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éditorial du nº 1086

Le jeudi 29 mai 1997.

Il est Africain et s’appelle El Hadj Momar Diop, délégué du troisième collectif, il s’était mis en avant, animant des débats comme récemment à Saint-Étienne. Le 14 mai, lors de l’occupation du stade de France par des sans-papiers, l’État français ne l’a pas raté. Interpellé et inculpé sous le motif fantaisiste de « coups et blessures sur un agent de la force publique et rebellion », Momar est aujourd’hui condamné à quatre mois de prison ferme et dix ans d’interdiction du territoire. Nous réclamons sa libération.

« Le 9 mai, ils étaient dix-huit dans une cage prévue pour cinq avec deux matelas […]. Ils étaient réduits à uriner dans des bouteilles en plastique ». Le magistrat qui tient ces propos ne parle pas d’un zoo mais du centre de rétention de l’Essonne, à Fleury-Mérogis.

L’État français traite ainsi des individus que sa politique, d’une part, et les hasards et les nécessités de la vie, d’autre part, ont transformé en « sans-papiers ».

Il est Africain et s’appelle Mobutu Sese Seko. En trente-deux ans de pouvoir abolu, le « maréchal-président » a pu dépouiller sans vergogne le peuple zaïrois pour amasser l’une des plus grosse fortunes de la planète. Pendant son règne, il a fait éliminer physiquement les opposants qu’il ne pouvait acheter. Un officier proche de Mobutu décrit ainsi l’insoutenable torture que dut subir Pierre Mulele : « Vivant, on lui a arraché les oreilles, coupé le nez, tiré les yeux des orbites pour les jeter à terre. On lui a arraché les organes génitaux. Toujours vivant, on lui a amputé les bras puis les jambes ».

Jusqu’au bout, la diplomatie française aura tenté de lui assurer une sortie honorable. Aujourd’hui, pour des « raisons humanitaires » l’État français se déclare prêt, par la voix de son ministre de la coopération, à lui accorder l’asile.

L’État français a les amis que mérite sa politique, de Hassan II à Omar Bongo. Dans les poubelles de l’histoire, Mitterrand et Chirac, pour ne citer qu’eux, trouveront place à leurs côtés.