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éditorial du nº 1095

Le jeudi 9 octobre 1997.

La surveillance et la répression économique font partie de notre quotidien. C’est un étau qui se resserre sans cesse autour de nous, les moindres petites fraudes sont débusquées, les moindres petites tentatives d’échapper au racket capitaliste déclenchent les foudres des services administratifs et des huissiers…

Ce qui permettait, il y a encore quelques années, de passer au travers des filets, relève désormais de la prouesse. Quelques exemples : les amendes contractées dans les transports en commun font l’objet de poursuites de plus en plus sévères ; « traficoter » son compteur EDF devient quasiment impossible grâce à la généralisation d’un nouveau matériel permettant à cette entreprise publique de comptabiliser à distance votre consommation ; des fichiers de locataires « mauvais payeurs » se mettent en place et s’échangent entre les régies et agences immobilières ; la « police des chômeurs » des Directions départementales du travail traque les « faux demandeurs d’emploi » (ces « salauds de pauvres » !)…

Bref, si la situation économique se durcit, la chasse aux fraudeurs (les fraudeurs-prolos, cela va sans dire !) redouble également d’intensité !

Dans ce contexte, la malheureuse Commission nationale de l’informatique et des libertés (la CNIL) s’échine pourtant à prouver son utilité en publiant chaque année son rapport et en faisant état de divers avis dans tous les domaines qui touchent « à nos libertés »… Elle gronde contre la vidéo-surveillance et aboie contre la récente ordonnance relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

Il est vrai que cette ordonnance représente un danger supplémentaire.

Explication : sur une idée originale de M. Barrot, l’ex-ministre du Travail et des Affaires sociale, le NIR (votre « numéro de sécu ») devient utilisable par quasiment l’ensemble des organismes sociaux. L’ANPE et l’ASSEDIC en font déjà un usage courant, et il existe, depuis le 24 avril 1996, un « méga-fichier », appelé le Répertoire national inter-régimes des bénéficiaires de l’assurance maladie (RNIAM) ; fichier qui couvre l’ensemble des assurés sociaux, tous régimes confondus. Le danger d’un tel fichier est tellement évident que la CNIL n’a pu s’empêcher de mentionner dans son rapport : « il a été demandé de prévoir les modalités de destruction du fichier en cas de circonstances exceptionnelles ».

Mais la sage commission ne précise pas quelles pourraient être ces « circonstances exceptionnelles ».... Et, par ailleurs, faut-il attendre de se retrouver en régime totalitaire pour condamner ce gigantesque fichage social dont l’utilisation « ordinaire » nous menace déjà chaque jour ? !