Accueil > Archives > 1997 (nº 1065 à 1104) > 1093 (25 sept.-1er oct. 1997) > [Vers l’introduction massive de la précarité]

Éducation nationale

Vers l’introduction massive de la précarité

Le jeudi 25 septembre 1997.

De la fermeture de Vilvorde à la soumission aux critères de convergence de Maastricht, du refus d’abroger les lois scélérates Pasqua-Debré à la privatisation de France-Télécom sans oublier le maintien du plan Juppé sur la sécu ou les phrases assassines sur la durée du temps de travail, le nouveau gouvernement, c’est clair, n’a pas l’intention de rompre avec l’ancien.

Et dans l’éducation ? Dans un style typiquement populiste, le ministre Alègre a multiplié petites phrases délibérées et provocations dans le but évident de jouer l’opinion publique contre les personnels de l’Éducation nationale. Ce que propose Allègre est dans la droite ligne de ce que faisait Bayrou : aggraver l’autoritarisme et la hiérarchie en renforçant les pouvoirs des chefs d’établissements, attaquer les droits acquis en matière de formation continue, augmenter le temps de travail.

Les suppressions massives de postes aux concours d’enseignement décidées par Bayrou ont été entérinées par Allègre. Du coup, quelques centaines de « reçus-collés » qui figurent sur les listes complémentaires s’apprêtent à relancer la bataille pour être titularisés.

La lutte des M-A

Pendant toute l’année dernière, les maîtres auxiliaires et les suppléants du primaire ont mené une lutte exemplaire : multipliant manifestations, actions spectaculaires et grèves de la faim, ils ont obligé le ministère à négocier. Les principaux syndicats du secondaire, SNES et SNETAA, ont eu une attitude particulièrement écœurante. Ils ont rompu l’unité, ont dénoncé la coordination des M-A et ont cherché à diviser les auxiliaires. Ils ont négocié l’instauration d’un concours « réservé » qui n’offre que 2 000 postes alors qu’il y a 40 000 M-A. Ce concours a été partiellement boycotté. Pour cette rentrée, la plupart des M-A ont été réemployés (sauf ceux qui ont été licenciés avant 1995) mais leur situation précaire demeure. Ils occupent rarement un poste d’enseignement et Allègre a réaffirmé qu’il refusera avec énergie leur principale revendication : la titularisation immédiate sans concours. La lutte des M-A qui ont organisé une marche de Blois à Paris fin août va se poursuivre.

Les « emplois jeunes »

C’est dans l’Éducation que les premiers emplois jeunes vont être recrutés. À terme, on prévoit 150 000 contrats dans l’Éducation. Depuis des années, les précaires (CES, vacataires, M-A, soldats du contingent…) ont progressivement remplacé des milliers de postes nécessaires de secrétariat, de personnels de service, de surveillants, de documentalistes… qui n’ont pas été créés. Avec 150 000 précaires supplémentaires, les suppressions de postes vont s’accélérer.

Certains ont applaudi la création de ces emplois vers lesquels les jeunes se précipitent. Il s’agit en fait de « résoudre » très partiellement le chômage massif des jeunes en généralisant la précarité et à terme en liquidant bon nombre d’acquis garantis par les statuts de la fonction publique. Progressivement, ces jeunes vont assurer des tâches qui justifieront de nouvelles suppressions de postes. Sans formation assurée pendant ce contrat (ils doivent travailler 39 heures), ils se retrouveront au bout de cinq ans dans la même détresse que les CES en fin de contrat.

Il y a donc un véritable enjeu : il faut organiser et syndiquer ces jeunes. Précaires et titulaires devront lutter ensemble pour que tous soient formés et titularisés.

Pierre Stambul