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18 mars 1871

La Commune par elle-même

Le jeudi 13 mars 2003.

« On oublie trop que le mouvement communaliste doit avoir pour objectif incessant de remettre aux citoyens eux-mêmes, au moyen de leurs assemblées de quartiers, le soin de régler leurs intérêts collectifs et locaux et que l’administration centrale ne doit pas être que la coordinatrice des décisions prises dans les réunions locales au lieu de rester, comme devant, l’unique juge et directeur des intérêts de tous. »

Gustave Lefrançais



Travailleurs

L’insolidarité des intérêts a créé la ruine générale, engendré la guerre sociale ; C’est à la liberté, à l’égalité, à la solidarité qu’il faut demander d’assurer l’ordre sur de nouvelles bases, de réorganiser le travail qui est condition première.

Travailleurs,
La révolution communale affirme ces principes , elle écarte toute cause de conflit dans l’avenir. Hésiterez-vous à lui donner votre sanction définitive ?
L’indépendance de la Commune est le gage d’un contrat dont les clauses librement débattues feront cesser l’antagonisme des classes et assureront l’égalité sociale.

Nous avons revendiqué l’émancipation des travailleurs et la délégation communale en est la garantie car elle doit fournir à chaque citoyen les moyens de défendre ses droits, de contrôler d’une manière efficace les actes de ses mandataires chargés de la gestion de ses intérêts et de déterminer l’application progressive des réformes sociales.

L’autonomie de chaque commune enlève tout caractère oppressif à ses revendications et affirme la République dans sa plus haute expression.

Nous avons combattu, nous avons appris à souffrir pour notre principe égalitaire, nous ne saurions reculer alors que nous pouvons aider à mettre la première pierre de l’édifice social.

Qu’avons-nous demandé ? L’organisation du crédit de l’échange, de l’association afin d’assurer au travailleur la valeur intégrale de son travail. L’instruction laïque et intégrale ; le droit de réunion et d’association, la liberté absolue de la presse, celle du citoyen ; l’organisation au point de vue municipal des services de police, de force armée, d’hygiène de statistique, etc.

Travailleurs,
Nous avons été dupes de nos gouvernants, nous nous sommes laissé prendre à leur jeu alors qu’ils caressaient et réprimaient tour à tour les factions dont l’antagonisme assurait leur existence.

Aujourd’hui le peuple de Paris est clairvoyant, il se refuse à ce rôle d’enfant dirigé par le précepteur et dans les élections municipales, produit d’un mouvement dont il est lui-même l’auteur, il se rappellera que le principe préside à l’organisation d’un groupe, d’une association est le même qui doit gouverner la société entière et comme il rejetterait tout administrateur, président imposé par un pouvoir en dehors de son sein, il repoussera tout maire, tout préfet imposé par un gouvernement étranger à ses aspirations.

Il affirmera son droit supérieur au vote d’une assemblée de rester maître dans sa ville et de constituer comme il lui convient sa représentation municipale sans prétendre l’imposer aux autres.

Dimanche 26 mars, nous en sommes convaincus, le peuple de Paris tiendra à l’honneur de voter pour la Commune.

Les délégués présents à la séance de nuit du 23 mars 1871
Association internationale des travailleurs. Conseil fédéral des sections parisiennes

À propos de la création du comité de salut Public

Considérant que l’institution d’un comité de salut public aura pour effet essentiel de créer un pouvoir dictatorial qui n’ajoutera aucune force à la Commune Attendu que cette institution serait en opposition formelle avec les aspirations politiques de la masse électorale dont la Commune est la représentation. Attendu en conséquence que la création de toutes dictatures par la Commune serait de la part de celle-ci une véritable usurpation de la souveraineté du peuple, nous votons contre.

Paris le 2 mai 1871 : Andrieu, Langevin, Ostyn, Vermorel, V. Clément, Theiz, Sérailler, Avrial, Malon, Lefrançais, Pindy, Courbet, Girardin, Clémence, Arnould, Beslay, Vallès, Varlin, Jouve

Manifeste du comité des vingt arrondissements

La commune est la base de tout de tout État politique… Elle doit être autonome, c’est à dire se gouverner et s’administrer elle-même… L’autonomie de la commune garantit au citoyen, la liberté, l’ordre à la cité, et la fédération de toutes les communes augmente par la réciprocité, la force, les débouchés et les ressources de chacune d’elle en la faisant profiter des efforts de toutes. Elle implique :

  • la liberté la plus complète de parler, d’écrire de se réunir et de s’associer ;
  • le respect de l’individu et l’inviolabilité de sa pensée ;
  • la souveraineté du suffrage universel, restant toujours maître de lui-même et pouvant se convoquer et se manifester incessamment ;
  • le principe de l’élection à tous les fonctionnaires et magistrats ;
  • la responsabilité des mandataires et par conséquent leur révocabilité permanente ;
  • le mandat impératif, c’est à dire précisant et limitant le pouvoir et la mission du mandataire …

Sur l’organisation de la Garde nationale

La fédération républicaine de la Garde nationale est organisée ainsi qu’il suit : l’assemblée générale des délégués ; le cercle de bataillon ; le conseil de guerre ; le comité central. L’Assemblée générale est formée d’un délégué élu à cet effet dans chaque compagnie sans distinction de grade. D’un officier par bataillon élu par le corps des officiers et du chef de chaque bataillon Ces délégués quel qu’il soit sont toujours révocables par ceux qui les ont nommés :

  • Le Cercle de bataillon est formé de trois délégués par compagnie sans distinction de grade. De l’officier délégué à l’assemblée générale. Du chef de bataillon.
  • Le conseil de légion est formé : de deux délégués par compagnie sans distinction de grade. Des chefs de bataillon de l’arrondissement.
  • Le comité central est formé de deux délégués par arrondissement, élus sans distinctions de grade par le conseil de légion. D’un chef de bataillon par légion, élus par ses collègues.

Les réunions de l’assemblée générale auront lieu les premiers dimanches du mois, sauf urgence.

Paris le 20 mars 1871

Les étrangers peuvent-ils être admis à la Commune ?

Considérant que le drapeau de la Commune est celui de la République universelle ; considérant que toute cité a le droit de donner le titre de citoyens aux étrangers qui la servent. Que cet usage existe depuis longtemps chez les nations voisines. Considérant que le titre de membre de la commune étant une marque de confiance plus grande encore que le titre de citoyen, comporte implicitement cette dernière qualité.

La commission est d’avis que les étrangers peuvent être admis. La commission propose l’admission du citoyen Léo Frankel.

Paris le 30 mars 1871

La colonne Vendôme

La Commune de Paris considère que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire, une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l’un des trois grand principes de la République : la fraternité !

Sur l’éducation

Les délégués de la société « L’Éducation nouvelle » ont été reçu par les membres de la Commune et lu une déclaration :

À la commune de Paris,

Considérant la nécessite qu’il y a sous une république à préparer la jeunesse au gouvernement d’elle-même par une éducation républicaine qui est toute à créer.

Considérant que la question de l’éducation, laquelle n’est exclusive d’aucune autre, est la question mère qui embrasse et domine toutes les questions politique et sociales et sans la solution de la quelle il ne sera jamais fait de réformes sérieuses et durables.

Considérant que les maisons d’instruction et d’éducation entretenue par la commune, par le département ou par l’état doivent être ouvertes aux enfants de tous les membres de la collectivité, quelles que soient les croyances intimes de chacun d’eux. Les soussignés, délégués de la société « L’Éducation nouvelle », demandent d’urgence, au nom de la liberté de conscience, au nom de la justice :
 Que l’instruction religieuse ou dogmatique soit laissée toute entière à l’initiative et à la direction libre des familles et qu ’elle soit immédiatement et radicalement supprimée pour les deux sexes, dans toutes les écoles, dans tous les établissements dont les frais sont payés par l’impôt.
 Que ces maisons d’instruction et d’éducation ne contiennent aux places exposées aux regards des élèves ou du public aucun objet de culte, aucune image religieuse.
 Qu’il n’y soit enseigné ou pratiqué, en commun, ni prières, ni dogmes, ni rien de ce qui est réservé à la conscience individuelle.
 Qu’on n’y emploie exclusivement que la méthode expérimentale ou scientifique, celle qui part toujours de l’observation des faits, quelle qu’en soit la nature physiques, moraux, intellectuels.
 Que toutes les questions du domaine religieux soient complètement supprimées dans tous les examens publics et principalement dans les examens pour brevets de capacité.
 Qu’enfin les corporations enseignantes ne puissent plus exister que comme établissements privés ou libres.

La qualité de l’enseignement étant déterminée tout d’abord par l’instruction rationnelle, intégrale qui deviendra le meilleur apprentissage possible de la vie privée, de la vie professionnelle et de la vie politique ou sociale. La société l’éducation nouvelle émet en outre le voeu que l’instruction soit considérée comme un service public de premier ordre qu’en conséquence, elle soit gratuite et complète pour tous les enfants des deux sexes à la seule condition du concours pour les spécialités professionnelles.

Enfin, elle demande que l’instruction soit obligatoire en ce sens qu’elle devienne un droit à la portée de tout enfant quelle que soit sa position sociale et un devoir pour les parents ou pour le tuteurs ou pour la société.

Les délégués nommés dans la séance du 26 mars 1871 à l’école Turgot : Henriette Garoste ; Louise Lafitte ; J. Manier ; J Rama ; Rheims ; Maria Verdure

Sur les Clubs

Créés avec l’avènement de la République, Ils se multiplièrent sous la Commune. Les églises furent transformées en lieux ouverts à tous et toutes. Il fonctionnaient selon la formule de la démocratie directe : Un président et deux assesseurs élus par séance. Ce sont eux par exemple qui demandèrent la destruction de la colonne Vendôme, monument à la gloire du despotisme et de la guerre.

« Il est temps d’en finir avec le vieux monde pourri et corrompu qui vit à nos dépends. Il faut que le travail soit maître ! vainquons et proclamons universellement que celui qui ne produit pas ne doit pas consommer et notre œuvre splendide et grandiose sera reçu comme la délivrance ».

Le Club de la révolution (église St Bernard XVIIIe). « C’est avilir l’homme et la femme que de s’en servir comme esclave. Un autre vice de la société actuelle, ce sont les riches, qui ne font que bien boire et bien s’amuser sans prendre aucune peine. Il faut les extirper, ainsi que les prêtres et les religieuses. Nous ne serons heureuses que nous n’aurons plus ni patrons, , ni riches ni prêtres ! La plaie sociale qu’il faut d’abord fermer c’est celle des patrons qui exploitent l’ouvrier et s’enrichissent de ses sueurs. Plus de patrons qui considèrent l’ouvrier comme une machine de produit. Que les travailleurs s’associent entre eux qu’ils mettent leurs labeurs en commun. »

Le Club de la délivrance (église de la Trinité) « Je sui athée, socialiste et révolutionnaire. Athée, parce qu’en fouillant les anales des peuples de l’univers, en considérant les événements contemporains, j’ai constaté que chaque fois qu’on avait eu du sang à verser, une grande iniquité à commettre, on s’était abrité derrière une divinité quelconque. »