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éditorial du nº 1801

décembre 2018.

Alimentation et politique

On oublie trop souvent le statut politique de l’alimentation. Le dossier de ce mois-ci essaye de présenter les différents enjeux politiques relatifs à notre consommation essentielle.

Il est en effet indéniable que la façon de se nourrir ne peut être totalement détachée du mode de production dans lequel nous sommes insérés : se nourrir c’est certes toujours remplir une fonction physiologique (consommer des calories pour vivre) mais également s’inscrire dans un système de production et de distribution. Le système que nous connaissons est celui du capitalisme. En cela la nourriture est un reflet de nos sociétés : l’accès à l’alimentation est inégal en fonction des revenus et de plusieurs autres variables, et on retrouve dans la production agro-alimentaires le même type de problèmes que dans les autres secteurs, tournés — c’est devenu une platitude de l’énoncer — vers la recherche du profit.

De ce fait trois thématiques majeures émergent de notre dossier. D’une part le thème de la critique du mode de production actuel, inégalitaire et gaspilleur, énonçant d’un côté la norme d’une « alimentation équilibrée » et faisant peser la responsabilité de la « bonne consommation » sur les individus alors que l’industrie nous abreuve de produits toujours plus nombreux et surnuméraires. D’autre part le thème de la critique écologique de notre mode de production. L’industrialisation de la production entraîne un double problème, à la fois relativement à la mondialisation des échanges, ce qui produit également des problèmes économiques et politiques —on connaît les ravages de l’huile de palme, mais également de la consommation de quinoa ou d’autres produits étiquetés plus « responsables », sur les lieux de production — et à la crise environnementale qui s’annonce de plus en plus irrémédiablement. L’alimentation de-vient ici, comme d’autres domaines, un vecteur de compréhension des inégalités planétaires engendrées par l’élargissement des échelles de l’échange. Enfin le thème, non des moindres, de l’éthique est central dans notre époque. La domination de l’animal par l’homme, accentuée par les techniques de production intensives tristement illustrées par les scandales des abattoirs ou de conditions d’élevage déplorables, est en effet un questionnement récurent, problématisant nos habitudes de consommation et nos pratiques alimentaires. En cela les thématiques — souvent conflictuelles y compris chez les libertaires — du végétarisme voire du végétalisme ou du véganisme sont inévitablement présentes dans le dossier.

Le Comité de rédaction du Monde libertaire n’entend pas dans ce numéro dicter ce que doivent faire les individus, mais uniquement donner la parole à plusieurs points de vue sur les questions politiques de l’alimentation, de façon à ouvrir des débats potentiels ainsi que des réflexions sur ces thématiques qui, bien que quotidiennes, sont souvent relayées comme secondaires.

Nathanaël pour le CRML

Petit erratum quant à une fausse attribution de citation dans le dernier édito : la citation attribuée à Victor Hugo est en réalité celle de Jaurès. Comme le dit Platon dans Le Capital : l’erreur est humaine.


Communiqué

Le CRML mandaté au 76° Congrès de la FA de novembre 2017 jusqu’au 77° Congrès de mai 2018, présente ses excuses aux lectrices et lecteurs pour la publication bien involontaire d’un article contenant une phrase antisémite dans le ML nº 796 de juin 2018, en raison d’un bouclage hâtif avant de remettre le mandat au Comité de Rédaction du ML nous succédant.

L’antisémitisme est contre les principes de base de la Fédération Anarchiste. Nous condamnons cette phrase "Quant aux sionistes, ils ont la mémoire courte et ont décidément bien appris de leurs boureaux [sic] …" dans l’article de la page 19, signé Michel Di Nocera, intitulé "Combien de temps allons-nous nous taire face au génocide commis par l’État théocratique sioniste israélien en Palestine".