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Lyon

Attentat fasciste contre le Planning familial

Le jeudi 21 mai 1998.

Dans la nuit du 11 au 12 mai dernier, un groupe organisé, cagoulé et ganté, a dévasté le centre de planification du Mouvement français pour le planning familial de Villeurbanne (MFPF) [1].

Les moyens de communication et d’information comme l’ordinateur et le fax ainsi que le matériel médical et les outils de prévention tels que les préservatifs, pilules et plaquettes d’information ont été totalement saccagés. Un acharnement particulier a notamment été porté au centre de documentation où livres et brochures ont été détruits. Devant ces faits, le Planning familial a été contraint dans un premier temps à l’arrêt total de ses activités.

Il faut rappeler que les locaux du Planning familial se trouvent au premier étage d’un immeuble d’une cité de Villeurbanne. Une telle agression ne s’est pas faite sans bruit et les voisins, alertés, ont prévenu la police. Alors que celle-ci est capable d’envoyer la BAC (Brigade anticriminalité) pour boucler un tel quartier en peu de temps lorsque l’agitation s’y développe, elle n’est pas intervenue assez rapidement pour interpeller les responsables de l’agression… Une même police qui préfère orienter officiellement ses soupçons vers le règlement de compte d’un couple ou d’une famille mécontents des services du Planning.

Bien évidemment, nous ne pouvons être dupe devant une telle version des faits. Dans le contexte politique actuel de la région Rhône-Alpes, cet attentat n’est pas un épiphénomène dénué de fondement politique. C’est un acte planifié d’un groupe organisé et déterminé au politiquement, cherchant à semer la peur et à menacer l’exercice de structures qui défendent en premier lieu le droit et la liberté des femmes.

Contre le fascisme, solidarité avec le Planning familial !

Décidément, Lyon est en passe de se tailler une solide réputation de ville phare des menées fascisantes et ce dans différents domaines. Il faut d’ailleurs ne pas oublier que le poids de la calotte à toujours été importants dans cette ville et que l’Église à toujours cautionné les attaques et remise en cause du droit à l’avortement et la contraception. Depuis un peu plus d’un an, les attaques fascistes, certainement stimulées par le contexte national et local, se sont multipliées. Les lecteurs du Monde libertaire s’en souviennent, il y a un peu plus d’un an, le 16 février 1997, la librairie de « la Plume noire », librairie de la Fédération anarchiste, était incendiée par l’extrême droite. Le 5 mai de la même année, le local du syndicat étudiant Unef-ID à l’Institut d’études politiques était à son tour saccagé. Le 14 janvier 1998, une grenade à plâtre est lancée par un militant du FNJ sur des diffuseurs de tracts antifascistes dans les locaux de la « manu » (ancienne manufacture des tabacs) à l’université Lyon III. Le 13 février, le local de l’Unef-ID de la manu est à son tour détruit. Depuis on peut noter une tentative d’effraction à la librairie libertaire la Gryffe, diverses provocations depuis la réouverture de la Plume noire, ou encore des menaces contre des militants de diverses organisations, reçues à leurs domiciles. C’est bien dans ce contexte que s’inscrit l’attentat contre le Planning familial. De plus, la nouvelle majorité du conseil régional, gérée par une alliance de la droite de Millon et des fascistes notoires du FN ne peut que nous inquiéter pour les mois et années à venir en ce qui concerne le droit des femmes. Il est fort à parier qu’un des premiers angles d’attaque de l’extrême droite au niveau des conseils régionaux où elle est en rapport de force va se faire sur la question du droit des femmes et en particulier sur les possibilités d’information et d’accès au droit à la contraception et à l’IVG.

Afin de protester contre cette attaque et organiser la riposte, une manifestation unitaire à l’appel du Planning familial a rassemblé un petit millier de personnes le samedi 16 mai dans les rues de Lyon. Il est néanmoins important de noter que si de nombreuses organisations syndicales, associatives ou politiques ont apporté leur soutien et étaient présentes sous la forme de quelques uns de leurs militants badgés et dispersés, aucunes n’a fait l’effort de mobiliser ses troupes et sympathisants, ni même d’apparaître en tant que tel dans la manifestation avec banderoles et slogans. La manifestation était seulement composée d’un cortège du Planning familial… et d’un cortège de la Fédération anarchiste [2].

Si les absents ont toujours tort, on peut néanmoins s’interroger sur les sombres calculs politiciens, fait cette fois-ci sur le dos des femmes, qui ont poussé la gauche plurielle et son extrême à ignorer en tant que structure collective cette manifestation de solidarité. Ces sombres calculs risquent malheureusement d’être lourds de conséquences en ce qui concerne le droit des femmes mais aussi les capacités à endiguer la monter de la peste brune. Sur le terrain de la lutte des femmes, il y a là aussi urgence à rompre avec une gauche qui pue du bec et à développer une expression et une structuration qui s’inscrivent dans la construction d’un mouvement social autonome de toutes représentations politiques et qui soit porteur de ses propres dynamiques et perspectives d’émancipation sociale.

David
groupe Durruti (Lyon)


[1Pour toutes informations ou soutien financier écrire à : MFPF, 2 rue Lakanal, 69100 Villeurbanne.

[2Pour être exact, il faut préciser qu’un cortège des grévistes de la faim contre la double peine s’est joint à nous en raison de la journée nationale d’action des sans papiers et pour laquelle nous avions appelé à un rassemblement lyonnais bien avant les sinistres événements qui ont touché le Planning familial. Voir l’article en page 3 de ce même numéro pour plus d’informations.