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Dolly, je t’aime

Le jeudi 20 mars 1997.

Depuis deux semaines déjà, douce Dolly, je désirais te déclarer ma flamme, mais il n’y avait plus assez de place dans Le Monde libertaire et les autres journaux, tout occupés qu’ils étaient à dire du mal de toi, refusèrent de m’ouvrir leurs colonnes au nom du « génétiquement correct ». Enfermé dans ma timidité native matinée de misogynie défensive, je désespérais, avant ta naissan…, venue au monde de pouvoir dépasser un jour ma pauvre nature d’être humain… de rester seul, unique, face à l’océan des autres, des différents, des effrayants…

Mais tout cela n’est que souvenirs d’une époque sans espoir puisqu’enfin nous nous rencontrons au détour d’un article de presse ou d’un rapport scientifique. Tu as écarté de moi l’angoisse d’un monde de robots qui seraient venus piquer mon boulot, sois-en remerciée, toi et tes fabricants. Maintenant, il ne me reste plus à craindre qu’un cauchemar de « répliques ».

Sans toi, j’en serais encore à craindre de mourir sans descendance, tant je refuse tout contact charnel avec une autre peau que la mienne. Tu me rassures, l’avenir n’est plus clos pour les « auto-baisés ».

Ah Dolly ! Dolly…

Trêves de plaisanteries.

Non, scientifiques de mon cœur, vos manipulations me laissent froid. Ma confiance réside toujours en l’alliance harmonieuse des femmes et des hommes. Ça marche depuis tellement longtemps que je doute que vous réussissiez à imposer votre ordre nouveau à l’humanité, ce dont je me réjouis.

Cela étant dit, chapeau pour l’exploit, mais surveillez la circonférence de vos chevilles.

L’Atèle, Paris, le 16 mars 1997