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Grève enseignante

La Seine-Saint-Denis se mobilise

Le jeudi 2 avril 1998.

Il aura fallu que le rapport présenté par le recteur d’académie Frottiez mette en avant la situation dégradée de l’enseignement en Seine-Saint-Denis [1], pour que le ministère se décide à faire quelque chose.

Mais, au vu de l’ampleur des besoins, le « plan de rattrapage », proposé le 2 mars dernier par Ségolène Royal et Claude Allègre, a été reçu par les enseignants du département comme une véritable provocation. Car, derrière l’effet d’annonce, ils ont rapidement réalisé le vide des propositions. D’abord, seuls les collèges bénéficieront de ce plan. Et si deux cents postes supplémentaires sont prévus en deux ans, cela ne représente jamais qu’une moyenne de cinq heures supplémentaires par collège, ce qui, pour certains d’entre eux, ne permettra même pas de compenser les suppressions déjà prévues. Quant à la décision de doubler le nombre des aides-éducateurs, cela ne représente pas grand-chose dans la réalité puisqu’aujourd’hui déjà, moins de la moitié des postes créés sont pourvus (42 %).

Un mouvement en crescendo

Dans les collèges, un mouvement de grève a été lancé le 12 mars pour déboucher, le 17 mars, sur une manifestation de 3 000 personnes (une soixantaine d’établissements en grève).

En primaire et en maternelle, cette semaine a permis de préparer la mobilisation des enseignants et des parents d’élèves qui ont appelé pour le 21 à une journée « École déserte ». À l’appel des organisations de parents d’élèves (FCPE) et des organisations syndicales enseignantes (FSU, CGT, CFDT, SUD), cette journée a été marquée par une manifestation avec les enseignants des collèges au ministère qui a rassemblé 5 000 personnes.

La semaine suivante a été marquée, le jeudi 26 (jour de la réunion du Comité départemental de l’Éducation nationale, qui décide de la carte scolaire), par une journée de grève dans les écoles et les collèges (68 % de grévistes, selon le SNES) et par le rassemblement d’environ 12 000 personnes.

Dans le même temps, les négociations, engagées avec le ministère, ont débouché sur l’ajout de cinq cents heures aux mille heures d’enseignement qui avaient été proposées, le 2 mars, par le ministère. Aucune autre mesure n’a été proposée, ni pour le Premier degré, ni pour les lycées. La FCPE (fédération de parents d’élèves) et le SEFEN, qui avaient appelé à la mobilisation, ont accepté ces bases de négociations. La FSU, quant à elle, s’est refusée à poursuivre les négociations et a appelé à poursuivre l’action.

Dans les écoles, la situation est assez indécise : si certaines écoles ont paru modérément mobilisées, d’autres ont poursuivi l’action, à l’exemple des collèges, par une grève reconductible dès le vendredi 27. Il a été décidé de participer à la manifestation organisée, le samedi 28, contre le Front national (et c’est de circonstance puisque, selon Claude Allègre, nous soutenions le Front national en manifestant le samedi 21 mars) et de préparer activement la nouvelle journée de grève du mardi 31 mars, à l’appel du SNU-ipp (syndicat FSU du Premier degré).

La semaine qui s’annonce sera donc déterminante, selon qu’elle permettra ou non une forte mobilisation pour l’action du 31 mars, d’autant que les vacances de Pâques approchent.

P.B.
groupe Poulaille


[1Notamment le record d’échec au bac : un élève sur deux. Si l’on trouve, parmi les raisons de ces échecs, une situation économique et sociale catastrophique, il faut aussi y voir les effets de la dégradation continue, depuis plus d’une dizaine d’années, des conditions d’enseignement : 20 % de scolarisation des enfants de 2 à 3 ans (la moitié du taux de scolarisation au niveau national), plus de 30 % de postes vacants pour l’enseignement spécialisé (AIS) en primaire, près de 200 postes d’enseignants et 650 postes du personnel non-enseignant dans le secondaire.