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Palace-Parfum

Une Odeur de merde

Le jeudi 16 janvier 2003.

Le patron file avec les machines et laisse quarante huit travailleurs et travailleuses sur le carreau.



Ce lundi 6 janvier 2003 restera à jamais gravé dans la mémoire des quarante-huit salarié(e)s de Palace Parfum, une société de conditionnement de parfum (de la sous-traitance), installée à Saint-Nicolas-d’Aliermont (Seine-Maritime). De retour après quinze jours de « vacances forcées », quelle ne fut pas leur surprise, en ce matin d’embauche, de découvrir le local de leur entreprise fermé et vidé de tout son matériel ! Tout a été embarqué ! À l’intérieur, il ne reste plus rien de la chaîne de remplissage des flacons… Certes, le gérant leur avait fait part de « difficultés » rencontrées par la boîte, d’où les congés imposés. N’empêche que jusqu’au bout il se voulait rassurant. Si bien que le dernier jour avant cet « arrêt », il leur avait dit au revoir et leur avait même souhaité la bonne année ! Comme quoi il ne faut vraiment pas faire confiance aux patrons. Et ce courageux gestionnaire de justifier son attitude : c’était par pure bonté d’âme, pour ne pas gâcher le réveillon des employés qu’il n’a rien dit. Le bon apôtre !

Embrouillaminis

Du coup, passé le choc, on réalise que sans lettre de licenciement, pas d’Assedic, pas d’indemnités. Les employés préparaient donc leurs dossiers pour les Prud’hommes, vraiment le minimum, quand ils ont appris que le gérant se présentait le mercredi 8 au Tribunal de commerce. Ledit tribunal s’est empressé de prononcer la liquidation judiciaire, ce qui leur ouvrira les droits au chômage, maigre consolation. Quant à la fermeture, c’est soi-disant que « la société n’avait plus qu’un client, d’ailleurs, on aurait dû fermer depuis plusieurs mois, bref, on a été généreux en prolongeant l’activité, quant aux machines, elles étaient en location, il fallait les rendre ! » Là-dessus, on apprend que le gérant ne serait pas le gérant mais un homme de paille. Voilà qui promet ! Et qui renforce les soupçons sur la fermeture-déménagement à la sauvette de cette étrange société, notamment qu’il y aurait plutôt de la délocalisation dans l’air.

Un symbole

Une cinquantaine de salarié(e)s sur le carreau, c’est hélas banal. Ce qui est symptomatique dans cette affaire, outre le côté scandaleux et émotionnel, c’est le cynisme des patrons et le mépris total dans lequel ils tiennent les travailleurs, en l’occurrence ici majoritairement des travailleuses. On se sent les coudées franches, y’a pu à se gêner ! Le ministre des Affaires sociales Fillon pousse des cris d’indignation, l’hypocrite ! Son action se résume en quelques mots : tout pour les patrons ! Et ils s’étonne après que ces derniers se croient tout permis ! Quitte à se répéter, cette triste affaire est emblématique de cette société capitaliste où les salarié(e)s ne comptent pas plus que ça, des variables d’ajustement comme ils disent. Jusqu’à quand allons-nous supporter l’insupportable ?

Éric Gava, groupe de Rouen