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éditorial du Hors-série nº 62

octobre 2015.

Dans nos lits, dans la rue, dans le train, au boulot, les informations circulent. Sur papier, dans nos smartphones, nos télés, nos radios, nos ordinateurs…

Mais cette multiplication des moyens de diffusion a ses corollaires : l’information, devenue un bien marchand, est déformée, tout autant pour séduire le spectateur — au lieu de l’émanciper — que pour complaire à ceux qui financent les médias. Le grand poète Patrick Le Lay, président de TF1 pendant une vingtaine d’années, avait bien résumé le processus en cours : « Pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. »

Et ce qui vaut pour un message publicitaire vaut également pour tout un système : nous sommes entrés aujourd’hui dans l’ère de la marchandisation de l’info 2.0 ; un à un, les médias ont tout simplement été achetés par ceux qui ont tout intérêt à les contrôler pour asseoir leur pouvoir, économique ou politique, et servir leurs intérêts idéologiques. Un regard anarchiste est évidemment plus particulièrement attentif au contenu des médias d’information, cependant il ne faut pas oublier que ce phénomène touche l’ensemble des supports : des magazines féminins aux émissions culturelles en passant par les journaux spécialisés, tous diffusent, souvent de façon subtile, une idéologie… Et lorsqu’ils sont aux mains « d’élites » bien décidées à préserver un ordre qui les sert, cette idéologie éminemment réactionnaire se teinte de xénophobie, de sexisme, d’antiféminisme…

Aujourd’hui, l’indépendance par rapport aux pouvoirs économiques et politiques se fait rare, dans les médias comme ailleurs. « Y en a pas un sur cent et pourtant ils existent » : Le Monde Libertaire est de ceux là. Comme beaucoup d’autres journaux politiques il s’est pris les « réformes » successives de la diffusion de la presse en pleine gueule. Et il est devenu impossible pour notre version hebdomadaire de rester en kiosque aux conditions imposées par les deux seuls diffuseurs de la presse en France. Le Monde Libertaire Hors-Série, lui, a bien résisté, mais une parution bimestrielle et thématique est un moyen bien limité : il y a tant à dire, dénoncer, proposer ! À côté de Radio Libertaire, qui va bientôt fêter ses 35 ans, nous devons développer de nouveaux outils pour promouvoir un monde différent un monde où, par exemple, la « liberté de la presse » ne serait pas réduite à une émotion de façade brandie de façon circonstancielle pour détourner les insatisfactions du peuple après un attentat…

Un groupe de travail s’est constitué au sein de notre organisation pour réfléchir à une nouvelle formule du Monde Libertaire qui verra le jour en 2016. Ce dossier sur les médias fait partie de notre réflexion et nous voulions la partager avec vous.

Quentin (groupe La Mistoufle)


http://monde-libertaire.fr/?article=EDITO_DU_MONDE_LIBERTAIRE_HORS_SERIE_N_62