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Prisons : halte à la censure !

Le jeudi 16 octobre 1997.

Un modeste greffier lit les lettres des prisonniers. Attention à celui-là : il fomente des mutineries. Surveillons celle-ci : elle est dangereuse. Bon, il va falloir bloquer le courrier de ce type : il nous emmerde avec ses Droits de l’Homme et son Observatoire international des prisons (OIP). Quant à cet autre, il fricote avec Radio libertaire, et, en particulier, avec « Ras-les Murs ». Il faut le mettre hors d’état de nuire.

Ce qu’il ne sait pas, notre greffier, c’est qu’il applique les consignes de ceux qui l’exploitent. Il gagne 8 000 FF par mois. Son responsable hiérarchique direct empoche 15 000 FF, le directeur 28 000 FF et le ministre de tutelle 50 000 FF, sans compter ce que lui rapporte son entreprise et ses actions en bourse. Un misérable bureaucrate exerce le devoir de censure. Il croit défendre l’ordre établi. Il est à la botte de ceux qui défendent leur ordre à eux, celui des gros privilégiés, qui se sont alliés les semi-privilègiés sur le dos de la grande masse des exclus : les RMIstes, les SDF et les sans aucun droit.

Ceux qui critiquent, qui contestent, qui se révoltent sont ceux qui ont de l’énergie et sauront s’en sortir socialement. Ils ont des projets et des idées. Ils vont même contribuer à l’évolution de la société. La plupart des autres restent dans la soumission à l’autorité. Messieurs les greffiers, apprenez que les rebelles et les contestataires ne sont pas vos ennemis. Ils défendent l’ordre que vous rejetez et qui, pourtant, vous offrirait l’égalité que craignent tous vos maîtres. Lorsque vous vous retournerez sur votre passé, vous constaterez que la société que vous avez soutenue est une dictature démocratique dont la prison est l’enclave totalitaire.

Mais, en censurant les lettres des prisonniers, vous n’aurez en rien aidé les individus, ni protégé la société. Votre obscure contribution aura surtout servi à tuer le modeste espoir de la démocratie directe et de la liberté.

Jacques Lesage de La Haye