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Sida

toujours le silence
Le jeudi 22 janvier 1998.

L’info sur le sida, elle ne passera pas par moi… Kouchner ne le veut pas ! Les moyens de se prémunir contre le sida sont connus : abstinence ou capote. Mais il en est un autre que le ministère de la santé (Kouchner…) se garde bien de promouvoir auprès du grand public. En effet, lorsqu’un chirurgien se coupe en opérant une personne séropositive, lorsqu’une infirmière se pique avec une seringue potentiellement contaminée, ou encore quand un préservatif se rompt lors d’un rapport sexuel alors que l’un des protagonistes est avéré séropositif, il existe un soin possible.

Dans les heures qui suivent le contact avec le VIH (rappelons toutefois que la transmission n’est pas pour autant systématique), la personne exposée peut — à l’hôpital, et pourvu que le médecin estime le risque réel — subir un traitement, certes très contraignant (de nombreuses pilules à heures fixes pendant un mois, avec des risques de troubles de la personnalité), mais efficace à 80 % contre la contamination !

Une telle information devrait être diffusée le plus largement possible : c’est sans compter avec le ministère de la Santé et ses personnels. Ils ont peur — disent-ils — que la divulgation à grande échelle de cette thérapie déresponsabilise les rapports sexuels : « Si l’on sait que l’on peut se faire soigner après une prise de risque, qu’est-ce qui dissuadera le bon peuple de prendre des risques ? » Surtout que la thérapie coûte cher.

Le parallèle avec la pilule abortive (RU486), voire avec l’avortement, est évident. Dans les deux cas, on se garde bien de promouvoir ces possibilités et d’en faciliter l’accès, sous prétexte qu’informé, le commun des mortels adopterait dès lors un comportement sexuel irresponsable ! Il est triste qu’une corporation et son ministère confondent leur rôle de garants de la santé publique avec celui d’avant-garde éclairée du peuple ! Car qu’est-ce qui déresponsabilise ? La rétention d’information (source, depuis toujours, de pouvoir pour celui qui la détient), ou l’appropriation de celle-ci par la masse, consciente évidemment qu’un avortement, que la prise de RU486 ou encore de trithérapie sont des expériences traumatisantes, aux séquelles physiques et psychologiques réelles ? Non, Docteur Kouchner, la masse n’est pas le bon peuple ignorant dont tu rêves, et que toi et les tiens n’imaginez comme telle que parce cette vision seule justifierait votre prétendue supériorité.

Manu
groupe La Commune (Rennes)