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On vaulx mieux !

l’autogestion au quotidien
juillet 2003.

Lancé dès le mois d’avril 2003, le collectif des personnels et des parents d’élèves de Vaulx-en-Velin, « On vaulx mieux », a été un élément incontournable des mobilisations de l’Éducation nationale sur la région lyonnaise, tout en présentant des formes de lutte d’inspiration libertaire : autogestion, démocratie et actions directes.

Face aux mauvais coups du gouvernement sur l’Éducation, convaincu que les ZEP (zone d’éducation prioritaire) se retrouveront en première ligne, et face à la timidité des grosses centrales syndicales à se lancer dans une bataille à la hauteur des enjeux, un petit groupe de militant(e)s (principalement issus de la CNT-éducation) a pris l’initiative d’appeler à la formation d’un collectif sur la base territoriale de Vaulx-en-Velin par-delà les appartenances syndicales et catégorielles, rassemblant syndiqués comme non-syndiqués et étant ouvert aux parents d’élèves.

Après plusieurs AG rassemblant entre 60 et 80 personnes, le collectif s’est lancé dans la rédaction d’un Livre blanc de l’éducation à Vaulx-en-Velin ayant pour but de dresser un état des lieux de nos problèmes et de faire émerger des demandes et des revendications. Le travail autour de ce Livre blanc a abouti à une journée « école morte » sur Vaulx-en-Velin, le 10 avril, où des dizaines de classes étaient fermées et où 75 % des enseignants des quatre collèges de la commune étaient en grève. Face au mépris et au refus de nous entendre des autorités, qui ne se sont pas déplacées à notre invitation, la colère montait et nous étions déterminés à nous lancer dans un mouvement de grève reconductible, dès le 6 mai, à la rentrée des vacances de printemps.

Le 6 mai, plus d’une quarantaine de personnes du collectif partaient en grève reconductible avant d’être rejointes par de nombreux collègues le 13 mai.

Au total, c’est entre 150 et 200 personnes qui ont participé au mouvement qui s’est poursuivi jusqu’au 19 juin. Lors des grosses journées d’action, c’est plus de 350 enseignants, sur les 500 que compte la commune de Vaulx-en-Velin qui étaient en grève.

Durant toute la lutte, le secteur de Vaulx a été le plus mobilisé et le plus actif de l’agglomération lyonnaise. Le collectif se trouvant souvent en tête de manifestation et sa médiatisation témoignent de cette réalité. De plus, les propositions du collectif dans les AG départementales ont souvent été reprises, et le collectif à joué un rôle central dans des opérations « coup de poing », comme le blocage ou l’occupation du rectorat.

En terme de fonctionnement, le collectif, qui s’est très rapidement confondu avec l’AG des grévistes de Vaulx, était structuré sur une AG quotidienne le matin de 9 à 11 heures où les décisions étaient prises. Nous avons tenté de faire tourner au maximum l’animation de ces AG où chacun avait un libre accès à la parole et pouvait faire les propositions qu’il souhaitait avant de les voir passées au vote. Chaque AG comportait un point info, un compte rendu des commissions, une discussion et un vote sur la reconduction de la grève décidée au quotidien.

Afin de préparer ces AG et de faire circuler l’information un GAG (Groupe d’animation de la grève) a été mis en place composé d’un(e) représentant(e) de chaque école et établissement de Vaulx. Il jouait en quelque sorte le rôle d’un secrétariat de coordination. Chaque AG mandatait à chaque fois une ou deux personnes différentes pour nous représenter aux AG départementales.

Afin d’organiser nos actions, plusieurs commissions ont donc été mises en place : une commission relation avec les parents, chargée d’élaborer des tracts et lettres à destination des parents, d’organiser des réunions d’infos avec eux ainsi que nos présences sur les marchés de la commune ; une commission animation afin de préparer une animation thématique lors de chaque apparition publique du collectif et, enfin, une commission élargissement de la lutte afin de tisser des liens interprofessionnels avec d’autres secteurs en lutte, en priorité sur Vaulx.

Dans cette dynamique, lorsque les communaux de Vaulx sont à leur tour partis en grève reconductible sur la question des retraites, nous avons investi ensemble durant une dizaine de jours le centre culturel de la ville transformé en véritable conseil de grève. En plus des AG, nous avons aussi mené plusieurs actions en commun, notamment dans la zone industrielle de la ville en direction des salariés du privé. À partir de ce moment, nous avons, dans chaque manifestation, défilé ensemble, personnel de l’Éducation et communaux, derrière une banderole « Vaulx-en-Velin en lutte ». Nous avons fait là l’expérience de la lutte et de la solidarité interprofessionnelle.

Cette organisation transversale des grévistes a permis de déborder les blocages des bureaucraties syndicales et de donner plus d’ampleur au mouvement. Elle a garanti l’unité de la lutte tout en permettant à chaque gréviste de s’approprier le mouvement en en étant pleinement acteur.

Quel que soit le résultat de notre mouvement en terme de revendications, nous avons déjà gagné en ce qui concerne la construction d’un réseau de lutte, autonome de toute logique bureaucratique ou politicienne et des logiques d’appareils, fondé sur des pratiques d’auto-organisation et qui ne demande qu’à redémarrer, tant la détermination est encore forte à vouloir promouvoir d’autres choix de société. Une AG de rentrée est déjà prévue !

David, groupe Kronstadt, FA Lyon, CNT-éducation, Vaulx-en-Velin