire de la charte des droits de l’enfant) face à ces incohérences et démontrant ainsi son système colonial dans les DOM.
Le système scolaire : antichambre de l’exclusion sociale
À la veille des élections, les élus locaux, également sollicités par les grévistes, en ont profité pour se redorer le blason et mener campagne alors qu’ils sont complices et acteurs depuis de nombreuses années de ce que dénoncent les grévistes. Quant à la FCPE, elle les a accusés de gens irresponsables et se retrouve bien entendu à la table des négociations avec le recteur qui s’appuie sur eux. Le STEG UTG (syndicat dit indépendantiste mais surtout ultra-nationaliste), quant à lui, vient d’imploser car la base voulait rejoindre les grévistes et l’avait annoncé aux médias le matin du 22 février. Le soir même, le bureau « stalinien » du même syndicat faisait une conférence de presse annonçant qu’il avait seul le pouvoir de décision et dénonçant le mouvement de grève actuel !
De source interne nous avons su qu’une assemblée générale avait été refusée à la base la veille… et deux jours avant nous nous faisions copieusement insulter en pleine rue par la secrétaire générale de ce syndicat. À la date du 24 janvier 2001, l’AG des grévistes a décidé de poursuivre la grève car les renforts annoncés ne sont pas réellement ceux attendus par les syndicats et ne prendraient forme que pour les rentrées 2002-2003 et que seul le ministre aurait pouvoir de signature pour la création de ces postes. Nous, nous étions au meeting du 20 février distribuant des tracts « Ni Dieu, ni maître… d’école » car même si la grève des enseignants de Guyane ne peut qu’être soutenue, il ne faut pas oublier le plus important : le contenu pédagogique et le système scolaire dans sa globalité qui n’est toujours que l’antichambre de l’exclusion sociale, du chômage voir même du système carcéral !
Kolektif Anarchis Pou Espwar Lindépendans
Anarchosyndicalisme en Espagne
Sur le chemin de l’unité ?
Depuis de trop longues années, l’anarchosyndicalisme ibérique subit une situation complexe qui divise ses forces et parfois les épuisent dans des confrontations que beaucoup regrettent. C’est ainsi qu’en Espagne les organisations CNT-AIT, CGT et Solidaridad Obrera couvrent le champ du syndicalisme d’action directe. Malgré cela, l’anarchosyndicalisme en Espagne semble enfin retrouver une certaine vigueur si l’on retient l’enracinement de la CGT ou la démonstration de force de la CNT-AIT qui a fait défiler 3 500 personnes à Madrid le 4 février contre les nouvelles réformes antisociales du gouvernement.
C’est récemment que des militants, convaincus que le dialogue devait se renouer à la base, avaient construits des espaces de débats et de rencontres pluralistes, en Catalogne par exemple, sous l’impulsion notamment de la CNT-AIT qui avait subi elle aussi une scission. Tous ces efforts, malgré de fortes résistances de part et d’autre, seront sans doutes confortés par une initiative unitaire de la CNT, de la CGT et de la Coordination syndicale de Madrid dont le petit syndicat Solidaridad Obrera est membre.
En effet, une manifestation anarchosyndicaliste est convoquée le 1er mars à Madrid pour protester contre un ensemble de mesures prises par le Parti populaire de droite avec la bénédiction des syndicats majoritaires (Commissions ouvrières et UGT). Si des syndicalistes libertaires se trouvaient souvent cote à côte dans les luttes d’entreprise, c’est sans doute la première fois qu’une initiative d’une telle envergure nationale est prise. Gageons qu’elle sera une réussite et un jalon vers la réunification de l’anarchosyndicalisme espagnol.
Daniel. — Relations internationales FA
Bolivie : les anarchistes s’organisent
En Bolivie et depuis plusieurs mois, règne un état d’effervescence généralisé et important ; les réunions et les discussions se multiplient partout, les grèves sont le pain quotidien et les manifestations des travailleurs, permanentes.
Au cours de l’année 2000, une révolte généralisée mit en échec le sanglant Panzer au moyen de l’initiative populaire, avec la capacité créatrice des masses et une véritable démocratie directe lorsqu’il fallait bloquer les routes, occuper les édifices publics, lever des barricades dans les rues et contester la bureaucratie des dirigeants. Les travailleurs en ont retiré un grand ressentiment contre la démocratie bourgeoise et une prise de conscience chaque fois plus profonde de leurs forces.
Au cours de ces batailles, le mythe de l’invincibilité de l’État bourgeois et de son armée s’est assombri devant un prolétariat déterminé et décidé à lutter ; les troupes mercenaires sont bêtes et lâches, ce qui est une conséquence de leurs contradictions et il est aujourd’hui possible de leur donner la correction qu’elles méritent. Quand le régime constata que le peuple n’allait pas s’en laisser compter, il généralisa la répression au cours de laquelle il déclara l’état de siège.
Mais en Bolivie aussi, le mouvement anticapitaliste s’est renforcé et répond à la violence du capital avec la violence populaire : les manifestations attaquèrent et tentèrent de s’approprier divers édifices publics, rompant dans les faits l’ordre violent que l’État cherchait à imposer.
Malgré l’opportunisme que quelques figures du mouvement étalèrent à l’occasion d’intentions mesquines pour gagner du pouvoir au détriment des travailleurs, la convulsion sociale reste latente et menace encore d’une insurrection qui pourrait être victorieuse.
Au début du XXe siècle, un mouvement anarchiste combatif fut le protagoniste de luttes importantes dans les mines boliviennes.
Après des dizaines d’années d’apathie, le mouvement anarchiste relève la tête. Il est composé d’un coté par des anarchopunks radicaux, de l’autre par des communistes libertaires, et entre les deux par des expériences contre-culturelles d’inspiration clairement anarchiste et compte aussi un robuste mouvement anarchoféministe. Si bien que de manière désordonnée, ces militant-e-s n’ont pas été absents des dures journées de luttes de l’an dernier.
C’est à Cochabamba, ville bolivienne, épicentre des plus dures batailles du dernier mouvement populaire, que se déroulera la première rencontre des anarchistes boliviens depuis 30 ans.
L’objectif est la connaissance mutuelle entre les divers collectifs et individus actifs en Bolivie, dans l’objectif de coordonner les efforts en faveur d’un mouvement anarchiste organisé, capable d’occuper sa place historique aux cotés des travailleurs, dans la guerre contre le capital et l’État. Les rencontres auront lieu les 24 et 25 mars.
Jeunesses libertaires boliviennes
Berlin 2001 : les majors vaincues par le cinéma d’auteur
Berlin, installé dans son nouveau centre de verre et d’acier, naviguant entre Cinémax, Cinéstar et la tour Sony, mélange de globalisation et de désir cinéphilique, a pris un rythme de croisière malgré son directeur renvoyé, Moritz von Hadeln (après 22 ans à la tête du Festival) et la présence discrète de son successeur, Dieter Kosslick, véritable tête chercheuse des aides au cinéma, de la Communauté européenne à l’académie franco-allemande pour le cinéma.
Chronique des événements : jusqu’à la projection du film de Patrice Chéreau Intimacy (Intimité), public et critiques plébiscitaient Traffic de Steven Soderbergh, un thriller sur les trafics de drogues dures entre le Mexique et les États-Unis. Un film qui pointe habilement les paradoxes de la société américaine où les filles et fils de bonne famille s’alimentent plus facilement en drogues qu’en bières… Le film a les qualités intimistes de l’auteur de Sexe, mensonges et vidéo : il soigne ses seconds rôles, crée des épisodes burlesques et attachants sur le mode de Tarantino et son duo de tueurs de Pulp Fiction. Mais, c’est une superproduction des grandes majors avec avalanche de plans spectaculaires, déploiements militaires inutiles et rencontres explosives de polices parallèles, tortures et d’autres réjouissances… À part un prix d’interprétation pour le séduisant Benicio del Toro, (encore un métèque), Hollywood perd donc contre un film français, tourné à Londres, avec des acteurs parlant anglais.
L’homme de théâtre, Patrice Chéreau, fidèle à lui-même, situe le langage du côté de la création : la jeune femme qui se rend tous les mercredis à ses rendez-vous d’amour clandestins, Kerry Fox (prix d’interprétation féminine) fait du théâtre et joue La ménagerie de verre. Les paroles de la pièce résonnent et donnent le change à leur corps à corps muet. Ainsi la vie de chacun émerge. Le passé, le réel vont rattraper leur corps jouissants et ruiner tout. Brillamment filmé et interprété, les deux amants jouent une partition physique rarement réussie au cinéma. Ce n’est ni Baise-moi, ni Romance X, mais le « jouir sans entraves » toujours désiré, jamais atteint… Intimacy, écrit d’après plusieurs récits de Hanif Kureishi est également sacré meilleur film européen. Belle consécration pour Patrice Chéreau, le cinéaste-metteur en scène, que la critique française et les festivals avaient oublié dans leurs palmarès.
Catherine Breillat, spécialiste des émois de jeunes filles et des blessures de la libido adolescente, emporte avec À ma sœur un des prix des plus convoités. Il porte le nom de Manfred Salzgeber, fondateur de la section du Panorama, il garantit une diffusion dans trois pays de la CEE et le sous-titrage. Le distributeur dispose d’environ 100 000 FF pour lancer le film. Le jury a été sensible à la radicalité du film, à l’exploit de la réalisatrice de décrypter le sexe comme leurre. Le rêve de bonheur des deux sœurs sera cruellement déçu.
Sont passés à la trappe le nouveau film de Spike Lee, Bamboozled, It’s showtime, la satire tonique de la représentation des noirs dans le cinéma hollywoodien d’antan, et dans les médias d’aujourd’hui. Un film cruel et drôle que la communauté noire a violemment contesté et que Hollywood a boycotté en refusant à Spike Lee les extraits de films demandés. Spike Lee donne même les recettes de fabrication de la poudre qui faisait virer au noir charbon le teint déjà noir du noir. Recette que les blancs utilisaient aussi pour incarner des noirs à l’écran…
Des mondes en mutation
Ont été également oubliés des films de qualité comme Little Sénégal de Rachid Bouchareb, une enquête documentaire entre l’Afrique et l’Amérique sur des générations de l’après esclavagisme. Les descendants des familles arrachées à l’Afrique, leur vie en Amérique et les différents qui subsistent entre Afro-américains et Africains, descendants de la traite des noirs. C’est un film intime qui tire sa substance d’une documentation sérieuse et de la présence émouvante de l’acteur révélé par Peter Brook : Sotigui Kouyate.
Beijing Bicycle enfin, film sur une bicyclette volée qui n’a rien à voir avec le film de De Sica, même si le réalisateur possède un vélo et si le vélo du film passe par plusieurs mains. Film tonique sur les jeunes gens à Pékin, leurs origines et leurs différences. Le film montre avec une belle insouciance la drague entre lycéens, et la lutte pour la survie d’un jeune campagnard, coursier à vélo. Solidarité naissante entre des milieux très différents, culpabilité et incapacité du côté des parents. Seuls les vieux continuent, impassible, leurs occupations. Pas étonnant que le film de Wang Xiashuai ne soit pas encore autorisé à l’exploitation. Il montre pourtant Pékin, la vieille ville, ses mutations comme un documentariste et trouve des images fortes pour illustrer l’incroyable dureté de la lutte pour une survie digne. Beijing Bicycle est un portrait social sans complaisance. L’expérience et la lutte vont projeter ces jeunes brutalement dans l’âge adulte.
Dans la section prestigieuse du Forum, signalons les films sur le Vietnam, cinématographie inconnue à part le travail de Tran Ang Hung dont le film À la verticale de l’été a été nominé aux oscars. Ajoutons un documentaire de Hartmut Bitomsky sur le B 52, machine à tuer, avion à réaction, bombardier redoutable, conçu en pleine guerre froide pour transporter des armes nucléaires, monstre à la longévité inégalée : il peut voler 70 ans au moins. Le B52 a réussi ses missions en Irak, au Kosovo. Le monstre est toujours prêt à servir. Dédié à Robert Kramer, le film cite un colonel vietnamien qui a descendu un B52 pendant la guerre de libération nationale. À l’époque, il était simple soldat. Et ce sont en priorité des histoires de soldats que ces films vietnamiens racontent : retour au bout de 30 ans d’absence. Que faire dans un village de femmes où tout le monde épie tout le monde ? Rivage des femmes sans hommes de Luu Trong Ninh. Bilan cruel montrant l’étendue des plaies non cicatrisées après une longue guerre civile. Les bouleversements profonds survenus dans les communautés rurales, l’enfer des villes, capitales de marché noir, où se concentrent la prostitution et la drogue. Les films montrent, et cela semble être le seul espoir, hommes et femmes de simple condition traverser ce territoire immense pour enterrer un proche, tenir une promesse, retourner chez eux. Les différences idéologiques liées aux deux Vietnam sont évoquées : et si je serrai la main d’un Vietcong sans le savoir ? dit-on en riant dans Le long voyage de Le Hoang.
Les films vietnamiens disent le retour du refoulé et les angoisses des hommes restés sans descendance. Les retombées des doctrines totalitaires explosent dans les corps comme des bombes à fragmentation. La douceur des odeurs et des sensations éprouvées ne sont plus un garde-fou contre la vindicte inassouvie d’hommes et de femmes auxquelles ont a volé l’idéal. Un constat terrible.
Heike Hurst (« Fondu au Noir »-Radio libertaire)
Théâtre
Une licenciée mise en scène
On ne rencontre pas souvent des pièces de théâtre retraçant la vie d’ouvriers dans le monde du travail. Eh bien, l’écrivain libertaire Ricardo Montserrat s’est intéressé au sort des plus pauvres de la société, en l’occurrence à une caissière d’Auchan licenciée au Havre. L’écrivain s’était mis en contact avec l’association du personnel licenciées qui avaient donné une fiction « la femme jetable » sur France Culture en début d’année. Les licenciées ont pu avoir des dédommagements puisque la cour d’appel de Rouen leur a donné raison et le patron a dû payer des indemnités.
Après avoir rencontré les personnages, l’auteur a romancé leur histoire mais sans en altérer le fond. Ricardo Montserrat crée le scénario en 2 parties : blouse rouge et service après-vie avec le même titre avec la Compagnie de théâtre Confluence dans laquelle Colette Colas est metteuse en scène. C’est l’histoire de Lorette, licenciée par Auchoix après 23 ans de bons et loyaux services, tout au moins le croyait-elle…
Dans la première partie de la pièce, l’auteur met en lumière la dévotion obligée de Lorette l’employée modèle à ses supérieurs. Pour faire scrupuleusement ce pour quoi elle a été embauchée, elle se prête de bonne grâce aux 3 S (sourire, sonnerie, satisfait), les 3NZ (zéro attente client, zéro rupture, zéro papier au sol.) Elle a tout fait pour que les chiens n’aboient pas. Et même, elle se pliait aux pressions psychologiques, morales de ses chefs sans pouvoir oser bouger le petit doigt. Elle a subi des vexations, des humiliations, le sexisme des chefs tout au long de sa « carrière. » Au moment de son licenciement, elle s’est aperçue qu’elle ne valait pas chère, pas plus qu’un yaourt périmé qui part à la poubelle, mais décide de ne pas tomber dans la déprime. Elle décide de lutter. Dans l’autre partie, la pièce aborde qu’un patron est perdu sans son employée modèle, que sans lumière dans son entreprise, le maître n’est rien si l’électricien ne décide pas de vouloir remettre le courant. La pièce met en relief le rôle de la vie personnelle dans le social. La considération que la personne peut avoir dans sa vie. Déjà toute petite la mère de Lorette ne la considérait pas. Comme elle était malmenée, elle lui était difficile de s’affirmer. Les spectateurs ont bien apprécié. Le rappel des acteurs a duré plusieurs minutes.
Ricardo Montserrat avait déjà abordé le social en littérature ayant pour titre « ne crie pas » des licenciées des filatures de Roubaix. Mais la femme jetable est d’une vérité implacable où la personne humaine ne pèse rien face à l’économique omnipotent avec son cortège hiérarchique omniprésent.
Pascal Jourdain. — groupe Sacco et Vanzetti
Prochaines représentations : le 8 mars à Digne les Bains ; les 24 et 25 avril à la scène nationale d’Alençon-Flers.
Chanson
Lulu Borgia remet le couvert à l’Européen !
Qui c’est celle là ? La Lulu ! Tu connais pas la Lulu ? Elle est un peu dans le style de… ou plutôt de… Non, décidément, la Borgia ne ressemble qu’à Lulu. La première fois que je l’ai vu, c’était à La Colombière dans l’Essonne. J’avais été très impressionné par la truculence de l’artiste, la richesse des textes de Jean-Pierre Joblin et l’univers musical de cette nouvelle grande dame de la chanson.
Un peu rock, parfois rauque, souvent tendre ou loufoque, il y a du Fellini dans cette Borgia et quand Lulu s’en mêle c’est Sade qui rapplique. Accompagnée sur scène par Christian Huet à la guitare, Sylvain Durand au piano, Bruno Giglio au violon et Gaëlle le Buzullier au violoncelle, Lulu Borgia vient de sortir un album « Turbulences et dépressions ». Treize titres plus une surprise avec la participation de 15 musiciens dotés de vrais instruments. Après « Luxe, Bordel et Voluptés », ce nouvel album est, comme on pouvait s’y attendre un petit bijou. Beaucoup de tendresse, des mots précieux qui font mouche et vous touchent là où ça fait mal, là où ça brûle. Musicalement, si le rock ou le blues ne sont jamais très loin, l’ombre de Mozart plane sur les partitions. Un disque atypique par une artiste hors normes. Cette ex-bassiste obsédante et sensuelle, subversive, espiègle et raffinée ne met décidément pas d’eau dans son venin.
Pour fêter ça, elle vous attend avec un timbre de fer dans une voix de velours le 5 mars sur la scène de l’Européen. Il faut la voir absolument. Lulu Borgia, c’est pour de la vraie !
Bruno Petitfrangin
CD 13 titres « Turbulences et dépressions », en vente à la librairie du Monde libertaire.
L’Européen, 5 rue Biot, 75017 Paris (M° place Clichy). Places 120 FF ; chômeurs, Rmistes et étudiants : 60 FF. Réservations : 01 43 87 97 13.
Des militants jugés à Nice
Qui surveille la police ? Qui contrôle la justice ?
Depuis quelques années, en France, « terre de liberté où chacun peut s’exprimer selon ses convictions », les arrestations arbitraires de militants politiques ou syndicaux se multiplient. La criminalisation du mouvement social, la répression aveugle et injustifiée ne feront, à terme, que décrédibiliser un peu plus ceux et celles qui en sont les auteurs. Plus de 200 personnes ont déjà manifesté contre la criminalisation du mouvement social à Saint-Etienne le 13 janvier dernier. Personne n’empêchera jamais celles et ceux qui héritiers de l’histoire exigent de pouvoir vivre enfin dans une société juste, libre, égalitaire et fraternelle.
Des militants libertaires arrêtés
Au cours des manifestations lors du sommet de Nice en décembre dernier, une cinquantaine de personnes, choisies au hasard, ont ainsi été interpellées et placées en garde à vue dans des conditions plus que discutable, accusées de n’importe quoi. Cela aurait pu arriver à n’importe quel individu qui aurait l’imprudence d’oser manifester !
Une quinzaine de procès a ou aura lieu ; la plupart des dossiers sont vides et déjà le tribunal a été contraint de prononcer une relaxe pour des gens qui étaient accusés, excusez du peu, de participation aux émeutes avec armes ! Parmi les armes en question : un canif dans un sac à dos, un téléphone portable (pourquoi pas une brosse à dents ?). Ainsi, le 7 décembre, cinq participants stéphanois et lyonnais, militants à la CNT ou à la FA, ont été placés en garde à vue au commissariat pendant 7 heures pour « avoir entravé ou géné la circulation en employant un moyen quelconque pour y mettre obstacle en l’espèce en bloquant la progression d’un véhicule de la délégation italienne avec badge officiel, puis secouant le véhicule (ce qui est un mensonge de la police). Fait prévus et réprimés part l’art. L-7 du code de la route. »
Quel est leur délit ? Ils ont tout simplement stoppé pacifiquement, pendant quelques instants, un véhicule dit officiel qui circulait sans exorte policière, sur une voie piétonne !
Que risquent-ils ? 30 000 FF d’amende et deux ans d’emprisonnement ou l’une des deux peines (chacun bien sûr).
Qu’est-ce qui a déclenché la fureur des policiers contre ces cinq militants ? La découverte dans leurs sacs à dos de quelques tracts et de deux autocollants édités par la Fédération anarchiste. Les idées politiques sont au centre de cette affaire, mais c’est sous un quelconque prétexte fallacieux qu’ils sont jugés. Les lois scélérates n’existent plus, elles sont encore appliquées !
Après une première audience le 1er février où il semble qu’ils étaient jugés d’avance et suite à la lecture des rapports scandaleusement mensongers de la police, leurs virulentes protestations ont obligé la juge à reporter le procès le jeudi 1er mars pour entendre les responsables de leur arrestation.
Unions régionales Rhône-Alpes de la CNT (Vignoles) et de la FA
La souscription ouverte pour couvrir les frais de justice à déjà permis de récolter 9 313 FF (renseignements : 04 77 25 78 04).
Paris
Nouvelle agression ultra violente des fascistes sur le marché Pyrénées
Des riverains : « on se serait crus revenus au temps des croisés : les agresseurs brandissaient une hache, avec le salut nazi, aux cris de mort aux juifs, aux crouilles et aux communistes ! » Nous avions déjà connu des agressions fascistes, depuis quelques années, sur les marchés du 20e et des arrondissements de l’Est de Paris. Mais, des agressions d’une telle violence, nous espérions naïvement ne jamais en connaître… Nous pensions que les partis d’obédience fasciste s’arrêteraient à une propagande « soft » d’une Martine Lehideux, durant cette campagne municipale. Nous pensions qu’elle s’arrêterait à soutenir ses candidats dans les 11e, 19e et 20e arrondissements de Paris, naïfs !
Hélas, il s’avère que les dissensions fascistes internes, entre l’ex-parti de Le Pen et celui de Mégret, aient agacé les candidats potentiels de ces « drôles de partis ». Seraient-ils nostalgiques du temps où le « Président de notre République » leur laissait un siège vacant de conseiller municipal dans le 20e ? Ce siège de conseiller sur lequel Le Pen lui même s’est assis. Triste mémoire. Seraient-ils nostalgiques de ce temps où ils faisaient recette sur la mauvaise gestion non-directe de la ville ? Seraient-ils déjà nostalgiques des voix qu’ils ne feront pas ?
Dimanche 18 février, les masques sont tombés avec leur haine
La candidate frontiste se réfugie dans sa voiture avec ses gardes du corps. Bien vite, arrivent plus de 70 néo-nazis pour agresser les militants antifascistes sur le marché Pyrénées-Ménilmontant, dans le 20e arrondissement de Paris.
Quelle rapidité et quelle organisation : bombes lacrymogènes, grenades, chaînes, barres de fer, bouteilles, boulons et même des… haches. On croyait, avoir tout cru, tout vu ! Quoiqu’une de ces haches lancées a été remise à la police locale. Laissons-nous à espérer…
Les nervis sont arrivés en un temps record. Et ça agresse à tout va : les militants, les commerçants, les passants, les habitants. Bref, tout ce qui passe ! Même ces habitants, qui depuis leurs fenêtres, dénoncent ce casting d’une France frustrée qui se retrouverait dans cette Allemagne des années 30 : saluts fascistes, cris hystériques et nauséabonds : « la France aux Français — Europe, Jeunesse et Révolution ». Ces slogans aujourd’hui prétendument interdits par la République et pourtant repris en toute impunité, par le GUD, entre autres.
Pendant plus d’une demi-heure, les nervis déchaînent leur violence. Enfin, bien après coup, et c’est tellement plus républicain, des commerçants et des habitants appellent la police de la République. Les nervis avaient renversé les tréteaux d’un commerçant maghrébin. Trop peu n’en faut… On a sa conscience tout de même ! Arrivent ensuite, après la maréchaussée, les pompiers de Paris. Même eux, reconnaissent n’avoir « jamais vu une telle violence ». C’est dire ! Ils arrivent, sur des lieux dévastés. Un militant du réseau No Pasaran, atteint par un projectile, est emmené par les pompiers vers l’hôpital Tenon. D’autres blessés moins graves, avouent ne pas « souhaiter porter plainte sur leur agression, parce que ça ne sert à rien ! » Néanmoins, les associations présentes portent plainte, au nom de leurs associations, même si ça ne sert à rien ! Et pendant ce temps, la maréchaussée essaye encore de nous disperser !
Agressions à répétition
Cette nouvelle agression ne fait que faire suite à une longue série d’autres attaques, sur le même marché. Contre des militants « démocrates » du 20e du PCF et des Verts notamment. Attaque commando le 22 octobre 2000. Visite provocatrice des néo-nazis de « Terre et Peuple » qui étaient venus tâter le terrain. Agressions à répétition lors de la législative partielle de 1999. De la campagne des régionales de 1998. Passage à tabac, en pleine rue, en mars 1999 d’un militant syndical de la CNT.
Alors que des militants antifascistes sont présents toutes les semaines sur ce marché. Le FN et le MNR n’y viennent que pour y provoquer des affrontements. Pourtant, la réaction unanime des habitants du quartier a toujours été hostile à leur présence. Les militants libertaires du réseau No Pasaran, de la Fédération anarchiste, d’Alternative libertaire, de la CNT ont toujours combattu sans concession, le fascisme. Plus que jamais, unis dans ce combat, nous ne nous laisserons pas intimider par ces démonstrations de violence gratuite.
Expulser les fascistes
Ensemble, nous appelons la population à continuer à nous soutenir dans le combat pour expulser les fascistes de tous les lieux où ils essayent de répandre leur propagande nauséabonde, que ce soit au profit de la candidate lepéniste Martine Lehideux ou de la candidate mégrettiste Claire Jouët. À réfléchir sur une gestion directe de la ville, sans passer par les candidats « plus ou moins démocrates » qui tolèrent leur présence, sans réagir !
Patrick Schindler pour le Claaaaaash en coordination avec le Collectif libertaire antifasciste des 11e,19e et 20e arrondissements de Paris.