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À la petite semaine

Quel naufrage ?

Le jeudi 20 mars 1997.

L’histoire moderne de l’Albanie montre que voilà maintenant plus de soixante années que les vautours les plus immondes dominent au " pays des Aigles ". Tour à tour envahie par l’Italie mussolinienne, étouffée et rendue exsangue durant un gros demi-siècle par la dictature paranoïaque d’un pur produit du marxisme-psychiatrisme le plus délirant, vendue enfin aux deux mafias affairistes en plein essor depuis la chute du Mur, la communiste recyclée et la criminelle ordinaire, la population albanaise a paru lassée des charognards qui la dépècent et ont fait d’elle laplus miséreuse du continent européen.

Depuis, presse, télévision et radio de nos démocraties nous invitent à nous inquiéter avec elles de voir le pays s’enfoncer chaque jour davantage dans le désordre et l’" anarchie ". Or que nous dit-on ? Des villes tombent mollement, l’une après l’autre, aux mains de leurs habitants, les portes des casernes s’ouvrent, offrant sans résistance leur immense arsenal aux insurgés. Des polices, officielle et secrète, qui se terrent, une armée plus que bienveillante, pas de guerre civile et, dans ce " chaos ", un nombre total de victimes, depuis le début du soulèvement, à peu près semblable au lot quotidien de morts violentes enregistrées par des villes hautement civilisées comme Washington ou Los Angeles.

On évoque, dans l’actuelle situation albanaise, l’apparition de gangs maffieux. Comme si ceux-ci n’étaient pas, précisément, avec leurs alliés gouvernementaux, à l’origine des événements. Comme si les partis politiques de là-bas, sinistres maquereaux ayant mis le pays en coupe réglée, ne méritaient pas eux aussi, sans exception, d’être désignés par cette expression.

Ainsi donc le rafiot prendrait l’eau et l’Albanie ferait naufrage. Quel naufrage, sinon celui d’un État hautement criminel depuis des décennies ? Il nous semble au contraire voir des galériens à juste titre fatigués de ramer au profit d’une capitainerie pourrie, et les rats quitter le navire. Reste à donner le bon cap à la mutinerie.

Floréal