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Mai 68

Le jeudi 16 avril 1998.

Encore timide, la célébration du trentenaire des fameux « événements » devrait bientôt battre son plein.

L’Histoire demeurant résolument hostile aux sans-grade, aux anonymes, nous qui étions alors déjà sur le devant de la scène, cheffaillon de groupuscules sectaires, théoriciens délirants d’un avenir rouge et barbelé, nous allons partout parader, grands témoins de ce temps-là, cœur vide et pensée bedonnante, pour cracher sur ce que furent les vingt ans d’une jeunesse en révolte.

Avant de retrouver nos mangeoires de luxe copieusement garnies, nous voudrions ici rendre un bref hommage au mouvement libertaire, et plus spécialement à l’un de ses représentants les plus lucides, Maurice Joyeux, qui, très peu de temps après cette fête somptueuse de la liberté, avait compris que les « motivations profondes » des personnages de notre acabit « sont généralement brèves, juste le temps d’une fugue avant de regagner le bercail pour penser aux choses sérieuses ». Prévoyant alors que « les partis de gauche après maintes palinodies, récupèreront une fraction non négligeable de ces jeunes égarés vers un socialisme utopique vomi par tous les gens sérieux », il en venait directement à notre avenir en écrivant : « Certains d’entre eux seront promus à un destin enviable, à la direction d’organisations se réclamant du socialisme, où les anciens se seront tassés et auront fait un brin de toilette pour les accueillir », ajoutant, pour ceux d’entre nous qui n’ont pas tout à fait suivi ce chemin, que « ce vieux parti [le PS] est tout de même l’asile le plus sûr lorsque, pour le gauchiste, l’heure est venue de s’assurer une honorable retraite dans un ministère, dans un journal, dans une administration… »

Quelle clairvoyance !

Bernard-Henry Lévy, André Glucksmann, Philippe Sollers, Alain gesmar, Daniel Cohn-Bendit, Henri Weber, Julia Kristeva, Serge July, Bernard Kouchner, etc.

p.c.c. Floréal