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Ils ont brûlé nos livres… pas nos idées, ni notre force !

Le jeudi 27 février 1997.

Le dimanche 16 février, vers 4 heures du matin, la librairie « La Plume Noire », librairie de la Fédération anarchiste était victime d’un incendie criminel. La totalité des locaux de la librairie, les livres, le mobilier, etc. sont brulés, les ouvrages de la bibliothèque de prêt sont irrécupérables et le reste des locaux dans un sale état. Plus grave encore : si les pompiers n’avaient pas réagi rapidement, le bilan aurait sans doute été bien plus grave : de l’ essence avait été déversée dans l’allée de l’immeuble. Si le feu s’était propagé, les habitants du 19, rue P. Blanc aurait été pris au piège.

Triste bilan pour un acte criminel et terroriste

Qui sont les auteurs de l’attentat ? Nous ne pouvons accuser personne, mais nous savons que la veille notre librairie avait été recouverte d’autocollants du FNJ (Front national de la jeunesse). Un procès intenté par le Front national contre notre journal devait avoir lieu le lendemain. Chacun et chacune peut faire des hypothèses....

À l’heure où le FN censure la bibliothèque d’Orange, muselle le festival de Chateauvallon à Toulon, une librairie qui flambe, c’est tout un symbole qui rappelle de sombres souvenirs : l’Allemagne des années 30, la montée du nazisme, les autodafés, etc. aujourd’hui, alors que se multiplient les actes et propos racistes, les discours négationnistes, les atteintes à la liberté d’opinion et d’expression, les attaques physiques contre la liberté fondamentale des femmes à disposer de leurs corps, cet attentat contre un local de la Fédération anarchiste est un pas de plus pour tenter de faire taire l’ensemble des antifascistes et des antiracistes.

Immédiatement, nous avons mobilisé nos sympathisants, invité les autres organisations à une réunion et organisé une réponse politique (rassemblement dès lundi soir avec 300 personnes, meeting le jeudi soir dans les locaux incendiés (plus de 200 personnes) et enfin la manifestation de samedi dernier avec plus de 3’000 personnes. Une manifestation de protestation à la fois contre cet attentat, contre le fascisme, le racisme et pour le développement des luttes sociales !

Depuis vingt ans, la bourgeoisie et son serviteur, l’État, ont assuré la reconstruction du capitalisme. Mondialisation de l’économie, nouveaux modes de production, règne de la « flexibilité » à tous crins, baisses du cout du travail, démantèlement de la protection sociale et des services publics, tout cela a été sur le dos des travailleurs et pour les profits de quelques uns !

Résultats : une misère sociale croissante, des millions de chômeurs, de précaires. Aujourd’hui, la seule perspective offerte à l’écrasante majorité de la population est celle de vivre moins bien que les générations précédentes. Cet avenir incertain favorise la « peur du lendemain », l’aspiration à un « État fort » (qui remettrait de l’« ordre ») et fait apparaitre les replis identitaires (nationalismes, intégrismes…) comme un « refuge ».

Dans ce conteste, la politique du bouc émissaire fait « recette »… Les gouvernements successifs ont élaboré un véritable arsenal législatif anti-immigrés. Avec la multiplication des discriminations concrètes vécues au quotidien, la xénophobie est devenue aujourd’hui la politique de l’État français. Cette évolution vers une démocratie de plus en plus « blindée » et l’influence croissante du Front national sont deux phénomènes jumeaux qui se renforcent mutuellement et ne peuvent donc être combattus séparément.

Les élections ne nous protégerons pas du fascisme !

Depuis l’émergence significative du Front national, tous les appels au « vote utile » contre ce parti n’ont aucunement réussi à bloquer sa progression. Pis, les partis politiques, et ceux de gauche ne sont pas en reste, ont opposé au FN un antifascisme abstrait tout en acceptant l’idée que l’immigration constituerait un problème.

De plus, leur nationalisme, leur soumission aux diktats du marché capitaliste, le fait qu’ils offrent comme seule perspective le développement de l’assistanat (RMI, emplois au rabais…) en réponse à la décomposition sociale, tout cela fait le jeu du Front national. Après Vitrolles, l’échec d’une telle stratégie apparait clairement.

Pour un antifascisme antiétatique et anticapitaliste !

Contre l’insécurité sociale : le mouvement de novembre-décembre 1995 a exprimé massivement le refus d’une société construite sur l’inégalité et la misère. Cette radicalité a été limitée par le manque de perspectives mais cést bien ce combat qu’il faut continuer ! Pratiquement, c’est en remettant au gout du jour une réelle solidarité de classe, en auto organisant nos luttes, que nous ferons aussi barrage au fascisme.

Contre le racisme d’État : il faut soutenir tous les sans-papiers et exiger l’abrogation des lois xénophobes et sécuritaires. L’insignifiant « recul » de l’État vis-à-vis des certificats d’hébergement laisse intact l’édifice juridique qui criminalise les immigrés mas démontre que la désobéissance civile paie ! Par delà les frontières, pour la libre circulation de tous et de toutes !

Contre le nationalisme : il est utilisé pour faire croire que l’on est tous, chômeurs ou milliardaires, dans le même bateau. Il tend à nier l’existence des classes sociales et leurs antagonismes. Il divise les populations pour permettre à la bourgeoisie de mieux régner ! En Europe ou en Corée, les travailleurs n’ont pas de patrie mais un ennemi commun : le capitalisme être exploité en francs ou en euros ne change rien, c’est le salariat qu’il faut abolir !

Union locale FA de Lyon


Une souscription est ouverte pour nous permettre de remette la librairie en état et pour faire face aux frais de la campagne de soutien. Virement compte ccp FA 638 — 91 Lyon ou chèque à adresser à l’ordre de La Plume Noire. 19, rue Pierre Blanc 69001 Lyon (tél. : 04 72 00 94 10)