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Au revoir Horst

Le jeudi 8 octobre 2009.

Nous publions ci-dessous l’hommage des camarades d’Allemagne rendu au militant anarchiste allemand Horst Stowasser décédé le 30 aout 2009. Nous présentons en page suivante un autre dernier salut adressé par Lou Marin.

La rédaction



Horst Stowasser nous a quittés. Cet anarchiste bien connu, théoricien et auteur de Neustadt, en Allemagne, est mort tôt dimanche matin, le 29 aout 2009, à l’âge de 58 ans, après un empoisonnement du sang suite à une chute la semaine précédente.

Bien que certains hésiteront à l’admettre, la ville de Neustadt sera moins riche sans lui. Loin d’être un gauchiste farfelu, Stowasser était un idéaliste qui menait avec succès des projets d’alternatives concrètes ; le dernier de ces projets étant un lieu de vie multi générationnel à Eilhardshop, dans le quartier Schöntal à Neustadt.

Né le 7 janvier 1951 à Wilhelmshaven, sa famille a déménagé peu après en Argentine. Les idées de Horst ont été influencées par le contexte de la dictature militaire. Stowasser est revenu en Allemagne pour étudier l’agronomie et les langues romanes. Il a commencé à travailler, puis il a établi des archives de l’anarchisme (« AnArchiv »). Ces dernières allaient être rendues accessibles aux chercheurs aussitôt que les documents auraient été déménagés à Eilhardshof. Son livre internationaliste et très complet, de presque 500 pages, est le fruit de sa préoccupation pour l’anarchisme : Anarchie !, concepts, histoire, perspectives [1].

Mais Stowasser n’était pas qu’un théoricien. Il était motivé par la question de savoir s’il était possible de vivre sans autorité et sans chef — sens du mot anarchie — et c’était en mettant l’anarchisme en pratique qu’il pensait trouver les réponses. On peut ainsi lire des exemples dans le livre Project A (1985) dans lequel il décrit des projets autogestionnaires et libertaires d’une petite ville. Ces expériences étaient surement connues de tous à Neustadt. Les habitants en ignoraient souvent les idées sous-jacentes. Stowasser était un stratège pour « Wespe [2] », un acronyme de « Werk Selbstverwalteter Projekte und Einrichtungen » (Travaux pour des projets et institutions autogérés). Et grâce au succès auprès de cette initiative, il déménagea en Rhénanie-Palatinat en 1990. Parmi ses expériences citons : Abraxas, un magasin d’alimentation biologique, la librairie Quodlibet, une éco-ferme à Freidrichstrasse, et plusieurs autres initiatives, sans oublier le centre culturel « Das Wespennest »(Le Nid de guèpe).

Stowasser, qui a travaillé dans la publicité pendant plusieurs années, comptait être une épine dans le pied du système — au-delà du sens figuratif. Pour avoir cité le « Tous les soldats sont des meurtriers » de Tucholsky, il fut condamné par la justice allemande.

Le 2 mai dernier, il n’a pas voulu accepter une marche des fascistes d’extrême-droite à travers la ville de Branchweiler. Jusque-là, l’« Alliance contre la droite » de Neustadt n’avait réussi à trouver qu’un petit terrain d’entente et cela ne lui convenait pas. Il a changé de cap en se couchant dans la rue habillé de son costume trois-pièces.

D’ailleurs, parlons-en du costume. Il était rare de voir Stowasser sans son gilet de costume, un mouchoir dans sa pochette. Souvent avec un cigare à la bouche, il servait le meilleur expresso de tout Neustadt. Stowasser était un adepte du sensualisme, tel que son dernier livre [3], sorti cette année (en coopération avec Christophe Gauglitz) le démontre.

Horts Stowasser laisse derrière lui sa compagne de longue date, deux grands fils et une jeune fille.

Sebastian Böckmann, traduction de l’équipe des Relations internationales de la Fédération anarchiste


[1Anarchie ! Idee — Geschichte — Perspektiven. Hamburg : Edition Nautilus, 2007.

[2La guèpe.

[3Auf den Spuren des Glücks. Eine leicht anarchische Genussreise durch Frankreich (Sur les chemins du bonheur : un voyage un peu anarchiste de jouissance à travers la France), Abersweiler : éditions Strasser, Abersweiler, 2009.