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Cinéma

Faut-il sauver Ryan ou faut-il sauver la mémoire du jour D ?

Le jeudi 8 octobre 1998.

Steven Spielberg

La mémoire du jour D va être sponsorisée. Spielberg s’en occupe : les dollars que rapportera l’épopée du jour D, la boucherie-bravoure du film de Spielberg financeront le memorial prévu pour l’anniversaire du D-day en 2000, ou, si tout va bien, dès 1999.

Spielberg crée un mémorial en Normandie. Les petits Américains ont bien de la chance. Au lieu de s’emmerder avec des bouguins d’histoire et de se faire coller sur la date du jour D, ils vont brancher leur CD-Rom D-Day et le tour est joué. Plus d’erreurs, plus de recherches, plus de curiosité. On n’en a plus besoin, papa, grand-papa Spielberg a fait le grand saut pour nous, a joué le grand jeu et s’est entouré des meilleurs techniciens et acteurs pour massacrer à l’écran nos dernières volontés de réfléchir avec notre propre tête. S’il fallait dénoncer la boucherie et la connerie de la guerre, une demie-heure suffisait. Mais puisqu’il faut sauver « Ryan » et le dire à la mère et après avoir sauvé Ryan vivre pour le mériter, Ryan, le pauvre n’a même plus le choix de la vie qu’il veut vivre. En fait, il voulait s’éclater avec ses potes sur un pont, fabriquer des cocktails d’explosifs (alinéa deux du livre d’instruction de la parfaite petite recrue) et non pas se faire recruter pour l’éternité. Je crois que je préfère la « Fille de Ryan »…

Heike Hurst
émission Fondu au Noir (Radio libertaire)