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Hommage à Jacky Toublet

Le jeudi 27 juin 2002.

L’histoire de Jacky, c’est l’histoire d’un itinéraire anarchiste et anarchosyndicaliste. Du foyer individualiste du 13e arrondissement au groupe socialiste libertaire animé par Gaston Leval, puis à la Fédération anarchiste, au groupe Pierre-Besnard dont il fut l’un des fondateurs. et auquel il resta attaché jusqu’à ses derniers jours, puis ces derniers mois à Alternative libertaire.

Jacky fut de toutes les réflexions et de tous les combats du mouvement anarchiste de ces quarante dernières années. Il fut aussi un militant anarchosyndicaliste, d’abord à la Révolution prolétarienne avec les amis de Pierre Monatte, puis à l’Alliance syndicaliste, puis à la Coordination nationale anarchosyndicaliste à laquelle s’associent l’AS et son journal Solidarité ouvrière. Toujours fidèle à la CGT et en particulier à la CGT des correcteurs, la renaissance de la CNT lui permit de reprendre espoir dans un renouveau possible de l’anarchosyndicalisme.

Mais au-delà, Jacky fut aussi un infatigable artisan de l’unité du mouvement libertaire, c’est en ce sens qu’il rejoint la Fédération anarchiste en 1981. C’est en ce sens qu’il soutient le texte : « Pour un mouvement libertaire unitaire et coordonné » au congrès de la FA en 2001 à Besançon. Ce texte enfin adopté en 2002 au congrès de Rouen, sous le titre « Adresse aux libertaires » sonne aujourd’hui comme un aboutissement et un hommage, comme le fut aussi, le 8 juin dernier, quelques jours avant sa mort, le Forum libertaire de l’Est parisien.

Ceux qui connurent bien Jacky savaient qu’il n’était pas qu’un homme d’action mais aussi un homme de grande culture dans la tradition de Fernand Pelloutier. Grand connaisseur des auteurs, des idées, de l’histoire du mouvement anarchiste, il sut dans bien des circonstances en transmettre aux plus jeunes les analyses, les valeurs et les réflexions comme autant d’outils de lutte et de combat.

Il fut encore un propagandiste par la parole et par la plume : directeur de publication du Monde libertaire, orateur de talent dans les meetings, animateur à ses heures des « Chroniques syndicales » de Radio libertaire, auteur de textes de références sur la Charte d’Amiens ou sur la CGT d’Émile Pouget…

Pour conclure, je dirai que Jacky, fut toujours animé d’une volonté farouche de fédérer un mouvement libertaire dont la faiblesse est largement due à sa dispersion et à des querelles de second ordre, quelquefois même, à une mauvaise compréhension du fédéralisme. Cependant, Jacky, souvent clairvoyant, savait que pour cela le mouvement libertaire devait marcher sur ses deux jambes, à savoir l’organisation spécifique et l’organisation syndicale.

Paradoxalement, pourtant, après une analyse fine des événements et des évolutions historiques, il avait renoncé à l’illusoire et mythique unité syndicale contenue dans la Charte d’Amiens pour adopter la position de l’AIT de 1922 puis de la CGT-SR de 1926, à savoir celle d’un développement autonome du mouvement anarchosyndicaliste. Cet itinéraire est aujourd’hui clos, à d’autres de le poursuivre.

Pour l’unité du mouvement libertaire, vive la Sociale. Salut compagnon !

Hugues Lenoir