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À la petite semaine

L’Épave

Le jeudi 17 avril 1997.

Dans l’un de ses textes, qui toujours prirent le sens des valeurs, officielles ou non, à rebrousse-poil, Georges Brassens chantait l’histoire d’un poivrot jeté ivre mort sur le pavé par un bistrotier ayant préalablement encaissé la monnaie.

Tour à tour un va-nu-pieds, un étudiant, la femme d’un ouvrier et une « petite vertu » le dépouilleront de ses vêtements et de ses souliers, le laissant nu sur le trottoir où seul un flic pépère le protégera du froid en le couvrant de sa pèlerine.

Nous vivions, concluait le poète, des temps bien singuliers…

En 1981, profitant du changement politique que l’on sait, les radios libres, réelles ou supposées, se multipliaient. Elles ne le purent que grâce au combat de quelques rares pionniers qui, des années auparavant, bravant tous les dangers, avaient choisi la liberté d’émettre sans l’autorisation des maîtres. Les fondateurs d’Ici et Maintenant étaient de ceux-là.

L’an dernier, pour quelques sales dérapages non contrôlés, cette station fut jetée comme on sait des ondes aujourd’hui surveillées.

Tour à tour, ceux qu’un minimum de solidarité aurait dû amener à épauler cette radio en danger s’en sont honteusement détournés, la laissant à poil et sans voix. On la croyait coulée, et voilà que le Conseil d’État vient de la sauver.

Une parole libre, bientôt, pourra de nouveau s’exprimer, qui ne devra rien aux fanfarons de la liberté d’expression.

Nous vivons des temps bien singuliers…

Floréal