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TEO, TEO, TEO… Gratuité répondit l’écho !

Le jeudi 18 septembre 1997.

La première manifestation pour exiger l’usage gratuit du tronçon de périphérique urbain appelé TEO (trans est-ouest) a eu lieu le samedi 6 septembre à Lyon. De l’ampleur de la mobilisation dépendait la légitimité et donc l’avenir du Collectif organisateur. Derrière la banderole « pour la gratuité, contre le racket » près de 4 000 personnes sont venues à titre individuel et constituaient la masse du cortège. Suivaient les syndicats CGT et CFDT, précédant les cortèges politiques. Citons dans le désordre : PC, AREV, LCR, Verts et bien entendu la FA.

Les « motards en colère » avaient roulé sur un parcours spécifique et nous ont rejoint devant l’Hôtel de Ville. Cela faisait 3 000 manifestants de plus… et beaucoup de bruit. Une délégation a été reçue par un sous-fifre de Barre, mais personne n’attendait rien de cette démarche.

La réussite de cette manifestation a obligé Barre, président du Grand Lyon et Mercier, président du Conseil général, à donner une conférence de presse dès lundi matin pour demander au concessionnaire Bouygues de réduire de 50 % ses tarifs, alors que peu de temps auparavant « nos » présidents péroraient vouloir appliquer « tout le contrat mais rien que le contrat ».

Ils vont même créer une commission pour étudier les possibilités de rachat de TEO par les collectivités publiques, ce qui revient à radicalement remettre en cause la politique de privatisation de l’espace public, alors que des projets similaires à TEO se préparent sur l’agglomération.

La mobilisation sociale s’est révélée efficace parce que ciblée sur un objectif simple et fédérateur : la gratuité sur toutes les infrastructures routières de l’agglomération. Cela peut paraître simpliste voir démagogique à certains. Il n’empêche que ce rejet du péage et cette exigence de gratuité doit être comprise comme un ras-le-bol de la politique de privatisation de tout ce qui est communément appelé « services publics ». Et si bien souvent chacun d’entre nous se sent impuissant face à la réduction des remboursements de la sécu ou la mise en place des retraites par capitalisation, etc., l’affaire TEO permet à chacun de matérialiser son opposition à ces privatisations tous azimuts. C’est l’opportunité que 98 % de Lyonnais ont saisi, affirme un sondage local.

Barre, Bouygues et consorts ont bien senti le danger et le risque de contamination que cela représente, d’où leur profil bas d’aujourd’hui. Leur stratégie consiste à gagner du temps et à tenter de jouer sur les potentielles divisions internes du Collectif. Ils ont choisi comme interlocuteur une association concurrente au Collectif, intitulée « Non au racket », laquelle affiche sa volonté d’aider Barre et Collomb (chef socialiste favorable au péage) à trouver une solution. Elle dénonce la politisation du Collectif et son « extrémisme » et est animée par un élu socialiste de Vaulx-en-Velin. Dans les faits, c’est à peine un groupuscule.

On peut aussi s’interroger sur la détermination des Verts à long terme puisqu’ils sont contre le péage partiel (type TEO) mais pour un péage global (il faudrait payer une taxe à l’accès à l’agglomération !?). En dehors du Collectif, il existe des associations militant pour la suppression des voitures en ville. Elles sont pour le péage et expliquent que les pollueurs doivent être les payeurs. Ces associations, tout comme les Verts, ont une vision libérale des rapports sociaux et une volonté affichée de punir par le fric pour soi-disant « responsabiliser » les automobilistes. Ils oublient que la ville est une ville capitaliste, c’est-à-dire une source de profits pour ceux qui détiennent le pouvoir et qu’il y a spéculation sur les modes de déplacement comme il y a spéculation sur les logements. La plupart des habitants subissent l’organisation capitaliste de l’espace urbain. C’est à partir de cette réalité qu’il faut raisonner, discuter et proposer aux Lyonnais des perspectives et des alternatives cohérentes de transport.

Le Collectif auquel la Fédération anarchiste adhère, s’appuie aussi sur une association d’individus non « encartés » forte de plus de 1 100 personnes alors qu’il n’a que 15 jours d’existence.

Les prochaines initiatives du Collectif vont tendre à lancer un réel et profond débat public sur TEO et impulser la définition d’une politique des transports assurant la libre circulation et la gratuité des infrastructures collectives que sont les routes et autoroutes, tout en prenant en compte le développement des transports collectifs, la pollution, etc.

La lutte a vraiment commencé.

Bernard
groupe Déjacque (Lyon)